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Désillusion à la Reikoise
Ft. Me’a Gouchik’i
Pour un natif du Reike, voir de la violence à tous les coins de rue, de la souffrance dans les regards des esclaves et des combats quasi constant était une normalité. Mais pour les personnes extérieures, la brutalité du pays avait la saveur d'une grande baffe dans la gueule en guise de petit déjeuner. Morwën avait grandit dans ce pays, elle connaissait ses coutumes et ses habitudes et pour elle, voir des esclaves se faire fouetter pour avoir manqué de respect à leurs maîtres était monnaie courante. Et même si elle avait longtemps vécu dans la jungle, loin des villes, elle n'était pas dérangée par la violence des grandes cités, bercée avec cette vision depuis sa plus tendre enfance.
Alors, quittant définitivement la jungle pour rejoindre la capitale, elle s'était mis en tête d'y acheter une maison, après s'être souvenue de la fortune dont elle disposait dans un coffre. Mais ce chemin était tortueux quand on était seule, elle était donc allée chercher l'aide de son cher père qui l'avait accueillie à bras ouverts.  Depuis son introduction dans le monde du mercenariat par son très cher papounet elle n'avait pas chômé et avait désormais fait ses preuves. Choisissant de prendre quelques jours loin de la capitale, elle avait récupéré son cheval dans l'écurie proche de son logement temporaire, chargeant ses armes et sa tenue de combat - juste au cas où -.

Laissant son cheval la guider jusqu'à la sortie de la ville, elle prit un instant pour permettre à son esprit de divaguer. Elle tentait de plus en plus de tenter de rassembler les souvenirs qui lui apparaissaient, récoltant toujours un intense mal de crâne quand elle le faisait. Mais dans ses moments de solitude, elle tentait, toujours. Finissant le crâne scié par une sensation dérangeante de poser les mauvaises questions, Morwën abandonnait toujours, laissant ces souvenirs de côté jusqu'à sa prochaine tentative.

Pour l'instant, rien de très concluant n'en était ressorti, si ce n'est quelques visages toujours accompagnés d'une absence de souvenirs les concernant. Alors, elle s'était simplement mise en chemin vers cette auberge qu'elle connaissait à la sortie de la ville, après la marche des suppliciés. La vision de ces corps crucifiés, geignant qu'on les achève pour certains, se faisant dévorer par des vautours pour d'autre, laissait l'elfe indifférente tant elle y était habituée. Elle savait qui en était responsable, qui clouait ces hommes castrés sur les croix, mais c'était encore un souvenir de plus qu'elle n'avait pas, éludant de nouveau cette question d'un regard perdu dans le vague. Les geignements des suppliciés l'accompagnèrent tout au long de son trajet, jusqu'à l'auberge où elle savait pouvoir trouver un peu d'agitation, pour oublier ses pensées envahissantes. Et même si elle ignorait encore beaucoup de choses sur sa vie d'avant, tout paraissait des plus normal pour l'elfe.   Il était aussi parfaitement normal qu'elle se réveille parfois seule au milieu de lames usagées, couverte de sang qui n'était pas le sien. L'étrange lueur sombre qui brillait désormais dans ses yeux l'était tout autant. Rien dans ces soudains changements n'étaient alarmant pour elle, tout était parfaitement normal.

Mettant pied à terre une fois devant l'auberge, elle ne tarda pas à y pénétrer, laissant son cheval attaché devant. La grande salle de l'auberge était déjà bien remplie à l'approche de la tombée de la nuit et c'est en se réjouissant de ne pas avoir à jouer des coudes qu'elle trouva une place un peu à l'écart.

Il serait aisé de raconter comme la frêle elfe a refusé qu'on la pelote et s'est vaillamment défendu contre l'immense Drakyn qui pensait pouvoir profiter de sa plastique, mais la réalité est bien différente. La réalité était un vilain mélange d'égo, de bière renversée et de sourires enjôleurs. La simple vision d'un homme tentant de la séduire suffisait à réveiller des instincts violents chez l'elfe qui faisait parler ses poings un peu trop rapidement. Le bougre visiblement croisé avec une enclume avait encaissé le coup comme un champion, laissant une elfe avec la main brisée et l'égo en berne tout en marmonnant quelque chose comme « Salope hystérique » alors qu'il quittait la scène, préférant partir en quête d'une putain qui aurait au moins le mérite de se montrer facile.

Gromellant en se rasseyant, sa main bleuissant à vue d'oeil, l'elfe attrapa sa chope de bière pour la descendre d'une traite, espérant que la douleur la quitte jusqu'à ce qu'elle descende sa potion de soin, qui réparerait peut-être un peu les dégâts. Faisant fuir par la même occasion tout abruti à deux mètres à la ronde, l'elfe fit mine d'ignorer tous les regards curieux qui se posaient sur elle. Bientôt, la taverne reprit sa festivité, oubliant l'elfe boxeuse et sa main cassée.




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Me'a Gouchik'i
Désillusion à la Reikoise [Me'a] V6tv
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Me'a Gouchik'i
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Désillusion à la Reikoise
Feat. Morwën R. Cilwaen


D’aussi loin dont pouvait se souvenir Me’a Gouchik’i, un cri devait être accompagné d’un soin, d’un mot rassurant, d’une caresse apaisante. Avant son arrivée au Reike, elle pensait que c’était le cas pour tous. Personne ne voulait souffrir non? Personne ne voulait voir un proche souffrir n’est-ce pas? C’était logique et évident. Ah! Si vous l’aviez vu. Devant l’entrée d’Ikusa, cheval à l’arrêt, le regard fixe devant ces corps pendants. Elle apprendra qu’elle se trouvait à l’entrée du Marche des Suppliciés.

