« Tu fais honte à mon œuvre, gamin. Dehors ! »
« Le maître vous a ordonné de quitter son établissement. Ne faites pas répéter ses mots au maître. »
« Je partirais aussitôt que tu auras mis une épée dans mes mains. Je ne demande pas un chef d'œuvre, je veux juste une de tes lames foirées. »
« —aargh ! »
Un hurlement d'agonie s'élève dans le cœur d'une forge brûlante d'Ikusa. Quelques passants cillent des yeux à cette constatation, sans plus. Il fallait dire qu'une petite foule s'était déjà formée autour de la fenêtre qui dégageait l'air brûlant des fourneaux. Ils témoignaient tous avec un entrain particulier à l'échange enflammé que se livraient un bretteur pâle à la mine fiévreuse, ainsi qu'un maître nain qui affichait une expression désabusée.
- Forgeron:
« Je ne fais pas de lame foirée, l'enfoiré ! C'est toi qui es un épéiste foireux, saleté d'enflure ! »
« Le maître est en colère. Craignez la fureur du maître, humain. »
« Je vous mets au défi de trouver un épéiste meilleur que moi dans ce bled ! Si vous y parvenez, alors je m'engage à payer double prix ! »
L'épéiste titubait clairement sur place. Son teint qui était naturellement maladive était désormais teinté d'une rougeur inquiétante qui empirait à chaque seconde qu'il passait à proximité du feu de la forge. Mais c'était loin d'être suffisant pour lui faire tourner les talons. Tout l'inverse, même. Sa main tremblante se tendit vers l'avant, faisant apparaître une épée brisée et émoussée entre ses doigts.
Un regard déterminé conquit son expression, alimentant son corps de sorte à lui permettre de taillader l'air, libérant une onde de choc qui coupa proprement un seau de bois qui était posé à quelques mètres de sa position. La foule s'enjailla devant la fenêtre, bien que le duo continuait à les ignorer.
« Donne-moi n'importe quel rocher et je te le briserais en deux en utilisant cette épée cassée—atchoum. »
« Fallait pas la casser depuis le début, l'morveuuux ! Et qu'est-ce qui te prend de t'attaquer à mon matériel, imbécile ?! »
« Le maître demandera à l'apprenti de réparer les dégâts. L'apprenti désapprouve vos actions. »
Une voix aiguë de gobelin s'élevait régulièrement dans le dos du maître nain. On pouvait facilement deviner qu'il s'agissait là d'un employée œuvrant sous la tutelle du forgeron. Les deux individus faisaient à peine un mètre de hauteur, bien que le nain avait une tête de plus que la peau verte. La présence de ce dernier continuait à être ignorée par les deux braillards, malgré le fait qu'il se poussait à supporter son maître à travers chaque prise de parole.
- Gobelin:
« Mais donne-moi une épée, bon sang de bonsoir. »
La voix du blanc commençait à devenir fébrile et désespérée. Sa main libre se levait pour couvrir la flaque de sang qui se formait à travers sa tunique blanche pendant que sa main dominante s'agrippait fermement à la manche de la moitié d'épée qui était en sa possession.
- Carte de la forge: