Après son retour d’un long voyage à destination de La République, rien de tel que de venir sur le port d’Ikusa pour se ressourcer un peu! Enfin, Lucifer ne tient pas spécialement à aller sur le port principal, beaucoup trop bruyant à son goût et bien trop de monde pour y marcher tranquillement, donc il se dirige vers un petit marché sympathique très proche du port. Ce n’est pas dans ses habitudes de faire un tour dans ce genre d’endroits, mais une fois n’est pas coutume, il se décide à aller voir ce qu’il peut y avoir d’intéressant là-bas. Marcher et respirer l’air maritime après toutes ses péripéties de ces dernières semaines, voilà ce dont il a besoin pour se ressourcer!

Le marché est bien vivant, les gens semblent tous passer un bon moment, la joie et la bonne humeur semblent communicatives ici, un léger sourire se dessine même sur les lèvres du beau brun. Ce dernier n’hésite pas à s’arrêter à divers stands et échoppes pour voir ce qui se propose, même s’il ferait presque tâche dans le décor avec ses habits nobles, comparés à tous les gens simples qui peuvent se trouver à ses côtés. C’était un peu malaisant pour lui au début, mais vu qu’il est bien élevé et bon parleur, on finit par vite oublier son apparence de noble trop sérieux pour le voir un peu plus comme une personne intéressante avec beaucoup de conversations.

Continuant son chemin à travers le marché, une annonce est faite par un crieur public: ce soir sera organisée une petite fête sur cette même place où se déroule le marché, une bonne nouvelle qui surprend la plupart des gens aux alentours, positivement. Tout en écoutant et regardant l’annonce et les détails qui sont criés, Lucifer se rend compte tardivement qu’il est sur le chemin de quelqu’un d’autre et bouscule malencontreusement cette personne. Enfin, c’est plutôt lui qui est bousculé pour le coup, avec son pas léger et son poids plume comparé à la personne qui le dépasse d’une bonne tête, c’est vraiment lui qui était sur son chemin et pas l’inverse. Après avoir repris son équilibre, il baisse un peu son torse en posant une main dessus, baissant la tête avec le même angle, pour présenter ses excuses:

“Veuillez m’excuser pour le désagrément, j’ai porté trop d’attention à l’annonce sans regarder là où je me dirigeais. J’espère que je ne vous ai causé aucun tort?”

En relevant la tête pour regarder la personne dans les yeux, Lucifer comprend un peu mieux pourquoi c’est lui le bousculé et non l’inverse: cette jolie elfe n’avait aucune chance de se faire embêter par un moucheron comme lui, mais cela ne l’empêche pas de s’inquiéter sincèrement de l’éventuel mal ou tort qu’il a pu lui causer!

Une fois n'est pas coutume, le marché avait enfin lieu. Normalement Aléïs envoyait son apprentie faire les courses à sa place. Malheureusement elle n'avait presque plus de composants nécessaire à la compositions de ses encres spéciales.

Habillée simplement, les bras découverts, laissant à la vue de tous ses nombreux tatouages, mystiques pour les ignorants ou les jeunes. Elle s'empressait d'aller régler ses emplettes.
L'elfe en profiterait aussi pour repérer un peu les lieux. Quelques jours plus tôt, en prévision d'une fête organisée par un bourgeois du quartier noble, elle avait été mandatée pour en assurer en partie, la sécurité. Ce genre de travail lui convenait bien, les civils et la garde préféraient utiliser ce qu'on pouvait appeler des réservistes plutôt que de diminuer les effectifs de la garnison sur les murs, ainsi que les patrouilles.

Aléïs venait d'acheter ce qu'il lui fallait auprès de son revendeur préféré, les frais étaient plus élevés que la dernière fois. Visiblement, un de leur chargement avait été perdu en mer lors d'une tempête, en conséquence les prix ont gonflés. Connaissant bien ce marchand depuis de longues années, elle savait pertinemment qu'il ne cherchait pas à l'embobiner. Ce serait une malencontreuse affaire pour lui.

Quoi qu'il en soit, il était temps de rentrer. Sur le chemin l'ancienne guerrière filait droit, regardant le sol pour éviter d'être éblouie par le soleil frappant fort peu après midi. D'ailleurs son ventre gargouillais, ayant sauté le repas. Ces pensées futiles furent absorbées par le choc que provoqua une collision accidentelle suivie d'un bruit de verre brisé. Elle attrapa au vol l'individu pour éviter de le faire tomber.