- Effectivement, je comprends le nom ; a-t-elle répondu à l’habitante qui l’a renseigné sur la nomination de l’endroit.

Ignorant si c’était le vrai nom du sentier ou juste celui que les habitants lui donnaient, elle avait passé de longues minutes devant, immobile, réfléchissant sans sembler choquée. Elle avait détaillé les corps à moitié dévorés, décrépis pour certains, tous masculins de ce qu’elle avait pu voir. Elle avait prit le temps de graver chaque détail. Ce regard implorant, la chaleur, l’odeur. Seigneur! Cette odeur ! Comment? Pourquoi? Etait-ce nécessaire d’en arriver là? Me’a avait questionné plusieurs Reikois pour leur demander s’il lui était possible de les soigner. Sans comprendre, on le lui avait interdit. On l’avait dévisagé comme si elle était folle. Et la pauvre fée n’avait pas compris.

S’interdisant de faire des vagues avec une culture qui n’était pas la sienne, ravalant ses larmes et ses nausées, Me’a est descendue de cheval pour prier sa chère Nature de leur offrir un repos serein. Elle s’était excusée de ne pas être arrivée plus tôt. Peut-être qu’avec un voyage avancé de quelques jours, elle aurait pû sauver ces gens. Peut-être. Ou peut-être pas. Après tout, c’était encore un mystère pour elle, la raison de ces corps étendus, bras tendus, pieds joints et …  hum. Déglutit Me’a, ça va aller. Virilité absente.

Vous savez, Me’a ne connaissait - et ne connaît toujours - pas le monde. Elle est arrivée au Reike par un concours de circonstances. Et là, se retrouvait face à cette scène, première vision de la Capitale… De tout ce qu’elle avait imaginé, notons que rien de s’approchait de près ou de loin de cette représentation. Cela semblait remplit de colère… Me’a avait secoué la tête. Oh non! Non non! Elle n’avait pas le droit de juger. Si ça se trouvait, elle était face à une tradition, un procès récemment clôt ou juste une punition de clan. Qu’en savait-elle après tout? Remontant sur la jument qui n’avait pas bougé, la fée avait reprit son chemin en direction d’une nouvelle visite de bâtisse à acheter. Elle aurait souhaité trouver un logement et une échoppe qui serait dans un endroit plutôt “calme”. Mais force était de constater qu’entre sa notion de calme et celle du Reike, il y avait un monde. Ici, comme à Liberty d’ailleurs, les habitants étaient vifs. Ils couraient, alpaguaient leurs connaissances et n’hésitaient pas à transmettre leur mécontentement par des insultes diverses et variées que Me’a apprenait sans comprendre leur signification.

Malheureusement, la fée n’avait pas trouvé son bonheur dans ce bâtiment. Elle avait espéré une échoppe plutôt calme, un peu en retrait du centre agité. Une belle construction semblant solide, pas trop chère et plutôt bien placée. Ce qui n’était pas le cas de ce bien-là. Tant pis. Me’a visitera d’autres biens jusqu’à trouver celui qui lui conviendra.

Revenons à cette Marche des Suppliciés. Non loin de là, Me’a avait réservé un repas et une chambre dans la première auberge de la ville. Ah! La voilà. Avec discrétion, la fée se dirigea vers le tavernier pour commander un verre d’eau et le plat du soir. Elle se posa dans un coin de l’endroit, observant les hommes faire tinter les choppes en riant, les quelques femmes présentes - comme elle - avaient tendance à se montrer discrètes. Enfin. Visiblement pas toutes. A quelques tables d’elle, un bruit de chaise qui se recule rapidement se fait entendre. Sous les habitués qui semblaient regarder derrière la fée, sous ce regard commun aux Maîtres et aux esclaves, clients et employés, cette dernière se retourna à son tour. La curiosité dirons-nous.

La nouvelle distraction consistait en une Dame Elfe qui, visiblement agacée, levait la main sur un homme. Selon ce que Me’a avait pu lire dans la Bibliothèque de Liberty, il s’agirait d’un Oni. Grand, semblant fort, avec des cornes - très jolies cornes repliées d’ailleurs - Me’a le confondait. Elle n’entendait rien de ce qu’ils pouvaient se dire, les clients autour d’elle commençant à chuchoter ci et là. Le coup de la demoiselle partit et cogna l’Oni qui l’encaissa sans réelles difficultés. Visiblement contrit, il s’éclipsa quelques secondes après, la petite fée observant ses lèvres bouger sans capter ce qu’il marmonnait. Notre fée réalisa son erreur quand elle vit quelques écailles trôner sur son avant-bras. Elle reporta son attention sur l’elfette qui vivait la situation bien moins “bien” que son adversaire de fortune. Ou d’infortune si on observait bien l’état de ses phalanges rougies… bleutées. Maintenant plus bleutées que rouges.

Il fallut une petite minute à détailler cette main qui lui semblait étrange avant que la soigneuse ne se lève pour rejoindre la demoiselle. Elle s’inclina respectueusement, courbant le dos en souriant, calme, le regard détaillant sans honte la dextre.

- Pardonnez-moi de vous déranger. Je me nomme Me’a.

Elle replaça une mèche avant de reporter son regard dans celui de son interlocutrice. Qu’elle était belle. C’était impressionnant de voir que cette elfe, semblant si douce et frêle, n’avait pas hésiter avant d’écraser son poing sur l’armoire qui lui faisait face quelques minutes plus tôt.

- Puis-je me permettre de vous soigner? Ou au moins de soulager un peu votre blessure? J’ai quelques onguents sur moi si vous ne souhaitez pas ma magie…

La voix douce et le calme de la fée étaient presque étranges parmi ces brutes au languages fleuris qui braillaient pour se faire entendre. Elle souriait. Doucement, une faible lueur verte illumina sa main droite, comme pour prouver ses dires. N’oublions pas qu’ici, elle n’est qu’une étrangère de passage, comme des centaines, milliers d’autres probablement.

Elle semblait réfléchir quand on visage s’illumina rapidement, comme si elle venait de se faire une réflexion importante.

- Oh ! Je ne vous demanderais rien en échange ! Ni argent ni services… Je souhaiterais simplement vous aider.



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Désillusion à la reikoise
Ft. Me'a Gouchik'i
Aider son prochain sans contrepartie. Il fallait être fou ou complètement sot pour agir de la sorte. Morwën avait bien confortablement oublié qu'elle faisait partie de ces gens-là, avant. Avant que sa vie ne bascule, qu'elle ne devienne quelqu'un d'autre ou tout du moins quelqu'un de différent. Elle avait passé sous silence cette bienveillance dont elle faisait preuve avant sa rencontre avec son père, préférant ne pas se remémorer comme sa gentillesse ne l'avait pas sauvée. Malgré toutes les âmes qu'elle avait aidé, personne n'était venu l'aider. Personne n'avait répondu à ses suppliques alors qu'elle se faisait lacérer. Personne n'était venue la tirer de la cage dans laquelle elle avait été enfermée. Non, personne. Alors à quoi bon faire le bien ? À quoi bon aider son prochain quand le prochain ne nous le rendait pas. C'était une course vaine, inutile, remplie de sourires bienveillants qui n'apportaient rien. Morwën le savait désormais, faire le bien n'avait servi à rien.

Alors, quand après s'être lamentablement brisé le deuxième métacarpe sur la mâchoire du Drakyn dont la mère semblait avoir forniqué avec une enclume, une petite fée adorable s'approcha d'elle pour lui proposer son aide, Morwën l'accueillit d'un regard glacial. Si ses yeux avaient pu parler, ils auraient sûrement dit quelque chose du genre de "mêle toi de ton cul et va faire la charité ailleurs". Or, ses yeux ne parlaient pas, se contentant de foudroyer sur place la créature souriante qu'était la fée. Détaillant longuement du regard sa vis-à-vis, Morwën semblait malgré tout peser le pour et le contre. Outre la souffrance qui était quelque chose qu'elle pouvait encaisser, sa main était maintenant inutilisable. Sa potion de soin dans la besace, elle ignorait si la décoction était assez puissante pour ressouder ses os.

Le visage toujours figé dans la glace et malgré son absence de réaction, Morwën semblait profondément réticente à l'idée de laisser ce petit être plein de bienveillance la soigner. Que foutait pareille personne dans la taverne la plus glauque d'Ikusa ? Par quel putain de miracle ce petit être de lumière s'était-il retrouvé ici ? Fronçant un instant les sourcils, Morwën détourna le regard, attrapant sa chope de son autre main pour en boire une grande gorgée. La sympathie n'étouffait pas l'elfe et c'est sans vraiment signifier ouvertement son consentement qu'elle agita sa main dans la direction de la fée. Elle voulait la soigner ? Alors qu'elle le fasse et vite. Croisant parfois un regard curieux, Morwën n'hésita pas à foudroyer du regard le moindre bougre qui avait le malheur de l’observer un peu trop longtemps. À en juger par son air sauvage, elle n'aurait pas la moindre hésitation à se casser l'autre main si le besoin s'en faisait ressentir.

Tournant de nouveau les yeux vers la bonne samaritaine, Morwën la détailla de bas en haut, ne se gênant pas pour la jauger. Elle avait l'air beaucoup trop frêle, beaucoup trop gentille pour être Reikoise. Tout dans son attitude mièvre puait l'étranger. Alors, d'une voix sèche, Morwën s'adressa à elle.

« Tu distribues tes services de bonté de coeur dans tout le royaume ? N'as-tu donc pas autre chose à faire ? Ce pays est rempli de haine et de violence, si tu continues ainsi tu finiras violée et égorgée dans un fossé. »  

Elle avait la fâcheuse tendance à ne pas prendre des pincettes, mais au Reike, prendre des pincettes signifiait aller droit vers une mort certaine. Quiconque foulait ces terres devait connaître la réalité du pays, être préparé à la violence qui l'habitait sous peine de finir en chair à saucisses. Alors, de bonté de coeur ou dans un plaisir malsain, Morwën essayait de faire réaliser à la petite fée l'erreur qu'elle commettait. Soigner les gens était une noble cause, mais le faire gratuitement était signe de bêtise. Peut-être s'adressait-elle indirectement à celle qu'elle était quelques semaines auparavant. Car finalement, Me'a et elle n'étaient pas si différente, à l'exception que la bonté et la confiance que Morwën plaçait autrefois dans les autres l'avait conduit à sa perte, la faisant plonger dans un océan de noirceur et de solitude. Mais ce récit ne serait certainement pas conté à la jeune fée et le faciès fermé de l'elfe en témoignait. Moralisatrice et un poil moqueuse, elle n'avait absolument aucune once de reconnaissance pour l'aide que lui portait l'étrangère. Mécanisme de défense sûrement, volonté de se rassurer ou même indépendance farouche, les barrières que l'elfe s'était créé étaient infranchissables, gardant avec ferveur ce coeur de glace qu'elle avait définitivement enfermé.



