Automne, première année d'Afriel dans le Sekai
Liberty
Afriel jeta un regard à gauche et à droite. Il se trouvait dans le quartier rouge, en pleine nuit. C’était un quartier réputé pour faire des affaires un peu louches, se rencontrer pour discuter de crimes, mais surtout, c’était le quartier des bordels et des bars clandestins. Afriel ignorait s’il existait d’autres endroits ainsi dans la ville, car il ne venait certainement pas ici pour des raisons perfides. Non, il venait ici pour le Lotus Bleu.
Le Lotus Bleu n’était pas facile à trouver : aucune affiche ne l’annonçait d’ailleurs. Dans la troisième rue principale une fois rentrée dans le district, vous deviez vous arrêter à la sixième ruelle, à droite. On arrivait essentiellement devant une bouche d’égout — un vieil aqueduc inutilisé et désaffecté depuis presque aussi longtemps que la guerre des Titans.
C’est face à cette bouche d’égout que se tenait la fée tira sur l’épais socle qui fermait la bouche d’égout et se laissa tombé, comme si de rien était. Magiquement, le socle se referma. Là, on arrivait dans l’allée des brumes : une allée humide, froide et sombre sous Liberty où on pouvait trouver à la fois vendeurs drogues,et galeries d’art considérées comme hérétiques et, le Lotus Bleu.
Afriel enjamba un couple saoul étalé sur le sol s'embrassant à pleine bouche par terre et se dirigea vers une porte pleine de fioritures dorées. En forme d'arche, elle était barrée par deux lotus bleus liés ensembles qui servaient de poignées. Deux colosses lycanthropes de six pieds et une tonne de muscles accueillirent Afriel avec un sourire.
–Désolé Fyfou dit l’un d’eux, tu sais bien qu’on ne laisse personne entrer sans mot de passe, même les bons amis de monsieur.
Afriel roula les yeux en souriant.
–Il me désigne toujours comme ça après tant d’années ? Fort bien. Voici le mot de passe.
Il baissa la voix et s’approcha des deux gardes, jetant un regard derrière lui afin de s’assurer que personne n’entre.
–La quintessence du plaisir ne peut être donnée que par des personnes du même sexe, murmura-t-il.
Les deux lycanthropes hochèrent la tête et s’écartèrent.
–Bonne soirée !
Afriel les remercia et il poussa la porte. L’architecture était clairement avant-garde pour le style : les murs étaient peints d’un bleu pâle et des motifs Shieraks dorés constellaient le plafond. Des colonnes de marbres ici et là donnaient l’impression d’être à Shoumei, et un grand comptoir fait en lapis-lazuli scintillait. Derrière le bar, Callisto Maglaro, le maître des lieux et tenancier principal, servait quelques clients.
Sur les tabourets en velours rouges et sur le sol peint en blanc, des couples d’hommes s’embrassaient, se courtisaient et dansaient comme si c’était normal. Et pourtant, ce ne l’était pas. Les femmes également étaient admises, et bien entendu, tous ceux qui étaient entre les deux, hors-la-loi, mercenaires et autres. Le Lotus Bleu accueillait la marge du Sekai.
Afriel était fier de son ancien amant. Oui vous avez bien lu. La fée avait fréquenté Callisto quelques jours lorsqu’il venait juste d’avoir 500 ans, dans une auberge. Tout de suite le désir avait été instantané, mais sans plus. Ils avaient couché en toute amitié. Aujourd’hui, leurs nuits folles bien derrière eux, les deux étaient restés bons amis. Outre l’absence d’attirance amoureuse, toute histoire entre eux demeurait impossible. Afriel savait à quel point ce bar était plus qu’une simple entreprise pour Callisto : c’était un endroit où il était en sécurité et où toutes les personnes marginalisées étaient protégées. Ce n’était pas pour rien que deux colosses lycanthropes de 6 pieds gardaient l’entrée. Le regard d’Afriel retrouva les prunelles dorées de son vieil ami qui l’accueilla en levant les bras, les pans de sa veste de soie noire s’étirant pour dévoilé dénudé. Avec ses cheveux courts noirs, sa peau olivâtre, ses boucles d’oreilles dorées, son vernis à ongles noir et ses yeux soulignés au khôl, Afriel reconnut instinctivement les traits qui avaient fait naître une passion si intense des années plus tôt. Bien que maintenant, ce feu avait laissé place à une solide amitié sans compromis ni malentendus.
–Ah ! Fyfou ! Je n’ai pas vu depuis la dernière peste, foi de la lune ! Tu n’as pas changé. Quel bon vent t’amène ?
Afriel rendit son sourire et prit place au bar en soupirant longuement.
–Je m’ennuyais d’un vieil ami et je voulais lui donner des nouvelles. Je ne fais que travailler ces jours-ci.
Callisto se retourna pour remplir une grande chope de bière et sourit à son ami.
–Allez la bière est sur mon compte, raconte-moi tout.
Et ce qu’Afriel fit, lui racontant ses aventures des dernières jours, en prenant soin de laisser de côté tout ce qui avait rapport aux renseignements médicaux de ses clients. Afriel sentait déjà ses joues devenir plus rouges, même s’il était loin d’être ivre ou même pompette, le guérisseur avait une très faible tolérance à l’alcool. Mais dieu que cela lui faisait du bien d'avoir enfin un ami.
–Et là, le noble est parti comme ça, sans payer. J’ai essayé de le rattraper et pas un seul humain ou pas une seule créature n’est venu m’aider. Je ne suis pas un garde moi ! Je comprends mieux pourquoi certains humains ne se mêlent pas de la politique et de la corruption des grandes factions. À quoi bon faire la paix si on ne peut être juste et bon après ?
Afriel eut un long gémissement frustré lorsqu’il vit Callisto le regarder d’un regard amusé et désolé en même temps. Il ne voulait plus qu’on le prenne comme un simple idéaliste rêveur, même si au fond de lui, c’est ce qu’il était un peu.
–N’ai-je pas le droit de rêver à un monde où la justice est égale pour tous ? Sans esclaves, sans guerres, sans famines, sans haine, sans violence ? N’aimerais-tu pas pouvoir voir ce qu’est la vraie vie, celle que l’on ne vit pas en ce moment ? Doit-on vivre une vie toujours cachée sous terre juste parce que quelques vieux boucs de prêtre nous disent quoi faire et quoi penser ?
Callisto écarquilla ses yeux.
–Ciel Afriel. Je te sers un seul verre et te voilà déjà en train de monter une révolution.
La fée pouffa de rire, joyeux et pimpant, comme d’habitude lorsqu’elle était en bonne compagnie.
–Ciel, Callisto, tu sais bien que je n’oserais jamais bousculer l’ordre des choses. J’ai déjà l’impression qu’avoir des vêtements féminins me fait perdre des clients. Ou peut-être que je suis un mauvais guérisseur.
Callisto soupira. Sa voix était chaude, rauque et ratoureuse — comme un chat qui s’étire au soleil.
–Tu es le meilleur guérisseur de Sekai, je te l’ai toujours dit, espèce de biche. Tu ne me crois pas. Aveugle que tu es. Tu dois avoir plus confiance en toi, mais tu dois faire attention, Fyfou. Tu verras une fois au Reike.
Afriel cala sa dernière gorgée en protestant.
–N’empêche, tu le sais que j’ai raison. Un jour, ce serait pas mal si on pouvait reprendre un peu nos droits, tu ne penses pas ?
Le regard triste que lui donna Callisto confirma les impressions d’Afriel. Il lui rendit un sourire compatissant. Combien de lui étaient rêvaient de vivre libre ? C’était la raison pour laquelle Afriel était parti seul. Il avait besoin d’être libre, de vivre la vie qu’il avait toujours voulu vivre, même s’il venait de partir et que tout restait encore à écrire.
Callisto s’occupa d’autres clients, laissant ainsi Afriel seul avec ses pensées. Le fay détacha les deux brindilles qui retenaient ses cheveux qui descendirent jusqu’au milieu de son cou. Ici, Afriel ne pouvait pas se sentir plus libre. Son regard bleu balaya la foule qui buvait et discutait joyeusement. Peut-être y nouerait-il de belles amitiés ce soir ? Peut-être qu'un beau barde viendrait lui chanter de vieilles balades et qu'il aurait un peu de plaisir ?
La nuit était pleine de promesses et le guérisseur se sentait d’humeur légère, humeur amplifiée par l’alcool dans ses veines.