- Veuillez-excuser, je ne vous ai pas vu. dit-elle en même temps que son interlocuteur avant de le laisser terminer.

Elle le toisa du regard, quelques secondes sans rien dire. C'était un homme, enfin un Humain visiblement. Jeune, un bébé à ses yeux ! Malgré tout cela ne semblait pas être n'importe qui, Aléïs savait reconnaître de nobles étoffes et cet homme en était paré, sans être extravagant.
Enfin, une longue coulisse le long de sa jambe attira son attention... l'elfe baissa les yeux pour réaliser que le bruit de verre brisé entendu un peu plus tôt n'était rien d'autre que les composant qu'elle venait de s'acheter.
La colère passa en un instant sur son visage, au prix d'un effort mental elle se calma et tenta de garder sa constance devant l'étranger.

- "Il semblerait que dans l'altercation, mes produits se soient perdus.." dit-elle d'un ton léger, le regard insistant bien sur le fait que ce n'était pas de sa faute.

Elle décrocha une bourse de sa ceinture et en  vida le contenu dans la paume de sa main. Seul deux pièces glissèrent hors du pochon.

"-Je n'ai pas assez pour me payer une nouvelle fois ces produits, et ils sont cruciaux monsieur."

Elle ne s'était toujours pas présentée, mais cela valait-il le coup ? Elle posa une main ferme sur l'épaule de l'homme et le regarda dans les yeux.

"- Vous m'accompagnez chez le marchand ?" Sans aucunes méchanceté ou agressivité dans la voix. Au lieu de ça, elle affichait juste un sourire obligeant.

Oups… Apparemment, la charmante elfe semble bien moins charmante lorsque son visage laisse entrevoir sa réaction après qu’elle remarque que le bruit qu’ils ont entendus quelques instants avant, ce bruit de verre cassé, correspond à ce qu’elle vient probablement d’acheter sur ce marché… Détail qu’elle lui confirme quelques instants après qu’il l’ait remarqué, confirmant aussi que ça risque de sentir le roussi vu qu’elle n’a plus l’air si amical à ses yeux maintenant qu’ils ont tous les deux compris qu’il est fautif pour la casse.

S’enfuir? Ce n’est absolument pas le genre de Lucifer, aucune chance qu’il tente de fuir ses responsabilités: il a cassé les matières premières dont a besoin cette elfe? Eh bien qu’à cela ne tienne, il va lui rembourser si elle lui indique le prix… A moins que la suivre jusqu’au marchand soit une bien meilleure, comme son sourire obligeant le suggérait vivement.

“Evidemment, je vais vous suivre. Je suis vraiment désolé d’avoir cassé vos produits, mais je vous promets que je vais régler ça!”

Parole de Blake. Enfin, c’est en espérant que le marchand aura bel et bien le stock nécessaire pour lui fournir tout ce dont elle a besoin. Lucifer marche aux côtés de l’elfe qui la dépasse en taille, prenant le soin de ne pas la fixer avec insistance ni de lui parler, elle n’a peut-être pas envie de l’entendre se confondre en excuses ou raconter sa vie, alors il reste parfaitement silencieux jusqu’au moment d’arriver devant le marchand. Il prend directement la parole pour expliquer la situation, vu que l’homme ne semble pas avoir d’autres clients pour le moment.

“Bonjour. Désolé de vous importuner, brave marchand, mais j’ai accidentellement cassé tous les produits que vous achetez cette dame ici présent. Pouvez-vous me dire le montant de toute la marchandise qu’elle venait de vous acheter il y a quelques minutes, s’il vous plaît?"

Le marchand semble un peu surpris que le noble reikois ne lui demande pas “ce qu’elle a acheté” mais directement “le montant de ce qu’elle a acheté”. Ce n’est pas que Lucifer ne s’intéresse qu’à l’argent, c’est juste qu’il serait très déplacé de sa part de demander un inventaire précis de ce qu’elle a acheté alors que ça ne le regarde en rien. Au moment d’entendre le montant être annoncé, les yeux de l’ambassadeur se fixent sur l’elfe victime de la bousculade, pour savoir si le prix lui semble être le bon. Ca parait futile mais rien ne garantit que ce n’est pas une arnaque montée de toutes pièces, tous les moyens sont bons pour essayer de gagner un peu d’argent au Reike vu les taxes imposées. Tout semble parfaitement normal, pareil lorsqu’il regarde le marchand, curieux de comprendre ce que fait Lucifer. Ce dernier lève la main en fermant son poing droit à l’exception de son index et de son majeur, comme pour signifier le chiffre “deux”.

“Très bien, selon les stocks qu’il vous reste, mettez deux fois plus d’objets que ce qu’elle vous a acheté un peu plus tôt. Je tiens à m’excuser pour ma maladresse et la perte involontaire de vos matières premières qui me semblent assez rares. Cela vous convient-il à tous les deux?”

Il est l’un des rares survivants de la famille noble Blake, disons que même si le montant que lui avait annoncé le marchand semble énorme pour certains, pour lui, ça représente bien moins. L’argent c’est l’argent, mais la valeur des choses selon les personnes, ça se respecte, alors il tient à faire amende honorable au marchand qui voit sa marchandise détruite et à cette elfe, qu’il espère devenir un peu moins froide, qui a vu ses produits être réduits à néant par une bête bousculade dont il est responsable.

Aléïs suivit du regard la discussion, haussant un sourcil en regardant l'humain se débattre avec le marchand qui lui souriait. Quand ce dernier l'interrogea du regard, elle montre rapidement son pantalon tâché. Le vendeur sourit, levant les yeux au ciel pendant que le noble comptait ses pièces.

Enfin, il put voir ce qu'elle achetait, quelques plantes venant de l'Ouest, destinée à la coloration des encres, quelques pigments travaillés à partir d'animaux marins et... et c'est tout, il manquait un dernier ingrédient qu'il n'avait plus en stock. Aléïs n'en fit pas la remarque, le noble achetant deux fois plus de produit que ce qu'elle avait prise au départ. Concernant les ingrédients spéciaux... elle irait voir la sirène un peu plus tard, ça augmenterait juste un peu le délais des prochains tatouages mais rien de bien dramatique. L'Elfe prévoyait toujours ses stock et elle tiendrait jusqu'ici.

Une fois la transaction terminée, elle remercia chaleureusement le marchand avant de s'écarter un peu de son étal avec l'humain qu'elle dévisageait toujours.

"J'ai l'intime conviction que vous parlez beaucoup pour ne rien dire en vous observant." dit-elle en plongeant son regard dans le sien avant de se détendre, laissant un léger rictus se dessiner au coin de ses lèvres.
- Ma foi je dois reconnaître que vous vous êtes acquittée et je vous en remercie. Je m'appelle Aléïs, j'habite au dessus du salon de tatouage que je tiens plus haut, dans la ville. Ces produits sont essentiels à la confection d'encres spéciales."

Elle termina, toussant dans son coude après le passage d'une petite bourrasque de vent soulevant de la poussière et du sable dans l'air, une habitude. Bien qu'elle ait assez d'argent pour s'habiller convenablement, cela n'empêchait pas l'Elfe de noter la différence de classe entre eux deux.

- Puis-je savoir qui tu es ? Tu dénotes avec la population locale, et je sais d'expérience comment s'habillent les bonnes gens. tutoie la tatoueuse.

Pendant qu'elle parlait, elle s'était dirigée quelques mètres plus loin sous la devanture d'une boutique, pour être à l'abri du soleil et de la poussière, évitant par la même occasion la foule, et la possibilité de casser une nouvelle fois ses affaires.

Après avoir conclu l’achat des matériaux nécessaires à l’elfe qui se trouve près de lui, Lucifer semble déjà un peu plus serein quant à l’idée de lui avoir ruiné sa journée. Peut-être n’a-t-elle pas récupéré tout ce qu’elle avait acheté précédemment, mais au moins, elle en a en quantité suffisante pour un moment. Pourtant, après s’être tous les deux éloignés un peu de l’étal du marchand, la première phrase que prononce la dame aux longues oreilles est encore une fois cinglante pour le pauvre ambassadeur qui se retient fortement de rouler des yeux. Décidément, aucun de ses efforts pour se faire pardonner ne semble l’atteindre…

Ah? Lucifer a peut-être réfléchi un peu trop vite, le visage de l’elfe se détend un petit peu par la suite alors qu’elle enchaîne avec des paroles plus agréables. Elle s’appelle Aléïs et c’est une tatoueuse, peut-être même une tatoueuse officiel du Reike, ce qui explique pourquoi elle ne peut vraiment pas plaisanter avec les produits dont elle a besoin. Tout prend sens à présent: l’importante présence de tatouages sur ses bras, le fait d’avoir besoin qu’il rachète les produits, etc… Sans cette encre spéciale, impossible de travailler et ça serait un problème bien plus grave qu’il n’y paraît.

