- Musique:
- Allez, ma grande, c'est le moment de rentrer...
- Quoi ?! Déjà ? Mais il n'est que... La paire de prunelles embrumées par l'alcool chercha un instant un moyen de deviner l'heure.
- Il est déjà quatre heures du matin. Je vais fermer.
Morrigan descendit rageusement du comptoir où elle était encore en train de danser, une main rageuse battant en direction du tavernier, dans le but de le faire taire.
- Fais attention à toi en rentrant...
- La ferme ! Broncha-t-elle en titubant vers la sortie, prenant une bouteille encore pleine sur son passage.
L'homme soupira, son regard inquiet suivant la brune jusqu'à ce qu'elle quitte l'établissement. Puis il attrapa son balai. La nuit n'était pas encore finie pour lui. Ni pour elle, d'ailleurs. La jeune femme était bien sortie de la taverne, mais elle n'avait aucune envie de rentrer maintenant. Et l'ivresse ne l'aidait pas à prendre les meilleures décisions ce soir-là... Si elle aurait pu rentrer en se téléportant directement chez elle, elle n'en fit rien.
Les rues de Liberty étaient toujours agitées, de jour comme de nuit. Bien que la nuit, ceux qui peuplaient la capitale n'étaient pas toujours les fréquentations les plus sûres. Mais ce n'était pas ça qui lui faisait peur. Non, elle était davantage inquiète de se retrouver seule avec ses pensées. Car depuis qu'ils avaient retrouvé Liberty avec Kasen, elle ne pouvait s'empêcher de penser à leur dispute, et à la manière dont les choses s'étaient terminées...
Puis il lui avait envoyé une enveloppe avec de l'argent.
Son salaire pour la mission.
Elle avait fait valser le contenant contre le mur en ouvrant l'enveloppe. Pour qui la prenait-il ?! Qu'est-ce que cela voulait-il dire ?! Comme si elle n'avait été qu'une vulgaire fille de joie avec qui il s'était bien amusé. Rien que d'y repenser, cela la rendait folle de rage.
Alors, Morrigan ne rentra pas chez elle immédiatement. Dans ses veines le sang s'était mélangé à l'alcool, et son corps vibrait encore sous le rythme de la musique. Pourtant, sa grâce habituelle avait été remplacée par la maladresse de l'ivresse. Elle le remarqua en vacillant, alors qu'elle s'adossait à la rambarde d'un petit pont pour retirer ses chaussures. En manquant de tomber, elle se rattrapa au dernier moment, pouffant quand sa main se fermait de justesse sur la balustrade. Son autre main se glissa sur le goulot de sa précieuse bouteille qu'elle avait déposé sur le bord. Puis l'espionne grimpa sur la rambarde de métal.
Oh non, non. Elle n'allait certainement pas sauter. Non, il n'y avait aucune intention suicidaire dans le geste. Et quand bien même, la rivière était assez basse pour que la chute ne soit pas si dangereuse. Si on oubliait le courant. Mais tout cela était bien loin des pensées de l'espionne, qui funambulait inconsciemment sur la balustrade, faisant confiance à un équilibre particulièrement aléatoire à cet instant.
Elle ne remarqua qu'il s'était mis à pleuvoir que lorsqu'elle sentit ses cheveux se coller à son front, à ses épaules découvertes. Le tissu de sa robe vint se coller quelques instants après à sa peau, et la brune se mise à rire de plus belle.
Les lumières de la ville éblouissant ses yeux trop fatigués, la jeune femme leva la tête au ciel, laissant le ciel étoilé devenir le seul tableau qui méritait son attention à cet instant, s'exaltant devant la beauté des étoiles, et la lueur de la lune. Sa main libre se leva, faisant mine d'attraper l'un des astres. Elle ne quitta du regard l'étoile qu'elle avait nommée sienne lorsque le son des pas qui se rapprochaient du petit pont étaient trop près pour qu'elle puisse les ignorer davantage.
Qu'est-ce que vous voulez ? Soupira-t-elle, la voix lasse, sans même avoir eu le temps de se retourner vers l'inconnu qui venait la tirer de sa contemplation. La brune pointait un doigt accusateur dans sa direction.