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HRP :
Liberty
Afriel jeta un regard à gauche et à droite. Il se trouvait dans le quartier rouge, en pleine nuit. C’était un quartier réputé pour faire des affaires un peu louches, se rencontrer pour discuter de crimes, mais surtout, c’était le quartier des bordels et des bars clandestins. Afriel ignorait s’il existait d’autres endroits ainsi dans la ville, car il ne venait certainement pas ici pour des raisons perfides. Non, il venait ici pour le Lotus Bleu.
Le Lotus Bleu n’était pas facile à trouver : aucune affiche ne l’annonçait d’ailleurs. Dans la troisième rue principale une fois rentrée dans le district, vous deviez vous arrêter à la sixième ruelle, à droite. On arrivait essentiellement devant une bouche d’égout — un vieil aqueduc inutilisé et désaffecté depuis presque aussi longtemps que la guerre des Titans.
C’est face à cette bouche d’égout que se tenait la fée tira sur l’épais socle qui fermait la bouche d’égout et se laissa tombé, comme si de rien était. Magiquement, le socle se referma. Là, on arrivait dans l’allée des brumes : une allée humide, froide et sombre sous Liberty où on pouvait trouver à la fois vendeurs drogues,et galeries d’art considérées comme hérétiques et, le Lotus Bleu.
Afriel enjamba un couple saoul étalé sur le sol s'embrassant à pleine bouche par terre et se dirigea vers une porte pleine de fioritures dorées. En forme d'arche, elle était barrée par deux lotus bleus liés ensembles qui servaient de poignées. Deux colosses lycanthropes de six pieds et une tonne de muscles accueillirent Afriel avec un sourire.
–Désolé Fyfou dit l’un d’eux, tu sais bien qu’on ne laisse personne entrer sans mot de passe, même les bons amis de monsieur.
Afriel roula les yeux en souriant.
–Il me désigne toujours comme ça après tant d’années ? Fort bien. Voici le mot de passe.
Il baissa la voix et s’approcha des deux gardes, jetant un regard derrière lui afin de s’assurer que personne n’entre.
–La quintessence du plaisir ne peut être donnée que par des personnes du même sexe, murmura-t-il.
Les deux lycanthropes hochèrent la tête et s’écartèrent.
–Bonne soirée !
Afriel les remercia et il poussa la porte. L’architecture était clairement avant-garde pour le style : les murs étaient peints d’un bleu pâle et des motifs Shieraks dorés constellaient le plafond. Des colonnes de marbres ici et là donnaient l’impression d’être à Shoumei, et un grand comptoir fait en lapis-lazuli scintillait. Derrière le bar, Callisto Maglaro, le maître des lieux et tenancier principal, servait quelques clients.
Sur les tabourets en velours rouges et sur le sol peint en blanc, des couples d’hommes s’embrassaient, se courtisaient et dansaient comme si c’était normal. Et pourtant, ce ne l’était pas. Les femmes également étaient admises, et bien entendu, tous ceux qui étaient entre les deux, hors-la-loi, mercenaires et autres. Le Lotus Bleu accueillait la marge du Sekai.
Afriel était fier de son ancien amant. Oui vous avez bien lu. La fée avait fréquenté Callisto quelques jours lorsqu’il venait juste d’avoir 500 ans, dans une auberge. Tout de suite le désir avait été instantané, mais sans plus. Ils avaient couché en toute amitié. Aujourd’hui, leurs nuits folles bien derrière eux, les deux étaient restés bons amis. Outre l’absence d’attirance amoureuse, toute histoire entre eux demeurait impossible. Afriel savait à quel point ce bar était plus qu’une simple entreprise pour Callisto : c’était un endroit où il était en sécurité et où toutes les personnes marginalisées étaient protégées. Ce n’était pas pour rien que deux colosses lycanthropes de 6 pieds gardaient l’entrée. Le regard d’Afriel retrouva les prunelles dorées de son vieil ami qui l’accueilla en levant les bras, les pans de sa veste de soie noire s’étirant pour dévoilé dénudé. Avec ses cheveux courts noirs, sa peau olivâtre, ses boucles d’oreilles dorées, son vernis à ongles noir et ses yeux soulignés au khôl, Afriel reconnut instinctivement les traits qui avaient fait naître une passion si intense des années plus tôt. Bien que maintenant, ce feu avait laissé place à une solide amitié sans compromis ni malentendus.