Ne souhaitant pas lui répondre alors qu’elle est en train de tousser, Lucifer suit Aléïs sans dire un mot et l’écoute le questionner, passant d’ailleurs du vouvoiement au tutoiement sans crier gare, alors qu’ils se dirigent tous deux vers la devanture d’une échoppe pour s’abriter du vent.

“Je me nomme Lucifer Blake, je suis ambassadeur du Reike, si cela peut permettre de répondre à vos questions. Enchanté de vous rencontrer Aléïs, malgré que la première impression que vous ayez pu avoir de moi est loin d’être bonne, j’imagine.”

Effectivement, ça serait vraiment dur de sa part d’émettre un quelconque jugement au fait qu’elle se soit montrée un peu dure avec lui après qu’il ait cassé, même involontairement, ses matériaux pour travailler. A présent que le malentendu est passé, peut-être peuvent-ils partir sur de nouvelles bases? C’est sûrement déjà le cas, mais tant qu’à faire, autant que Lucifer lui explique pourquoi il l’a bousculé, ou du moins la raison qui a causé cet incident.

“Pour être parfaitement honnête avec vous, lorsque je vous ai malencontreusement bousculé, j’écoutais les annonces faites concernant la fête organisée ce soir. Mon esprit était accaparé par le fait d’imaginer à quoi pouvait bien ressembler cette fête, et j’en ai oublié de regarder devant moi, voilà pourquoi je vous ai accidentellement privé de vos produits. J’espère que vous comprenez qu’il n’y avait vraiment rien de volontaire dans ma démarche.”

Tant de paroles pour ça, il risque encore d’entendre une remarque sur le fait qu’il parle beaucoup trop pour ne rien dire finalement. Un sourire un peu gêné se dessine sur le visage de l’ambassadeur, preuve qu’il s’ouvre un peu plus à cette jolie elfe qui lui fait face, signifiant qu’il met l’incident derrière lui.

Lucifer Blake ? Aléïs connaissait quelques nobles, mais ce n'était pas le cas de ce dernier, tant pis. Une nouvelle rencontre ne pouvait pas faire de mal, enfin il était encore trop tôt pour le savoir...
Tandis qu'il parlait, beaucoup... pour dire peu de choses, l'Elfe s'adossa bras croisés contre le mur après avoir rangée correctement ses produits dans une besace cette fois.

Et bien ? Concrètement il venait de lui dire qu'il avait juste la tête ailleurs lorsqu'il l'avait bousculée. Ce n'était pas bien grave, mais tout ça pour ça. Elle sourit avant de répondre.

" - Ne m'en veux pas, mais tu me donnes raisons, tu parles beaucoup pour dire des choses simple ! C'est sûrement une déformation professionnelle pour un ambassadeur." dit-elle en se redressant.

L'elfe, plus haute donna un petit coup sur l'épaule de l'ambassadeur pour étayer son propos. Elle ne manquait pas de manière en temps normal mais là... avec le temps, les titres, les rangs de noblesses, les hauts postes... ça ne lui disait plus grand chose, ce n'était qu'un humain, elle boirait encore de la bière dans cent ans quand lui serait déjà rongé par les vers après tout...

" - Et bien, viens à la fête ce soir, je ne suis pas sûr qu'il y ait beaucoup de personne de ton rang, mais l'organisateur est un noble de la ville haute alors qui sait ? C'est moi qui m'occupe de la sécurité ce soir, mais je devrais avoir un peu de temps si tu n'as personne à qui parler, bien que tu me sembles plutôt capable.."

Elle le dévisagea un instant après avoir laissé malgré elle un petit blanc gênant.

"- Je dois retourner à mon salon, au moins pour ranger certaines choses au frais. Tu as fauté, mais tu as plus que remboursé ton erreur, alors je te dois bien quelque chose. Passe boire un coup à la maison ou si tu as besoin d'autre chose, demande moi." lança elle solennellement.

