J’aime venir ici, me perdre dans le sable encore tiède lorsque la nuit obscurcit le ciel d’un voile étoilé, contempler l’oscillation des vagues écumeuses miroitant sous la lune, mes pensées s’envolant dans la brise iodée. Personne ne vient jamais dans cette crique, peut-être à cause des rochers peu avenant ou des massifs épineux qui les envahissent d’année en année. Ou tout simplement parce que les habitants d’Ikusa ont d’autres chats à fouetter, que de courir les chemins de ronces et de récifs, une fois leur journée de travail achevée.
Pourtant, aujourd’hui, la sérénité et la solitude que je quête en ces lieux, me fuient inexorablement. Même le lent reflux de la marée, le jeu de l’eau irisée par la voute céleste ne calme ma nervosité, ne comble le vague à l’âme qui broie mes réflexions. Je marche de long en large sur la grève, incapable d’oublier ma soirée avec Agrus. Ah... L’espoir… n’est-ce pas une lame affutée à double tranchant, qui exaltent autant les cœurs qu’elle les fend.
Je sais qu’il est stupide de croire en un « nous » pourtant je ne parviens à m’ôter de l’esprit cette lueur qu’il a insufflé en moi, cette flamme fragile et intangible. Je me sens mise à nue, dépouillée de cette armure qui m’enserre le cœur depuis que mes sentiments pour lui ont mué, modifiant mon admiration et mon amitié, en une émotion plus intime et vorace, plus fiévreuse, plus féminine. Mais ce faisant, je m’expose, fragile sous le maelstrom que les espérances instillent insidieusement en moi. Du temps… pour me découvrir… mon rire las, entre tristesse nostalgique et flambée d’optimisme, perce le roulement des vagues sur la berge. Ce n’est pas comme si je me tenais à ses côtés depuis mon adolescence… être présente sans être réellement vue… être aimée comme l’une des siens, sans être jamais désirée. Je soupire. Je n’ai pas envie de revivre encore et encore cet instant sur le bastingage de La Murène, de sentir son odeur et sa chaleur imprégnées dans le manteau qu’il posa sur mes épaules, son souffle dans ma nuque et mes cheveux, sa voix grave un peu fumée dans un murmure, aux creux de mes oreilles.
Mue d’une impulsion irrépressible, j’ôte mes bottes, enfonce mes orteils dans les grains de sable. Ils sont doux, ils sont concrets, ils me ramènent au présent, m’extirpent de la brume fraiche de mes souvenirs et lamentations. Dans un sourire un peu rêveur, je me déleste de ma ceinture, de mon sabre, de ma mante, de mes chausses.. Je n’ai plus envie de ressasser des événements sur lesquels je n’ai plus aucune emprise, c’est inutile, stérile. J’avance vers l’océan. Le ressac lèche mes pieds, mes jambes alors que je m’enfonce dans l’onde jusqu’au genou. Mes yeux se closent, mon menton s’érige, offrant mon visage à la caresse de la lune.
J’inspire doucement. L’air salé s’engouffre dans la soie noire de mes cheveux, glisse sur ma peau, frais, revigorant, exaltant. J’écarte les bras d’un geste délié, paume vers les vagues, et m’abandonne à la magie. Le sortilège gorge mes veines d’une puissance rassurante, et mes doigts s’agitent, marionnettistes tirant sur les fils mon enchantement. Des tentacules liquides s’échappent de la surface de l’eau, serpentent jusqu’à former deux sphères au creux de mes mains.
J’expire. Et cet air qui jaillit d’entre mes lèvres devient un signal. J’évolue, avec une lenteur langoureuse, entamant des mouvements martiaux avec une félinité gracieuse, si bien qu’il ne reste de ces enchainements guerriers que la beauté brute d’une danse sauvage. Evanescente. Et les sphères d’eau, ondulent, soulignant la puissance latente de chaque torsion de mon corps, épousant les courbes aériennes de mes jambes, de mes mains. Elles me suivent, se mêlent, se séparent, se reforment pour se diviser encore. L’eau domptée devient ma partenaire. Nous ne sommes plus deux, mais une seule et même entité, jouant l’une avec l’autre une partition connue de nous seules. Et là, sous cette nuit étoilée, auréolée par la lumière argentée de la lune, les yeux clos, les lèvres ourlées d’un sourire, j’oublie l’étau asservissant mon cœur, j’oublie mes devoirs, mes espoirs, mes rêves impossibles et mes pensées toxiques.
