Liberté, mais laquelle exactement ? Car Elwen n'avait jamais réellement vu cette liberté comme on peut l'espérer en lisant sa définition dans un dictionnaire. Bien évidemment, si l'on jugeait par rapport aux autres nations, ce n'était pas à discuter. On avait en république une grande marge de manœuvre afin d'agrémenter sa petite vie de toujours plus. C'était ainsi que voyait la vie la charmante députée conservatrice. Les bonnes excuses ou doux mots déclamés dans les discours n'avaient guère de sens sauf pour ceux qui les acceptaient comptant. Le crédot en ce moment du partie était pour l'égalité des races. C'était bien ridicule, comme si un orc pouvait espérer quoi que ce soit face à un elfe. Il y avait des races bien plus développées que les autres, et l'elfe était bien fière de ses capacités.

À la fin du discours, Elwen se contenta d'applaudir délicatement et doucement, encore un verre à la main, un léger sourire de politesse sur les lèvres. Une magnifique robe verte chique et révélant légèrement quelques formes pour les plus triviaux, la blonde se tenait bien droite, noble éducation oblige. Elle parcourait la plèbe du regard qui semblait vraiment y croire à toutes ces sornettes. Enfin, tant qu'ils votaient par la suite pour sa personne, cela lui allait bien. Les puissants ne changeraient pas, ils resteraient les mêmes quelque soit les lois ou les décisions, tout simplement parce qu'ils ont trop d'appuis, trop la main sur tout. Comme si on pouvait par exemple menacé la présidente qui personnellement possédait une grande partie de la capitale. Elwen n'avait aucunement honte de sa richesse, elle le démontrait avec joie à l'aide de bijoux discret. Sa famille était ancienne et noble, elle n'était pas là pour s'afficher avec le plus gros bijoux du monde. Cela était l'apanage des nouveaux riches avides de prouver leurs ascensions sociales. Elle échangeait quelques mots légers avec les personnes qui allaient et venaient, tels des insectes attirés par une lumière éphémère. Comme c'était adorable. Elle avait de très bonnes manières, le ton de voix qu'il fallait et toujours prudente par rapport à qui elle avait en face. La députée avait avec les années l'habitude de bien juger les personnes pour qui elles étaient. Son verre alcoolisé ne bougeait pas beaucoup et il servait davantage d'accessoire que pour embrumer son esprit, son arme principale.

Le bal des indigents se poursuivait et un nouvel homme s'invita dans un cercle qui commençait à se vider. Elle était toujours ouverte à la discussion, sa position oblige. Elle également dans un doux sourire le toisa, inquisitrice, bien décidée à savoir qui l'approchait.

• « Dois-je comprendre que vous n'êtes pas un fervent soutient de Goldhearth ? »

Répliqua avec douceur la députée d'une question en réponse à une autre. C'était un habile stratagème de diversion. Il n'était pas question de répondre honnêtement à un illustre inconnu dans une soirée de la sorte. Quoi qu'il en soit, cet homme ne semblait pas être des plus en adéquation envers l'égalité des races. Sans doute parce qu'il n'était pas qu'un simple humain, elle ne pouvait que le comprendre.

• « C'est bien pour cela qu'il s'agit d'agir comme il convient pour le futur de notre République et non comme le tout à chacun l'aurait fait, sinon, toutes ces personnes seraient à ma place n'est-ce pas ? »

Amusée par le style d'approche de cet homme, Elwen n'avait aucun doute qu'il savait pertinemment qui elle était avant de venir l'aborder. Cependant, elle jouait le jeu bien volontier, peu encline à chercher à briser cette petite danse habile de la politique et du bon goût de la bonne société.

• « Me voilà découverte, je dois bien l'avouer, mais vous avez un avantage sur moi mon cher. À qui ai-je l'honneur ? »

Parfaitement à l'aise, l'elfe s'était insinuée en des terrains bien plus dangereux que cette charmante soirée pleine de promesses d'ennuis mortels. Cependant, cet homme pourrait bien se montrer plus intéressant que la moyenne.

• « En effet, je suis une Nenya, Elwen de son prénom. J'imagine qu'un discours pareil est un bon rappel à propos des valeurs actuelles que notre parti défend. Vous semblez être habitué à ce genre de soirée n'est-ce pas ? Mais que faites-vous donc dans la vie ? »

Elwen sourit doucement, si cet homme était présent ici sans ma ferveur militante adéquat, c'était soit pour la nourriture de qualité ou alors qu'il avait un autre intérêt en tête. C'était le plus intriguant dans la discussion qui s'amorçait en cette soirée peu palpitante.

• « La politique a ces mystères que le tout venant ignore sûrement. Cela dépend de quelle vertue l'on parle n'est-ce pas ? Il faut se battre pour obtenir la place désirée et l'espace dans lequel on nous permet de vivre. Tout le monde aspire à agrémenter ce dernier du mieux possible il me semble. C'est dans la nature de la vie. »

Commenta l'elfe en décrivant ce qui devait être sa manière de penser et d'agir à l'aide d'un éternel sourire. Elle lâcha un léger rire au charmant compliment, qui n'en était sûrement pas un vrai. Comme il était difficile de pouvoir faire entièrement confiance en quelqu'un dans sa position.

• « Je vous remercie mon cher Soren, vous me permettrez cette familiarité j'en suis certaine. La fameuse université Magic, je suis davantage diplômé de celle à Melorn, sûrement mes origines elfiques qui parlent en cet instant. Dire que les néophytes disent que l'alchimie est l'apanage des sorciers, mais voilà un domaine intéressant. Guérir les maux des autres par quelques produits de votre fabrication. Vous devez en tirer une certaine satisfaction. »

La blonde ne savait pas trop encore ce que rêvait cet homme dans la vie, mais il n'avait pas une aura de bienfaiteur avec un coeur d'or dans la main. Il y avait quelque chose d'autres, mais déjà, vu le prix de l'université, ce n'était pas n'importe qui. Elwen n'avait pas entendu parler des enquêtes à son propos, mais peu importait en cet instant. Tant qu'une personne n'était pas condamnée, elle était innocente n'est-ce pas ?

• « Moi qui commençait à me dire que vous étiez ici pour la ripaille et la présence de charmantes compagnies féminines. »

Répondit alors avec délicatesse la députée, qui ne croyait pas un seul mot qu'elle venait de prononcer. Ce n'était qu'un subterfuge pour le pousser à poursuivre ses révélations. Prêcher le faux pour avoir le vrai tout en faisant croire à sa limite intellectuelle, c'était une méthode plutôt pratique tout en gonflant l'égo de son interlocuteur. En tant que femme, si certaines avaient besoin de se tirer vers le haut, cela faisait bien longtemps qu'elle n'avait rien à prouver à personne ou à elle-même. L'homme affichait de plus en plus des idées extrêmes à mesure que la conversation avançait. Elle était une femme de la haute société, l'elfe n'avait jamais connu le besoin, alors elle ne pouvait pas comprendre vraiment le mauvais sort des pauvres. Bien évidemment que les riches se soutenaient entre eux, ils n'allaient pas aider ceux dans le besoin non plus ! Déjà qu'ils leurs offraient du travail et un toit, ils devraient leurs être reconnaissant au contraire.

• « Il faut bien des dirigeants avisés, du moins les plus capables disponibles, pour diriger notre chère république. Je ne dis pas que toutes les promesses sont accomplies, les circonstances changent, mais je peux vous l'assurer que les moyens utilisés seront bien employés. »

Il lui était impossible d'afficher ses pires travers face à un inconnu qu'elle ne connaissait que depuis quelques minutes. Elwen devait se montrer prudente, même si elle lui servait les excuses préparées et toutes faites du commun. La vie était injuste, comment ne pourrait-elle pas l'être avec un système basé sur le travail et la richesse ? C'était le jeu, et sa famille était connue pour être des orfèvres depuis plusieurs générations d'elfes.

• « Il en faut des idéalistes, mais il faut également des réalistes pour agir. Les extrêmes quel qu'ils soient ne sont que très rarement la bonne réponse. Ils peuvent l'être, mais pour quelle conséquences ? Il est habituellement dangereux pour quelqu'un de devenir plus gênant qu'utile, sauf si on a les appuis nécessaire pour se maintenir hors de l'eau. »

Indiqua alors Elwen pour ce qui était du bon sens. Elle n'allait pas devenir quelqu'un de déviant au nez du monde. Elle réservait ses moyens les plus vicieux pour l'ombre du pouvoir. Ces ténèbres pour qui sont inconnus aux mortels, mais soupçonner par tous. Elle se détourna de la fin du discours afin d'observer pleinement cet homme qui lui demandait ce qu'elle pensait. Voilà bien une question délicate selon la personne qu'elle avait face à elle. Il avait des manières, éduqué, mais certainement pas de la haute société. Il n'en connaissait que peu les codes ou les refusaient. Il affichait des idées particulières, un être capable de beaucoup certainement.

• « Quelque part, je fais partie de ce gouvernement, même si je ne suis que la représentante d'une partie de la population de notre chère capitale. Je ne cache pas mes idées conservatrices. Je pense qu'en effet, le passé offre des clés pour le futur. Il est important d'en retenir les leçons afin de ne pas faire les mêmes erreurs, d'affronter les mêmes épreuves lorsque l'on peut les éviter. Ma famille est riche, je ne pense pas que ce soit une tare, pire, j'en suis assez fière. Je pense pouvoir agir et faire ce qui doit être fait pour le bien de notre République, je serais là voix du passé qui gronde, celle que beaucoup oublie ou peut-être même espère ne plus se rappeler. Comme tout politique, que peut-on rêver que de monter les échelons, le sénat ? Aux gouvernements ? La place suprême un jour ? La vie des elfes est longue et je suis une personne très patiente. Êtes-vous ici pour trouver des personnes opposées au gouvernement ou simplement des personnes ouvertes d'esprit ? »

• « Soit, on dit que la patience est la mère de toutes les vertus, mais il est nécessaire d'agir. Il faut créer sa chance, personne ne le fera pour vous. »

Ajouta alors Elwen, qui était davantage dans l'action, réfléchie certes, mais agir lui semblait être nécessaire. Elle laissait cet homme se servir sans en prendre, restant alors très digne.

• « C'est sûrement parce qu'ils se battent de la mauvaise manière ou qu'ils ne connaissent pas les bonnes personnes. On ne grandit que rarement seul, mais ensemble. »

L'elfe héritière d'une famille noble et riche ne semblait pas se sentir visée. Pire, elle était même fière de cette chance. Elle se contenta de sourire légèrement. Si les pauvres ne voulaient plus l'être, il suffisait d'agir comme il le fallait. Si jamais la députée croyait en la République et non aux autres systèmes politiques en place dans le monde, c'était bien grâce à la presque chance pour tous. Le luxe était attrayant, mais rester au plus haut niveau en permanence demandait également une certaine forme d'art et d'équilibre.

• « En effet, un homme avec vos capacités rares mériterait d'être davantage connu des bonnes personnes. »

Elwen nota mentalement ce qu'il venait de décrire sur son métier. C'était toujours utile d'avoir dans son carnet une telle adresse selon la situation.

• « Je suis alors charmée de pouvoir compter sur votre vote à la prochaine élection. Convaincre est bien là la première des qualités d'une bonne femme politique. »

Elwen hocha la tête doucement.

• « Oui, bien entendu, ceux qui savent se faire remarquer deviennent réputés. Cependant, il vaut mieux que ce soit de la bonne manière, et avoir les bons contacts de son côté. Quelque soit la personne, sans appuis de la population, on ne reste pas au pouvoir ou à sa place ainsi. Que ce soit une présidente, une députée ou même un chimiste de génie. »

Prenant des exemples sûrement au hasard, la députée gardait son sourire. Personne n'était à l'abri, ni elle ni quiconque. Elle préférait largement avoir à ses côtés un homme pareil que contre. Se faire ses ennemis gratuitement était stupide en même temps. Tout à chacun s'amusait à un jeu dont les deux protagonistes convenaient de la duperie ambiante de la discussion. Elle savait parfaitement ce qu'elle désirait dans la vie, et ce n'était pas un secret.

• « Opposé au gouvernement ? Allons bon, pour faire quoi ? En parler dans une soirée du partie au pouvoir, voilà qui est risqué non ? »

Elwen était curieuse d'en savoir davantage sans pour autant juger ou se placer dans cette épineuse question. En tant que députée de la majorité, elel aurait sans doute dû rejeter en bloque séance tenante, mais pourtant non, moin de cela. L'homme se plaça dans la position d'un être capable d'être bien âgé, mais l'elfe se contenta d'écouter avec un sourire.

• « Et tout ce petit discours pour en venir où exactement ? Vous cherchez un soutien de quelle forme ? »

Demanda alors sans trop d'hésitation quant à la nature de leurs échanges. La blonde se doutait que cela venait surtout afin d'obtenir quelque chose.

• « Ha vous voyez ! Il y a toujours espoir que vous votiez pour moi, je saurais vous convaincre. »

Déclara avec un léger sourire amusée collé au visage la députée de la majorité. Peu décontenancée par la manœuvre, elle restait sûre d'elle-même et son expérience parlait également pour elle.

• « Je suis bien en accord avec vous, c'est en faisant bouger les lignes de notre univers que nous pouvons améliorer la situation au sein de la République. Elle reste fragile et solide à la fois, car comme a dit nos anciens, c'est la moins pire des solutions qui a pu être trouvé. Fragile car il est toujours possible de fourvoyer l'idée que se faisait nos paires, et solide car quoi que l'on en dise, elle protège tout le monde. »

Elwen pensait réellement ce qu'elle disait. Ne dites pas pour une fois ! Elle était une fidèle de la république, et elle aimait à croire que chaque homme et femme l'étaient aussi à sa manière. Elle pouvait utiliser des moyens peu conventionnels pour une députée, comme on l'imaginait du moins, jamais elle menacerait ce système.

• « C'est une excellente idée, beaucoup trop de personnes font parler d'eux de la mauvaise manière. Cela se révèle souvent contre productif et ce qui nous oblige à utiliser des moyens coercitifs. »

L'elfe procéda à un vague mouvement de la main en répondant à son interlocuteur.

• « Je crois savoir le but de la présidente, mais je ne la connais pas si intimement pour la connaître pleinement. Vous devez savoir que même en dehors de son statut de présidente, elle est quelqu'un de riche et avec un sérieux cercle de connaissances. Vous dites que les choses ne vont pas assez vite, mais alors, que feriez vous pour améliorer la situation ? »

La blonde se rendait bien compte de la position de cet homme, et sans doute cherchait il en elle un potentiel appuis afin de nuire à la tête de fil de son partie. Elle ne trahirait pas ses croyances pour n'importe qui. Ce n'était pas impossible bien entendu, mais pour les bonnes raisons.

• « Si j'étais sa conseillère, je lui suggérait de surveiller de près ses adversaires, et d'encore plus près ses alliés. En politique, c'est extrêmement rare d'avoir des amis sur qui compter. »

Elwen glissa sa main contre sa propre joue.

• « Je peux bien imaginer que chaque député ou au conseil est un rival, on ne peut pas resté président à vie, la roue tourne, il suffit simplement d'être patiente. Je pense que la présidente connait mes ambitions pour l'avenir, mais tout cela pour en venir où ? »

Elwen hocha la tête doucement.

• « Je ne m'inquiète pas de l'avenir de la République, malgré tous les travers, une société libre avec des esprits constructifs et inventifs, nous serons toujours gagnant. Vous pensez donc que tous les maux de notre univers se trouvent en notre présidente ? »

Demanda simplement la députée. Certes, elle était la tête de fil, celle qui se devait de prendre sur elle toutes les responsabilités, mais l'accuser de tous les problèmes, c'était peut-être un peu exagéré. Une cible facile, voilà en quoi l'elfe voyait la chose. Elle ne releva pas verbalement le fait que cet homme connaissait bien la famille la plus riche de la République. Si jamais c'était le cas, il ne s'y attaquerait sûrement pas.

• « Et dites moi, comment vous ferez pour vous en sortir vous ou encore que sa chute ne nous emporte pas plus ? Ma famille est fidèle à la République, la présidente ne fera guère un mandat de plus au maximum, alors pourquoi prendrais je autant de risques ? »

Elwen ne refusa pas catégoriquement la proposition comme sans doute la plupart des personnes politiques auraient dû le faire. Pourtant, elle restait à l'écoute afin de mesurer à quel point c'était sérieux. Après tout, il pouvait s'agir d'un simple illuminé, et elle n'était pas si imprudente.

• « Je gage qu'il va me falloir davantage que des mots pour aller plus avant. D'autant plus pour vous aider vous également, soyons honnêtes. Je ne doute pas de vos compétences alchimistes, quoi qu'il en soit, mais la proie est importante n'est-ce pas ? Cela ne semble pas vous faire peur. »