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Me'a Gouchik'i
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Désillusion à la Reikoise
Feat. Morwën R. Cilwaen


Me’a était indubitablement trop gentille pour ce monde. Trop innocente. Trop utopique. Et pourtant persuadée d’être dans le vrai. La fée réfléchissait sûrement trop simplement. Pour elle, il n’y avait pas vraiment à réfléchir. Elle a vu un coup, une main qui gonfle et qui bleuit, elle savait que l’elfette devait souffrir. Et sa magie étant spécifiquement faite pour cela… pourquoi hésiterait-elle à soigner cette dame? C’était si évident que la douleur n’était pas à prendre à la légère… ni à laisser telle qu’elle.

Bien sûr que la Dame au Poing Bleu l’avait mal regardé. Mais semblait-elle plus hostile qu’un autre? Peut-être oui. Cela aurait-il changé quelque chose? Peut-être que la petite fée aurait plus parler. Peu importait à vrai dire, Me’a ne l’avait pas remarqué. Après tout…. Tout le monde aurait dévisagé un être étrange proposant des soins sans rétribution. Notre petite amie le savait. Elle avait conscience d’être l’étrangeté dans cet endroit. Pour autant, persuadée qu’avec de la patience et de la discussion la situation s’arrangera, Me’a ne faisait pas vraiment attention à tous les marqueurs qui la ciblaient. Les regards interrogateurs des clients, le haussement des sourcils ou les premiers commentaires… Toutes ces indications qui auraient dû alarmer l’être féérique n’étaient pas vues, pas comprises. Me’a n’avait que la main blessée dans son esprit, réfléchissant à la meilleure manière de soigner la jeune femme. Enfin. Jeune. Toutes les elfettes de moins de huit siècles étaient jeunes non?

L’odeur de viande s’élevait dans l’auberge. Une odeur de cuisson qui semblait, par instant, recouvrir celle des bières qui trônait en maîtresse dans l’établissement. La fée tenta d’aborder un sujet simple pour qu’elles puissent discuter plus aisément. Et elle vit le mouvement de sourcils et la main bleutée fut agitée comme si elle avait vaguement l’autorisation d’agir. La jeune adulte se demanda si la douleur était ressentie ou pas. Après tout, l’être magique ne semblait pas souffrir. Elle ne semblait pas vraiment ressentir autre chose qu’une colère sourde comme en témoignaient son regard sombre et son visage fermé. Quel doux contraste avec notre fée tous sourires de voir la main tendue vers elle. Elle semblait rayonner en posant sa besace sur la table pour se pencher vers le membre éclopé. La soigneuse observa sans toucher avant d’amener un tabouret à la table. Avec légèreté, elle s’assit. Avec délicatesse, elle attrapa la main des siennes. Elle la leva vers son regard lavande, tentant de décider si les onguents suffiraient ou si sa magie était nécessaire.

- Hum?

Elle tourna la main pour mieux observer les blessures.

- Je ne les distribue pas. Je propose. Et ce n’est pas tout le royaume. C’est pour aider une demoiselle qui vient visiblement de se casser un truc. D’ailleurs, comment vous nommez-vous?

Le ton était calme, le souffle aussi. Me’a ne la regardait pas. Elle était parfaitement concentrée sur la main. Décidant que la magie serait bien plus simple d’utilisation, bien que plus longue, Me’a laissa ses paumes luire de cette faible lumière qu’elle lui avait montré quelques instants plus tôt.

- Je vous remercie de vous inquiéter mais justement, c’est parce que les Reikois aiment tant se battre que je viens m’installer ici. Il est logique de penser que j’aurais plus d’utilités avec ceux qui se blessent qu’avec les autres, ne pensez-vous pas?

Une faible chaleur semblait émaner des mains de la fée. Ou peut-être est-ce simplement sa chaleur corporelle? Avec lenteur, les soins commençaient. La douleur s’estompait progressivement, les habilités de notre petite fée n’étant que le fruit de beaucoup d’essais et peu de pratique. Surtout sur une blessure pareille! La pauvre main était gonflée. Soigner oui mais chaque soin nécessite le temps adapté. Malheureusement, il n’y avait que dans les contes qu’un claquement de doigt changeait des situations entières en une seconde. Sachant ses soins efficaces mais un peu longs, elle posa ses mains sur ses cuisses, laissant reposer le bras de la douce elfe, revenant relever le regard vers cette femme qu’elle pensait reikoise.

- Pourquoi voudrait-on m’égorger? Je ne suis personne. Je ne possède rien. Ce serait une perte de temps de s’attarder sur ma vie.

