Rachelle s’approcha de nouveau de moi, et de nouveau elle m’attrapa la main, comme je l’avais fait quand elle avait eu besoin de moi. Le coeur chaud, les yeux humides, je sentis qu’elle voulait que je la regarde dans les yeux. Je compris que je m’étais ouverte à elle, à ses pensées. Je la laissai donc plonger son regard dans le mien :
—Parfois, dit-elle, il est nécessaire de risquer jusqu’à notre vie pour obtenir ce que nous souhaitons. Si tu abandonnes tes rêves, c’est comme si tuais de tes propres mains une partie de toi-même.
Bien sûr qu’elle avait raison. Mais…
Elle ajouta qu’elle détestais mon métier parce qu’elle se faisais un sang d’encre pour moi ; l’imaginer s’inquiéter me serra le cœur.
—Mais je serais la pire des hypocrites de te dire d’abandonner ce rêve parce qu’il est dangereux. Je suis la première à me jeter tête la première face au danger pour accomplir mes rêves, je n’ai pas le droit de te dire d’arrêter parce que c’est dangereux. Ca s’est mal passé une fois, tu t’es retrouvé plus bas que terre. Tu te demandes si tu ne ferais pas mieux de te cacher à jamais pour rester en vie. Mais ce n’est pas une vie de rester chez soi.
… Je ne voulais pas rester chez moi…
Elle poursuivit en disant qu’il y avait toujours des solutions, je tout le monde pouvait faire des erreurs, mais que l’important était de ne pas abandonner. Je déglutit.
—Tu as toute la vie devant toi, compte tu vraiment laisser l’enfer que tu as vécu te poursuivre jusqu’à ton dernier souffle ?
Elle s’approcha un peu plus, et je sentis son coeur accélérer… et le mien le suivre.
—J’aimerai te proposer quelque chose, continua-t-elle. Toute cette affaire à prouver que la couronne avait bien du mal à trouver des informations. Ils ont eu besoin de faire appel au peuple. A des gens comme Mirari, comme Rengoku ou Bohémond pour trouver des informations. Ils les ont trouvés chez toi parce que tu sais ce que tu fais. Tu marchandes les informations avec génie, ta façon de jauger la valeur des informations, de déceler ce qui peut être important dans un discours, de te créer un véritable réseau de contact pour avoir un œil sur chaque fait et gestes au sein du Reike. Tu es une maîtresse dans le domaine Marceline. C’est comme si les astres t’avaient conçus dans le but de jouer à la pêche et revente aux informations.
Je fermais douloureusement les yeux. Elle ne savais pas que j’avais moi-même fait la bêtise qui m’avais mise dans ce pétrin.
— Je pense que la couronne se méprend sur la façon dont ils auraient dû te traiter, poursuivit-elle alors que je rouvrais les yeux. Ce n’est pas un châtiment que tu méritais. Non, ce qu’ils auraient du faire, c’est t’offrir un poste.
Elle continua son monologue en disant que la couronne devrait me verser un salaire pour leur transmettre les informations importantes à savoir du Reike, qu’ils auront les yeux du peuple avec moi.
—Tu étais là lorsque Rengoku et moi avions parlé de faire du Reike un endroit de rêve. Tu peux aussi y contribuer Marceline.
Une étincelle s’alluma dans mes yeux alors qu’elle prononçait sa dernière phrase :
—Le Reike ne sera pas un endroit idyllique à mes yeux si tu n’y es pas pleinement heureuse.
Je sentis à travers mon pouvoir ses joues se réchauffer, et les miennes les imiter. Serrant un peu plus ma main, elle tapa du pied pour se donner du courage, puis retourna son regard vers moi.
—Marceline. Je pense que je suis vraiment attachée à toi. Tu sais que quel que soit ton rêve, tant qu’il n’entre pas en contradiction avec le mien, je donnerai corps et âme pour t’aider à l’accomplir. Fais moi confiance.
Le coeur battant, je ne savais que répondre, comment réagir. Elle changea de sujet.
—Au sujet de ta tante… quand tu dis qu’elle est liée à cet événement. C’est dans quel sens ? Tu penses qu’elle serait venue pour te torturer ? Elle n’a pas l’air d’être une sorte d’agent secret du gouvernement. Ça n'a pas beaucoup de sens. Si c’est elle qui t’a fait ça… alors qu’elle est de ta famille. Tu as le droit d’être en colère contre elle. Souhaites-tu que nous allions la voir pour que tu puisses lui dire le fond de ta pensée ? Quoi qu’il arrive, elle ne te touchera pas. Je te protégerai.
Je secouai la tête avant de la poser sur son épaule, mon front contre son cou. Je repensai à tout ce qu’il s’était passé, mais cette fois, une heureuse certitude en tête, j’aurais le courage d’affronter ce qu’il s’était passé.
—J’ai été idiote. J’ai donné, ou plutôt vendu cette information à une agente du gouvernement. Je lui ai moi-même avoué que j’étais en possession de cette information qui était évidemment confidentielle. Je suis pas un génie. J’ai aucune idée de ce que je fais.