Soudain, je me fige, mains suspendues vers le firmament. Et l’eau emprisonnée dans la sphère au-dessus de moi, s’échappe sous le reflux de ma magie, se déverse brutalement sur ma tête, mes épaules, ruisselant dans mes cheveux, inondant ma chemise blanche. Mon sourire se transforme alors en un rire qui tinte joyeusement dans le silence ténu de la nuit, indifférente à la clarté qui découpe dans l’étoffe ample et humide, l’esquisse de ma silhouette.
Pourtant, aujourd’hui, la sérénité et la solitude que je quête en ces lieux, me fuient inexorablement. Même le lent reflux de la marée, le jeu de l’eau irisée par la voute céleste ne calme ma nervosité, ne comble le vague à l’âme qui broie mes réflexions. Je marche de long en large sur la grève, incapable d’oublier ma soirée avec Agrus. Ah... L’espoir… n’est-ce pas une lame affutée à double tranchant, qui exaltent autant les cœurs qu’elle les fend.
Je sais qu’il est stupide de croire en un « nous » pourtant je ne parviens à m’ôter de l’esprit cette lueur qu’il a insufflé en moi, cette flamme fragile et intangible. Je me sens mise à nue, dépouillée de cette armure qui m’enserre le cœur depuis que mes sentiments pour lui ont mué, modifiant mon admiration et mon amitié, en une émotion plus intime et vorace, plus fiévreuse, plus féminine. Mais ce faisant, je m’expose, fragile sous le maelstrom que les espérances instillent insidieusement en moi. Du temps… pour me découvrir… mon rire las, entre tristesse nostalgique et flambée d’optimisme, perce le roulement des vagues sur la berge. Ce n’est pas comme si je me tenais à ses côtés depuis mon adolescence… être présente sans être réellement vue… être aimée comme l’une des siens, sans être jamais désirée. Je soupire. Je n’ai pas envie de revivre encore et encore cet instant sur le bastingage de La Murène, de sentir son odeur et sa chaleur imprégnées dans le manteau qu’il posa sur mes épaules, son souffle dans ma nuque et mes cheveux, sa voix grave un peu fumée dans un murmure, aux creux de mes oreilles.
Mue d’une impulsion irrépressible, j’ôte mes bottes, enfonce mes orteils dans les grains de sable. Ils sont doux, ils sont concrets, ils me ramènent au présent, m’extirpent de la brume fraiche de mes souvenirs et lamentations. Dans un sourire un peu rêveur, je me déleste de ma ceinture, de mon sabre, de ma mante, de mes chausses.. Je n’ai plus envie de ressasser des événements sur lesquels je n’ai plus aucune emprise, c’est inutile, stérile. J’avance vers l’océan. Le ressac lèche mes pieds, mes jambes alors que je m’enfonce dans l’onde jusqu’au genou. Mes yeux se closent, mon menton s’érige, offrant mon visage à la caresse de la lune.
J’inspire doucement. L’air salé s’engouffre dans la soie noire de mes cheveux, glisse sur ma peau, frais, revigorant, exaltant. J’écarte les bras d’un geste délié, paume vers les vagues, et m’abandonne à la magie. Le sortilège gorge mes veines d’une puissance rassurante, et mes doigts s’agitent, marionnettistes tirant sur les fils mon enchantement. Des tentacules liquides s’échappent de la surface de l’eau, serpentent jusqu’à former deux sphères au creux de mes mains.
J’expire. Et cet air qui jaillit d’entre mes lèvres devient un signal. J’évolue, avec une lenteur langoureuse, entamant des mouvements martiaux avec une félinité gracieuse, si bien qu’il ne reste de ces enchainements guerriers que la beauté brute d’une danse sauvage. Evanescente. Et les sphères d’eau, ondulent, soulignant la puissance latente de chaque torsion de mon corps, épousant les courbes aériennes de mes jambes, de mes mains. Elles me suivent, se mêlent, se séparent, se reforment pour se diviser encore. L’eau domptée devient ma partenaire. Nous ne sommes plus deux, mais une seule et même entité, jouant l’une avec l’autre une partition connue de nous seules. Et là, sous cette nuit étoilée, auréolée par la lumière argentée de la lune, les yeux clos, les lèvres ourlées d’un sourire, j’oublie l’étau asservissant mon cœur, j’oublie mes devoirs, mes espoirs, mes rêves impossibles et mes pensées toxiques.
Soudain, je me fige, mains suspendues vers le firmament. Et l’eau emprisonnée dans la sphère au-dessus de moi, s’échappe sous le reflux de ma magie, se déverse brutalement sur ma tête, mes épaules, ruisselant dans mes cheveux, inondant ma chemise blanche. Mon sourire se transforme alors en un rire qui tinte joyeusement dans le silence ténu de la nuit, indifférente à la clarté qui découpe dans l’étoffe ample et humide, l’esquisse de ma silhouette.