Aléïs paraissait brute de décoffrage, mais elle était droite dans ses bottes, pas sournoise pour un sous. Qu'elle apprécie ou pas sa nouvelle rencontre, il avait été honnête, et plus que serviable, ce qui la mettait à son tour dans une position de redevance. C'était sa vision des choses après tout.

Elle attendait sa réponse, soit elle partirait seule, soit avec lui, sinon peut être se verrait-il dans la soirée ?

Diantre, cette femme elfe ne supporte donc pas qu’on lui dise plus de quelques mots pour exprimer une idée! Probablement le genre à s’endormir lors d’annonces officielles concernant le royaume. Peut-on réellement lui en vouloir de préférer les gens qui disent directement ce qu’ils veulent ou ce qu’ils font? Non, mais qu’elle respecte un minimum la mise en forme des choses, c’est le moins que Lucifer espère par la suite pour elle. Il est probablement vrai que ce dernier en dit parfois trop par conscience professionnelle, mais on n’enlève pas son statut de diplomate comme un boulanger retire son tablier lorsqu’il a fini de travailler, malheureusement.

Suite à sa phrase encore très “flatteuse”, Aléïs n’hésite pas à donner un petit coup d’épaule à Lucifer, pour le taquiner ou peut-être que c’est dans ses habitudes quand elle commence à bien s’entendre avec quelqu’un. Lui, il esquisse un sourire un peu gêné mais ce n’est pas bien grave, tout le monde n’a pas les mêmes relations avec la noblesse et les statuts sociales, même lui a bien du mal à se comporter comme quelqu’un de “supérieur” aux autres, vu qu’il ne se considère pas comme tel.

Après une invitation à venir à la soirée et un silence assez gênant, laissant l’ambassadeur quelque peu de marbre, voilà que l’elfe sans gêne lui propose de venir boire un coup chez elle ou lui propose de lui rendre service en cas de besoin. C’est vrai que Lucifer a plus que remboursé sa dette, mais c’était bien le moins qu’il pouvait faire pour le temps et les matériaux perdus, même si lors de certaines réflexions, sa main a eu envie de se transformer en pince pour la rembourser avec moins d’intérêts.

“Si cela ne vous gêne pas de m’offrir un verre et de me parler un peu plus de votre métier, je vous suis.”

Des phrases simples, tant bien que mal, le beau brun va essayer de se limiter à ça afin de ne pas lancer un sort de sommeil profond sur sa… nouvelle amie? Non, ce n’est pas comme ça qu’il devrait la définir, plutôt comme une nouvelle connaissance. Sans ajouter un mot de plus, Lucifer se met en route en suivant la femme d’une tête de plus que lui, prenant garde à passer par des endroits du marché un peu moins fréquenté pour éviter de se faire bousculer ou de bousculer une fois de plus. Il ne va pas dépenser toute sa fortune à rembourser tous les visiteurs du marché non plus.

Une fois dans un endroit un peu plus calme, l’humain marche à côté de celle qui lui a gentiment proposé de prendre un verre. Sa curiosité n’est jamais bien loin, alors il va reprendre la parole pour demander quelque chose, en espérant ne pas toucher une corde sensible.

“Veuillez pardonner ma curiosité, mais vos tatouages sur vos bras, ont-ils une signification? Je demande car je sais que pour certaines personnes, c’est le cas.”

Difficile de ne pas parler plus que ça pour détailler sa curiosité, mais il aura l’occasion de s’expliquer si jamais l’elfe se transforme à nouveau en dragon de givre.

Et bien c'était noté, elle l'amènerait au salon. L'Elfe ne savait pas encore si elle regrettait sa proposition ou non, mais il étant temps d'assumer ses choix. Elle acquiesça et donc et lui emboita le pas afin de le guider jusque chez elle. Rapidement il posa une nouvelle question, après tout.. quelle idiote, elle devait forcément s'y attendre, on n'invite pas quelqu'un pour juste le regarder dans les yeux sans rien dire.

Quoi qu'il en soit, sa question ne la dérangeait pas, elle était fière de ses tatouages, de ce qu'ils représentaient. Sa peau lui servait autant de journal de bord d'une vie bien remplie, que de toile vierge pour artiste fou. Elle avait reçue son premier tatouage bien avant d'en faire son métier, c'était comme une sorte de lien inaltérable entre elle et ses premiers frères d'armes, tous disparu aujourd'hui depuis plusieurs siècles.