Elle posait une vraie question dont la réponse semblait être importante. Visiblement, notre petite fée ne semblait pas comprendre pourquoi l’elfe la mettait en garde contre de telles pratiques. Était-ce si fréquent au Reike pour qu’elle se sente obligée de prévenir une étrangère nouvellement arrivée? Ce n’était pas impossible. Nous avons bien vu l’allée pleine de… de quoi d’ailleurs? Pourquoi ces hommes étaient attachés et sans membre? Était-ce “normal”? La marche des suppliciés s’évapora de son esprit quand elle réalisa que ses soins avaient un peu baissé d’intensité et Me’a reporta sa concentration sur sa magie.





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Désillusion à la Reikoise
Ft. Me'a
La petite fée semblait à des années-lumière de la réalité du monde dans lequel elle avait décidé d'emménager. Voir une créature aussi innocente qu'elle, dans une taverne aussi lugubre que celle-ci pouvait porter à confusion, mais pour cela, il aurait fallu que Morwën en ai quelque chose à faire. Elle avait sans doute de la chance de se briser la main devant elle, ou peut-être aurait-elle pu trouver un autre mage de soin, quelque part dans la capitale. Elle n'avait plus la faculté d'apprécier l'aide des autres, puisqu'elle n'en voulait pas en réalité. Où étaient-ils tous lorsqu'elle appelait au secours ? Lorsqu'elle suppliait son tortionnaire de la laisser partir ? Personne n'était là, elle était seule. Alors, dans cette même solitude, elle affrontait le monde, sa rudesse et sa tristesse. Mais ressentait-elle encore seulement de la tristesse ? De la tristesse comme elle l'avait connue lorsqu'elle avait perdu ses parents. Des parents auxquels elle n'avait plus la moindre attache, dont elle n'avait presque plus le moindre souvenir. Qui étaient ces gens qui l'avaient élevée dans le plus grand secret au fond de la jungle ? Provoquant un traumatisme enfantin dans un esprit encore malléable, préparant le terreau qui servirait à planter cette graine de folie que Levi avait fait germer. Non, elle ne se souvenait plus d'eux, voyant simplement deux enveloppes charnelles aux oreilles pointue dépourvues de visages.

Alors elle s'était reconstruite autour de rien, réinventant cette histoire dans un tissu de mensonge confortable dans lequel son paternel occupait la première place. Ou peut-être devrions-nous l’appeler “daddy” comme Morwën aime à le surnommer - sans oublier le mythique uwu qui image bien ses sentiments à l’égard de cet homme -.

Prise dans un étau de faux semblants, l’elfe n’avait pas énormément changé, si ce n’est sa morale qui avait plus ou moins disparue et sa gentillesse qui était désormais aux abonnés absents. Alors, c’est tout naturellement qu’elle traitait la jeune fée qui lui offrait son aide avec une rudesse qui lui était propre. Elle n’était plus là pour faire dans la dentelle. Profitant des actes bienveillants de la fée pour jeter un coup d’oeil curieux autour d’elle, l’elfe qui se faisait désormais surnommée la veuve noire dans le monde fermé du marché noir cherchait sa proie du soir. Un homme de préférence beau garçon, faible au possible qu’elle prendrait plaisir à éliminer une fois sa besogne terminée. La fée n’avait sûrement aucune idée des raisons qui poussaient Morwën à ainsi observer son entourage et il était mieux pour elle qu’elle continue de l’ignorer, sans quoi elle connaîtrait le même sort que le pauvre bougre qui occuperait la place de dîner - ou plutôt de distraction - à l’elfe ennuyée.

Lorsque Me’a manipula la main de Morwën, celle-ci n’échappa même pas une grimace de douleur. La souffrance était devenue la meilleure amie de l’elfe solitaire, comme une façon pour elle de se rassurer, de se rappeler qu’elle était en vie. Bercée dans la douleur par ce père adoptif, elle s’y sentait à sa place. Alors, quand celle-ci rétorqua qu’elle proposait ses services, Morwën eut un léger rictus moqueur. Il n’y avait là aucune différence à ses yeux, proposer ou offrir était du même ressort. Le surnom de demoiselle lui arracha cette-fois un sourire. Elle n’avait plus rien d’une demoiselle désormais, ses cicatrices en témoignaient. Au diable la princesse en détresse, Morwën était désormais celle de qui les demoiselles devaient être sauvées. Éludant les paroles de la fée, elle la jaugea de nouveau un instant, se demandant si il était bien nécessaire pour elle d’apprendre son prénom.

Décidant qu’elle ne représentait pas une menace, Morwën lui adressa alors quelques mots, presque crachés tant elle réprouvait le fait de discutailler de la sorte.

« Je suis Morwën. Et toi ? » Demanda-t-elle, acerbe.

Les mots de la fée semblèrent alors quelque peu plus sensés, il était en effet évident qu’elle s’installe dans le pays le plus violent du Sekai, après tout, la demande faisait l’offre. Mais cette petite créature adorable devait apprendre que tout se paie et qu’elle ne pouvait ainsi faire preuve de bonté, sans quoi, le Reike l’avallerais.

« En effet, tu vois juste concernant notre attrait pour la bagarre. Mais si tu continues d’offrir tes services gratuitement, tu risques fort de retourner d’où tu viens sans un sous en poche. »

Sa dernière phrase lui arracha un rictus, levant la main à l’attention du serveur, Morwën demanda qu’on lui serve un whisky. Au diable la bière, elle avait besoin de quelque chose de plus fort maintenant qu’elle sentait ses os se ressouder sous sa peau. La magie de la fée était efficace, au moins un avantage qu’elle pouvait lui concéder. Voyant un poivrot tanguer dans leur direction, Morwën sentit le regard intéressé de l’idiot sur son décolleté. Elle n’avait pas honte de ses cicatrices, les affichant sans vergogne au même titre qu’elle portait une chemise et un serre-taille qui mettait en valeur ses attributs. Alors que le badaud s’approchait de leur table, Morwën eut un sifflement entre ses dents. À la manière d’un vipère, elle intimait au balourd de s’éloigner, lui adressant un regard d’une noirceur telle que l’ivrogne hésita un instant, tanguant au milieu de la salle désormais comble de la taverne.
Alors que l’abruti rassemblait son courage, Morwën tira sa dague de son fourreau, la posant sur la table dans un dernier avertissement silencieux. La viande saoule ne faisait pas un repas intéressant pour la veuve noire, elle avait des standards. Alors elle siffla entre ses dents un « Dégage » qui ne manqua pas de faire mouche auprès du poivrot qui tourna les talons, retournant tanguer de l’autre côté de la salle.

Portant de nouveau son regard sur la fée affairée à lui réparer la main cassée, Morwën se laissait faire, son autre main caressant la dague finement ouvragée. Une gravure était visible sur la lame, fine et délicate, elle traçait les mots “ Jusqu’à ce que l’amour nous sépare “. Un message bien énigmatique qui confirmait l’attachement que l’elfe avait pour cette arme. Une fois son verre servi, l’elfe poussa doucement la jambe de Me’a de son pied pour l’inciter à la regarder. Pleine de bonté, elle lui demanda silencieusement ce qu’elle souhaitait boire, lui laissant comprendre qu’un verre d’eau ne serait pas une réponse qu’elle accepterait. La main toujours confortablement installée dans les mimines adorables de la petite fée, Morwën se décida enfin à lui répondre, d’une voix morne, ponctuée d’un peu de moquerie.

« Ce sont justement les personnes invisibles qui sont les plus intéressantes à égorger. Personne ne te chercherait, personne ne viendrait te sauver. Alors le plus vicieux de tous pourrait s’amuser avec toi, te torturer, te violer. Te dépouiller aussi, mais tu n’as pas l’air d’avoir grand chose à voler. Alors méfie-toi, ce pays n’est pas fait pour les faibles. »

Elle sous-entendait sans vergogne le fait que Me’a était bien trop faible pour cette contrée. Elle devrait s’endurcir, sans quoi un violeur s’en chargerait pour elle. Attrapant son verre, elle en savoura une gorgée, faisant tanguer le liquide ambré un instant sous ses yeux intéressés. Au milieu de cette ambiance festive, Morwën dénotait. De son visage figé, de ses manières bourrues qui dénotaient avec sa grâce elfique, elle prenait visiblement un malin plaisir à tourmenter la petite fée qui s’occupait bien gracieusement de sa main blessée.



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Me'a Gouchik'i
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Citoyen de La République
Me'a Gouchik'i
Citoyen de La République
Désillusion à la Reikoise
Feat. Morwën R. Cilwaen


S’il y avait bien quelque chose que Me’a ne comprenait pas, c’était les gens. Les gens pouvaient faire de fabuleuses choses, des actes d’une bienveillance infinie et pourtant, certains se démenaient pour créer le pire, pour propager une terreur que la fée ne comprenait pas. C’était incroyable de dépenser autant d’énergie pour un résultat si sombre. Elle ne concevait pas l'intérêt qu’avaient certains à désirer le chaos et les conflits. Ça la dépassait. Surtout chez les personnes à la faible longévité. Me’a s’estimait être dans la moyenne haute. En fait, pour elle, tout était une sorte de comparatif. Si on comparait son espérance de vie avec un humain, alors elle avait une longue longévité. Si on la comparait avec celle d’un démon, alors elle ne vivrait pas “longtemps”. Tout était relatif après tout.

L’être magique, concentrée sur cette main qui guérissait trop lentement à son goût, ne remarqua pas les regards curieux et inquisiteurs de l’elfette qui détaillaient les autres clients. Elle observait le membre dégonfler un peu, sa peau se décolorant grâce à sa naturelle magie. Elle réfléchissait à la suite, comment bien la guérir. Et s’il n’y avait rien à lui offrir pour après son sort. Onguents? Linge? Cataplasme? La fée releva la tête rapidement quand l’elfe grimaça. Elle haussa un sourcil inquisiteur, cherchant les iris de la blessée. Elle tentait d’y lire quelque chose, hors la douleur. Malheureusement, Me’a n’y vit rien d’autre. Avec plus de précaution encore, elle maintenait le membre sans bouger.

Après un sourire … moqueur? Me’a n’arriva pas vraiment à déterminer le sentiment derrière ce sourire. Mais après donc, elle apprit son prénom. Morwën. Joli prénom. Elle lui expliqua qu’il serait idiot de continuer à offrir ses services gratuitement. C’était vrai. Mais elle n’avait jamais eu de problèmes… La petite innocente se perdit dans la réflexion avant que l’elfe ne leva son bras valide, remuant l’autre de fait. Son regard lavande croisa celui - clair - de sa patiente. Cette dernière détacha ses globes d’elle, balayant la salle avant de siffler entre ses dents. Cela rappelait un peu les feulements de félins.