–Ah ! Fyfou ! Je n’ai pas vu depuis la dernière peste, foi de la lune ! Tu n’as pas changé. Quel bon vent t’amène ?
Afriel rendit son sourire et prit place au bar en soupirant longuement.
–Je m’ennuyais d’un vieil ami et je voulais lui donner des nouvelles. Je ne fais que travailler ces jours-ci.
Callisto se retourna pour remplir une grande chope de bière et sourit à son ami.
–Allez la bière est sur mon compte, raconte-moi tout.
Et ce qu’Afriel fit, lui racontant ses aventures des dernières jours, en prenant soin de laisser de côté tout ce qui avait rapport aux renseignements médicaux de ses clients. Afriel sentait déjà ses joues devenir plus rouges, même s’il était loin d’être ivre ou même pompette, le guérisseur avait une très faible tolérance à l’alcool. Mais dieu que cela lui faisait du bien d'avoir enfin un ami.
–Et là, le noble est parti comme ça, sans payer. J’ai essayé de le rattraper et pas un seul humain ou pas une seule créature n’est venu m’aider. Je ne suis pas un garde moi ! Je comprends mieux pourquoi certains humains ne se mêlent pas de la politique et de la corruption des grandes factions. À quoi bon faire la paix si on ne peut être juste et bon après ?
Afriel eut un long gémissement frustré lorsqu’il vit Callisto le regarder d’un regard amusé et désolé en même temps. Il ne voulait plus qu’on le prenne comme un simple idéaliste rêveur, même si au fond de lui, c’est ce qu’il était un peu.
–N’ai-je pas le droit de rêver à un monde où la justice est égale pour tous ? Sans esclaves, sans guerres, sans famines, sans haine, sans violence ? N’aimerais-tu pas pouvoir voir ce qu’est la vraie vie, celle que l’on ne vit pas en ce moment ? Doit-on vivre une vie toujours cachée sous terre juste parce que quelques vieux boucs de prêtre nous disent quoi faire et quoi penser ?
Callisto écarquilla ses yeux.
–Ciel Afriel. Je te sers un seul verre et te voilà déjà en train de monter une révolution.
La fée pouffa de rire, joyeux et pimpant, comme d’habitude lorsqu’elle était en bonne compagnie.
–Ciel, Callisto, tu sais bien que je n’oserais jamais bousculer l’ordre des choses. J’ai déjà l’impression qu’avoir des vêtements féminins me fait perdre des clients. Ou peut-être que je suis un mauvais guérisseur.
Callisto soupira. Sa voix était chaude, rauque et ratoureuse — comme un chat qui s’étire au soleil.
–Tu es le meilleur guérisseur de Sekai, je te l’ai toujours dit, espèce de biche. Tu ne me crois pas. Aveugle que tu es. Tu dois avoir plus confiance en toi, mais tu dois faire attention, Fyfou. Tu verras une fois au Reike.
Afriel cala sa dernière gorgée en protestant.
–N’empêche, tu le sais que j’ai raison. Un jour, ce serait pas mal si on pouvait reprendre un peu nos droits, tu ne penses pas ?
Le regard triste que lui donna Callisto confirma les impressions d’Afriel. Il lui rendit un sourire compatissant. Combien de lui étaient rêvaient de vivre libre ? C’était la raison pour laquelle Afriel était parti seul. Il avait besoin d’être libre, de vivre la vie qu’il avait toujours voulu vivre, même s’il venait de partir et que tout restait encore à écrire.
Callisto s’occupa d’autres clients, laissant ainsi Afriel seul avec ses pensées. Le fay détacha les deux brindilles qui retenaient ses cheveux qui descendirent jusqu’au milieu de son cou. Ici, Afriel ne pouvait pas se sentir plus libre. Son regard bleu balaya la foule qui buvait et discutait joyeusement. Peut-être y nouerait-il de belles amitiés ce soir ? Peut-être qu'un beau barde viendrait lui chanter de vieilles balades et qu'il aurait un peu de plaisir ?
La nuit était pleine de promesses et le guérisseur se sentait d’humeur légère, humeur amplifiée par l’alcool dans ses veines.
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HRP :
- Spoiler:
- J'espère que ça te va, petite référence à Oscar Wilde ici hé hé