Elle afficha une mine intéressée suite à sa question.

"- Oh oui ils en ont, pas tous, mais l'écrasante majorité." dit-elle en lui en montrant un en particulier. Un cercle stylisé arborant plusieurs lames sur son poignet, chaque lames arborant un style différent.

"- Celui ci par exemple, je l'ai fait il y a peut être six cent ans. On avaient tous le même avec mes anciens compagnons d'armes. Aujourd'hui ils sont tous décédés, sauf un. Un autre elfe mais je n'ai jamais retrouvé sa trace et il ne m'a jamais recontactée." Elle s'arrêta une seconde en pensant à ce qu'elle venait de dire...

Ils étaient presque arrivé le temps de discuter, elle finit par conclure sur la question de Lucifer.

"- Globalement ce sont des étapes de ma vie pour conclure. On oublis pas d'où l'on vient comme ça. Et dans certains cas, certaines âmes continues de vivre sur notre peau." dit elle en montrant pas mal de tatouages rappelant des motifs lunaires et stellaire." Je pratique le Shierak" dit-elle sourire aux lèvres.

Le duo finit par arriver devant le salon d'Aléïs, elle poussa la lourde porte en bois massif et tira rapidement quelques rideaux afin de laisser la lumière passer avant d'inviter Lucifer à entrer. Le salon était plutôt cosy et très petit. Il servait juste pour accueillir les clients. Rapidement elle l'invita à monter à l'étage ou se trouvait réellement son lieu de vie. Elle laissa au passage ses affaire sur un porte manteau et appela rapidement quelqu'un du nom de "Ged".
Un petit enfant, humain les retrouva en descendant en trombe les marches.

"- Salue notre invité Ged, et tiens, prends ces produits et range les comme il faut. Quand tu as terminé, tu pourras rentrer chez toi plus tôt aujourd'hui." sourit-elle au garçon en lui ébouriffant les cheveux. Le gamin salua timidement l'ambassadeur et parti rapidement s'éxecuter.

Le sceau royal sur la porte menant à son atelier, laissait facilement deviner au choix, qu'elle était totalement patriotique, ou assermenté par la couronne a exercer le métier de Tatoueuse officielle.
Quoi qu'il en soit elle invita Lucifer à la suivre à l'étage.
L'escalier débouchait directement sur un jolie salon, plus grand, un vrai espace de vie cette fois avec divan, table, quelques tableaux et l'artefact le plus précieux pour Aléïs, son armure trônant sur un mannequin, son marteau de guerre exposé juste devant.

Elle insista pour que l'homme s’assoit avant de se diriger vers la cuisine proche des fenêtres.

"- Je vous fais chauffer de l'eau pour un bon thé chaud ? Ou vous préférez une bouteille de vin ? "

Aléïs elle, commençait à se faire chauffer de l'eau, désireuse d'un peu de thé.
Bien qu'elle était grande et bien entretenue, sans sa tenue extérieur pour affronter les tempête et le soleil, elle semblait moins imposante, plus fine, moins bourrue.
Le temps que l'eau chauffe, elle attrapa une brosse posée sur le rebord de sa bibliothèque avant de s'asseoir en face de son invité et commença à se brosser les cheveux pour les démêler du vent et faire tomber les nombreux grains de sables s'y trouvant.

Lucifer écoute précieusement ce que lui dit Aléïs, elle qui semble bien plus s’ouvrir à lui à présent en parlant de choses qui lui sont personnelles. Elle n’entre pas forcément dans les détails, ils viennent tout juste de se rencontrer après tout, mais pour le coup, le bel ambassadeur prend le plus grand soin de retenir la symbolique des tatouages dont elle lui parle. D’ailleurs, il n’aurait jamais imaginé qu’elle avait un tel âge, mais avec les elfes, mieux vaut ne pas se faire trop d’illusions: ils pourraient avoir l’air bien plus jeune que nous qu’ils auraient quand même vécu vingt fois plus!

Avant même de s’en rendre compte, voilà que le duo semble arriver devant le salon de tatouage d’Aléïs, Lucifer reste muet devant l’édifice, profitant des quelques secondes qui s'offrent à lui pour bien regarder le bâtiment de l’extérieur. Même s’il n’a pas été très concentré sur le trajet à faire pour venir, il saura à présent reconnaître aisément le bâtiment parmi tous ceux de la capitale pour y revenir, si besoin est. Après avoir attendu quelques instants que la grande elfe l’autorise à rentrer, l’humain aux pupilles rouges et ne pose les yeux sur le salon qu’un court instant avant d’être invité à suivre Aléïs qui se dirige vers les escaliers.

Voyant le joyeux enfant se diriger vers eux après qu’elle ait prononcé le nom “Ged”, Lucifer fait une jolie révérence à l’enfant qui l’a salué en premier, esquissant un sourire amical avant de le laisser filer au rangement commandé par Aléïs. L’humain est plutôt sympathique avec les enfants, surtout lorsqu’ils sont bien élevés comme Ged. Ne décrochant pas un mot depuis plusieurs minutes, Lucifer se contente de suivre l’elfe à l’étage, prenant soin de regarder un peu autour de lui sans être trop indiscret non plus.

Le salon à l’étage semble bien plus vaste, un véritable espace de vie où la jolie elfe doit pouvoir se détendre un peu plus aisément. Une armure d’une qualité incroyable trône sur un mannequin, attirant un long moment le regard de Lucifer qui en est admiratif, tout comme pour le marteau qui se trouve juste à côté. Ce sont l’invitation à s’asseoir et les paroles d’Aléïs qui vont le sortir de son admiration.

“Je vous serais très reconnaissante de me servir une tasse de thé, merci. J’aurais volontiers partager un verre de vin avec vous, mais je ne voudrais pas que cela vous gêne pour votre longue journée à venir. Peut-être que ce soir sera un moment plus adéquat?”

Le sourire de l’ambassadeur prouve qu’il est sincère dans sa proposition: s’il passe du temps à la fête qu’elle surveille ce soir-même, il y a fort à parier qu’il l’a croisera à nouveau et pourra donc partager un verre si elle le souhaite toujours. Lucifer la regarde se brosser les cheveux soigneusement, et il doit dire qu’avec la crinière qu’il possède lui aussi, ce n’est pas toujours une mince affaire que de les dompter! En tout cas, son regard se dirige à nouveau vers l’armure et le marteau, sa curiosité est un vilain défaut, mais il ne peut s’empêcher de poser une question les concernant.

“J’imagine que cette armure et cet imposant marteau sont à vous. Pourriez-vous m’en dire un peu plus à leur propos? Si cela n’est pas trop indiscret, évidemment.”

Aléïs se releva, récupérant l'eau chaude et préparant deux tasses dont une qu'elle donna à Lucifer avant de se rasseoir en face de lui.
La question de l'ambassadeur raisonna tristement dans l'esprit de l'Elfe mais elle ne laissa rien paraître.

"- Il est vrai, je ne compte pas laisser les autres s'amuser toute la soirée sans participer un peu moi même !" Dit-elle en buvant une bonne gorgée à s'en brûler la gorge, toussant un instant de son erreur.

Elle regarda son armure comme pour souligner la question de l'humain.

"- Non ce n'est pas indiscret, après tout ce ne sont que des outils. Mais je dois avouer que comme mes tatouages ils me sont précieux. Le marteau était le cadeau de mariage de mon défunt époux. Je ne m'en séparerai jamais. L'armure , il l'a retapée mais elle commence à faire son âge, je l'ai reçue pendant la deuxième campagne de maintiens de l'ordre il y a quelques temps..." expliqua la tatoueuse.

Cette campagne particulière commençait à dater dans les livres d'histoire. Le Reike  avait connu fut un temps une énorme recrudescence de marché noir et de banditisme important. Les bandits usant habilement du désert et ses vastes territoires pour se dissimuler. Le Royaume avait dépêché une partie de ses forces pendant quelques années à la chasse de ses hommes. Elle ne fût pas spécialement meurtrière mais longue.

Elle regarda l'homme, que pouvait-elle bien lui dire ? Aléïs n'était pas la plus bavarde quand il s'agissait de discuter avec des étrangers. En général elle utilisait l'alcool pour s'en sortir un peu mieux, là elle était socialement démunie, du thé, quelle idée saugrenue que d'avoir proposé ça. Avait-elle voulu bien faire devant un "ambassadeur" pensa t- elle en se maudissant ?