La fée tourna rapidement le visage pour détailler un homme, l’air peu soigné, quelque peu bourru, qui était en train de dévisager sa patiente. Me’a revint à son tour la détailler. Elle était jolie pourtant. Elle avait une taille fine et des atouts visibles mais pas … exhibés. Elle avait une chemise qui cachait le plus évident. Et pourtant, personne ne devait ignorer à quel point Dame Nature avait été gentille avec Morwën. Cela se voyait malgré les cicatrices qu’elle portait sans honte. Et, d’après notre petite fée, il n’y avait rien de honteux à avoir des cicatrices. C’était dommage parce que cela sous-entendait qu’elle n’avait pas été bien soignée. Mais quelque part, c’était un signe de force. Un signe de force mal soigné. Rien de honteux.
La fée sursauta quand l’elfe sortit sa dague. Elle la posa sur la table en regardant l’homme, d’un regard sombre qui sous-entendait qu’elle pouvait utiliser l’arme sans soucis. Main blessée ou non. « Dégage ». Un sifflement que la petite ailée entendit et en frissonna. Il y avait quelque chose dans sa voix qui l’impressionnait. Qui lui faisait un peu peur. Comme si, à tout moment, la dague pouvait lui être adressée.

Me’a reprit sa concentration sur la main de l’elfe alors que le tavernier venait la servir. La fée ne prêta pas vraiment attention à l’arme. Pour elle, une serpe était utile pour les herbes, un couteau pour les légumes… Pourquoi vouloir absolument saigner quelqu’un si, en plus, il n’y avait aucune nécessité de survie derrière? Elle sentit une pression au niveau de son pied. Son regard s’abaissa doucement avant de voir l’elfe chercher à attirer son attention. La fée haussa un sourcil avant de tenter de comprendre ce que l’elfe lui voulait. Visiblement, ce que la petite innocente comprit était de prendre un verre. Mais… Que pouvait-elle boire? Me’a ne buvait que très rarement et souvent des fruits fermenté, confit par le temps et la maturation. Et même ainsi, là où elle avait souvenir de sa mère rieuse, se délectant des cerises; elle était visiblement plus comme son père, à avoir vite chaud. Mais peut-être que ce n’était là que le résultat du sucre et de l’alcool…

Parfois, Me’a se réveillait avec le rire de sa mère au creux de son oreille. Parfois, elle entendait la voix de son père qui l’appelait. Mais de moins en moins. Les années passaient et même si elle avait des figurines de ses parents, des peintures et gravures… Parfois, il lui semblait revivre une journée à leur côté, quand elle n’avait pas de réel soucis hors son repas du soir. Parfois, elle se souvenait des cours que lui donnait sa mère. Parfois, son odeur de jasmin lui revenait en tête. Parfois, elle avait l’impression d’être de nouveau une enfant qui n’attendait qu’être dorlotée par une adulte. Parfois.

- - - - -


- Je te laisse décider, je ne suis pas très… habituée de ce genre d’établissement…

Sa voix semblait s’excuser alors que l’elfe poursuivait, aussi moqueuse que son sourire - pourtant joli. Morwën la mettait en garde, lui expliquant qu’elle était la proie idéale pour une personne désirant l’égorger. La torturer. La violer. Mais ces mots, si graves, si durs, n’étaient qu’une théorie obscure pour notre amie. Elle comprenait la gravité des situations. Elle n’arrivait pas à comprendre pourquoi on s’en prendrait à elle. Après tout, encore une fois, elle n’était personne. Il était plus logique d’être agressée comme avec cette femme républicaine, celle qui avait une plaie béante sur les côtes. Qu’on la menace pour la forcer à soigner était compréhensible. Pour autre chose cela semblait incohérent et illogique. Le Monde n’était pas si aberrant que cela non?

- Je ne comprends pas vraiment. Enfin. Si je comprends. Mais… il n’y a rien à gagner à me torturer. Je n’ai rien à donner si ce n’est mes soins. Et il n’est pas envisageable que je soigne si j’ai trop peur ou si je ne suis pas en état.

Elle haussa des épaules, cherchant un lien logique qu’elle n’arrivait pas à saisir. Son visage se pencha un peu vers la gauche puis la droite. Son cerveau semblait vraiment réfléchir à comment lier les éléments que l’elfe soulevait. Et malgré sa compréhension, elle n’arrivait pas à comprendre pourquoi on la viserait aussi gratuitement.

- Je ne pense pas être faible.

La fée lâcha la phrase presque innocemment. Elle ne savait pas se battre, à peine lancer des objets. Mais elle volait vite, elle connaissait les forêts et savait vivre seule et sans civilisation. Si vraiment il y avait un danger, elle pouvait fuir. C’était une réaction qui lui convenait. “Si tu ne penses pas survivre, fuis.” De sages mots, que son père lui avait inculqué et qu’elle appliquait dès qu’elle avait un doute. Elle était toujours en vie, son père avait donc raison non?

- Je ne suis pas la fée la plus puissante de tout Sekai. Je ne suis pas la plus intelligente ou cultivée non plus. Mais je ne pense pas que la force se résume juste à cela. Je pense que le plus fort est celui qui sait se préserver.