J’avais fermé les yeux.
—Le lendemain matin, Mirari est venue me voir pour me menacer, pour que je ne révèle à personne cette information précisément. Je lui ait dit que c’était trop tard, alors elle m’a dit que je devrais dire au gouvernement que c’était un autre type qui m’avait transmis cette info. Un soldat qu’elle aimait pas, elle a pas voulu me dire pourquoi. Elle m’a fait comprendre que je risquais gros si je disais la vérité. C’est un euphémisme, elle m’a clairement menacée. Quand elle est partie, pour me changer les idées, je me suis mise à travailler sur une potion que je voulais t’offrir. Je suis ensuite partie au marché pour acheter les ingrédients dont j’avais besoin pour faire les premiers tests de la potion, et quand je suis revenue, j’ai trouvé ma roulotte saccagée. La porte s’est fermée derrière moi et un type s’est révélé en allumant une bougie, dans mon fauteuil. Il m’a menacée, et alors qu’il allait me crever les yeux, j’ai donné le mensonge à propos du soldat. Je croyais qu’il allait partir après ça… J’ai été idiote. Il m’a empoignée par le cou et m’a étouffée jusqu’à ce que je perde connaissance. Je croyais que j’allais mourir. Mais je me suis réveillée dans une salle froide et humide dans un sous-sol, attachée à une chaise, devant un brasero. Il y avait quelqu’un aussi derrière moi. Ils voulaient savoir si j’avais menti ou pas, mais je me suis dit que si je disais la vérité, Mirari me ferait subir la même chose que j’allais subir, une deuxième fois et probablement en pire. Alors j’ai continué le mensonge. J’ai peut-être fais tuer un innocent en mentant ainsi.
Je pris une grande inspiration pour évacuer la culpabilité.
- Warning : torture:
— Il m’a fait la marque que je t’ai montré avec un tisonnier chauffé à blanc. J’étais persuadée que j’allais mourir. Je me suis dit que si je disais la vérité, Rengoku allait subir le même sort que moi, et peut-être aussi tous les gens présents lors de cette réunion qu’on a eue. J’ai pensé à toi. Je voulais pas qu’il vous arrive… ça. Alors j’ai rien dit de plus. J’ai juste demandé si ils allaient me tuer. Celui qui était derrière moi à posé ses mains sur mes yeux, pendant que celui qui était devant moi m’a attrapé la langue pour la sortir de ma bouche et la couper.
Ma main droite serra plus fort sa main tandis que j’agrippais son bras de ma main gauche. Je pire était à venir.
–Il… Il l’a ensuite cautérisée avec le tisonnier. J’ai dû ouvrir moi-même la bouche pour ne pas que ce soit pire. Ça n’a pas suffi, mes dents ont touché le tisonnier et ont éclaté sous la chaleur.
Je savais que je lui faisais du mal en lui racontant tout dans les moindre détails, mais il fallait que j’affronte ce qu’il s’était passé.
—Après il a déposé un scolopendre sur moi. Il m’a grignoté les lèvres pour me forcer à ouvrir la bouche, et il a pénétré à l’intérieur, jusqu’à atteindre mon estomac.
Je prenais des pauses plus fréquente pour reprendre mon souffle.
—Je pouvais le sentir me dévorer de l’intérieur. Je vomissais du sang. Ensuite, mon tortionnaire s’est de nouveau approché de moi et a retiré son masque, et j’ai découvert le visage de ma tante Bonibelle. Je suis sûre maintenant que ce n’était qu’une illusion. Tout après le premier coup de tisonnier n’était qu’une illusion, mais je ne peux pas oublier que c’est son visage que j’ai vu. Je ne peux pas dissocier son visage de ce que j’ai subi. Elle me torturait en souriant.
Ma voix était complètement cassée, et je pleurais. Mais je tenais bon.
—Ensuite elle a fait tombé une goutte de fer en fusion sur mon œil, que l’autre me forçait à ouvrir. Puis elle a enfoncé le tisonnier dans mon autre œil. Et pour finir elle m’a tranché la gorge.
Je pris le temps de me calmer, les yeux contre le pelage de celle qui m’avait aidée à affronter tout ça.
—Je me suis ensuite réveillée dans mon lit, dans ma roulotte. Ils ont essayé de me faire croire que c’était un cauchemar en faisant couler une bougie sur mon ventre, mais je sais que j’ai réellement souffert. Quand j’ai fini de pleurer et de me calmer, j’ai conduit ma roulotte jusqu’ici, et je ne suis plus sortie de ma chambre.
J’ouvris les yeux pour les poser sur les siens.
—Jusqu’à ce que tu viennes.
J’avais probablement les yeux injectés de sang, ruisselants de larmes, et la morve au nez. Je les baissai.
—Tu me demandes de risquer de subir tout ça une seconde fois, et peut-être même pire. Je ne sais pas si je pourrais vivre ainsi, en sachant qu’à tout moment je pourrais me faire torturer à nouveau. Je ne crois pas en avoir le courage.