Réduisant ses pensées au strict minimum, elle se rabattit sur son métier et pensa au tatouage Reikois de Lucifer.
Celui d'Aléïs était clairement visible sur son épaule, fièrement apparent, mais elle ne distinguait pas celui de son hôte.

"- Où se trouve votre tatouage par curiosité ? Un ambassadeur de notre beau royaume devrait afficher son appartenance non ? Je n'ai pas vu votre nom dans mes registres, mais si vous devez bientôt effectuer un rappel, je pourrais m'en charger selon votre souhait. "

Décidément elle ne le connaissait pas du tout cet homme, pourtant l'Elfe était habituée des nobles, faisant plusieurs fois par ans des allez-retour au palais pour en tatouer certains dont la reine. La plupart du temps ces gens préféraient qu'elle se déplace, plutôt que de venir dans son humble salon.

Peut être venait-il de prendre ses fonction ? Ou qu'il rentrait rarement au Reike mmmh..

"- Ambassadeur, quel est votre exprertise ? Vous recevez les autres ambassades où vous êtes vous même affectés à Shoumei ou ailleurs peut être ? Je ne vous ai jamais croisé."

Conclus t'elle en même temps que sa tasse de thé.

Même si l’elfe ne laisse rien paraître sur son visage, les mots qu’elles utilisent pour parler de ses “outils” semble être bien triste pour Lucifer. Ce dernier s’en veut d’avoir été aussi curieux, c’est sa plus grande qualité et son pire défaut à la fois, parfois il n’a pas toujours conscience de là où peuvent l’emmener de telles questions, ni celles qu’elles peuvent provoquer chez les personnes à qui il les pose. En tout cas, par respect par l’histoire qu’Aléïs vient de partager avec lui, Lucifer ne dit pas un mot et hoche simplement la tête en prenant un peu de son thé, soufflant d’abord délicatement dessus pour ne pas se brûler vu la chaleur élevée que dégage celui-ci.

La discussion finit par prendre direction vers le travail de la charmante elfe, cette dernière lui demandant où se trouve son tatouage d’appartenance au Reike, non sans souligner qu’un représentant du pays devrait afficher fièrement un tel tatouage. Lucifer n’entendra qu’à peine la suite de sa phrase, l’émotion de colère en lui gronde: elle a touché une corde sensible sans le vouloir, et ce n’est ni le lieu ni le moment pour parler de ce que représente à présent son tatouage. Son visage et son sourire reste intact alors qu’il reprend le contrôle de ses pensées, avançant simplement quelques paroles:

“Mon tatouage se situe sur mon omoplate droite. Cette tenue ne permet pas de le voir malheureusement, mais j’en ai d’autres pour mes visites diplomatiques qui me permettent de l’afficher librement. Je dois d’ailleurs le refaire sous peu.”

Peut-être n’a-t-il pas parlé assez fort pour qu’elle l'entende qu’Aléïs enchaîne avec un autre sujet tout aussi intéressant: son expertise en tant qu’ambassadeur. Si l’elfe lui avait posé tant de questions à l’extérieur, Lucifer aurait sûrement cru à de l’espionnage, mais elle ne semble pas en avoir les compétences. Entendez par là qu’elle semble sincère dans ses questions et ne cherche qu’à obtenir des réponses à ses questions, réponses qui ne tardent pas à arriver.

“En effet, j’ai pris mes fonctions il y a quelques mois à peine, bien que je connaisse le monde politique et diplomatique depuis de nombreuses années. Nous ne sommes pas très nombreux à avoir ce rôle, alors je gère autant d’affaires internes que je fais de visites à l’étranger.”

Sans doute qu’il a répondu ce qu’elle voulait entendre, auquel cas, il lui expliquera avec plaisir tous les tenants et aboutissants de sa profession et vu qu’elle “adore” l’entendre parler, préparer trois théières de plus ne sera pas de trop si la discussion continue sur un sujet que Lucifer maîtrise autant. Le bel ambassadeur savoure tranquillement son thé alors que son hôte semble avoir fini le sien, doit-il le finir rapidement lui aussi? Il commence à discerner un peu la personne qu’il a face à lui et nul doute qu’elle insistera pour qu’il avale tout d’une traite si elle veut qu’il parte d’ici.