Elle sourit doucement, la magie se déversant lentement. Son regard sembla se perdre en réflexion, comme si l’elfe avait pointé du doigt un point que Me’a n’avait jamais envisagé. Ce qui était le cas, ne mentons pas. Enfin, de vous à moi, il y a un paquet de sujets auxquelles Me’a n’avait jamais réfléchi.

- Qu’est-ce que la Force pour vous? Y a-t-il des pré-requis? Je veux dire… Pouvez-vous certifier trouver ici, dans cette taverne, tous les êtres “forts” qui soient? Et m’expliquer en quoi ils sont forts?




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La petite fée était timide au possible, adorable presque, si on en oubliait l'aversion évidente de Morwën face à ces manières de petite créature fragile. La main toujours bien confortablement installée dans les siennes, elle la laissait la soigner, plus par intérêt que par réelle volonté de faire la causette avec elle. Mais leur proximité obligeait l'elfe à lui répondre et il valait mieux pour la fée qu'elle se concentre sur ses mots plutôt que son attitude mièvre qui lui filait clairement la nausée. D'un geste de la main, elle commanda deux whisky, échappant un rictus en imaginant la fée goûter cet alcool qui allait très certainement lui retourner le cerveau. Portant de nouveau un regard sur les gestes de la fée qui mettait un temps certain à réparer une simple fracture, Morwën sembla lentement mais sûrement perdre patience. La petite fée allait devoir s'activer si elle ne voulait pas que l'elfe finisse par lui voler dans les plumes. Usant du peu de patience qu'il lui restait, Morwën attendait son verre avec impatience, cherchant là une façon de supporter la compagnie d'une personne aussi rasoir que le bien incarné. L'ancienne elfe qu'elle était aurait sûrement apprécié sa compagnie, mais désormais, elle s'ennuyait vite et espérait des rares personnes à qui elle adressait la parole de lui apporter un peu de distraction.

La fée comprenait, mais restait pourtant à des années-lumière de la réalité du pays dans lequel elle venait de poser le pied. Arrachant un haussement de sourcil à Morwën devant tant de crédulité, elle ne put s'empêcher de soupirer. Comment diable cette petite chose pouvait-elle ignorer une chose pourtant si simple. Ricanant un instant quand Me'a mentionna qu'elle n'avait rien à offrir, Morwën semblait profondément amusée par cette idée. Rien à offrir ? En tant que femme, elle possédait pourtant tout ce que les hommes désiraient.

« Tu penses n'avoir rien à offrir ? Et que penses-tu que les violeurs cherchent ? Ils prennent ce qu'ils désirent, sans se soucier de ta volonté. Ta souffrance, tes cris, ta douleur sont ce qui les attire. Car ne t'y trompes pas petite chose, au Reike, si tu n'es pas en capacité de te défendre, personne ne le fera pour toi. »

Leurs verres leurs furent amenés à l'instant où l'elfe terminait sa phrase. Jetant quelques pièces négligemment sur la table à l'attention du serveur, Morwën leva un regard prédateur sur la petite fée. Si elle avait été de ceux qui tuaient par plaisir, elle aurait sûrement fait d'elle sa proie. Mais voilà, elle avait encore quelques standards et faire pleurer les plus faibles ne faisaient pas partie de ses distractions, pour l'instant. La dague toujours posée bien en évidence sur la table, Morwën poussa le verre de Me'a dans sa direction, lui indiquant d'un geste du visage qu'il était à sa disposition. Portant le sien à ses lèvres, elle en sirota le contenu, tirant une chaise de son pied pour y allonger ses jambes. Quitte à se faire tripoter la main par une caricature de ce que la mignonnerie serait si elle devait être incarnée, autant être confortable. Fouillant un instant dans sa besace, elle en tira ce qui ressemblait à une cigarette roulée. Mais à peine fût elle allumée par son briquet à silex que déjà les effluves qui émanèrent laissèrent deviner que cette cigarette n'avait rien de classique. Soufflant la fumée sans grande vergogne en direction de la fée, Morwën semblait apprécier à la tourmenter légèrement, éprouvant sa patience dans de petits gestes taquins et moqueurs. Les conversations battaient leur plein dans la taverne, les esprits échauffés par l'alcool ayant déjà oublié la mésaventure de l'elfe bagarreuse quand Me'a évoqua une pensée qui sembla mettre d'accord l'elfe. En effet, savoir quand fuir était une force, mais de là à considérer qu'elle était forte, il ne fallait pas non plus pousser mémé dans les orgies.

Avant même qu'elle n'ai le temps de rétorquer que déjà Me'a enchaînait sur une question, cherchant dans la réponse de Morwën une définition toute faite sur laquelle se calquer dans l'espoir de se conformer un peu plus aux standards du pays peut-être ? Question qui arracha un souffle à la brune qui secoua la tête d'un air désapprobateur. De quelle foutue planète sortait cette gamine ? Elle ne pouvait décemment pas avoir traversé le Reike - peu importe d'où elle provienne - en affichant ouvertement sa naïveté de la sorte, c'était tout bonnement impossible.

« Tu dois te moquer de moi, ce n'est pas possible autrement. » Dit-elle après avoir aspiré une longue taffe de son cône de cannabis. Soufflant la fumée par le nez elle reprit. « C'est pourtant évident, regarde. Lui là-bas pourrait te broyer le crâne d'une seule main, c'est un Drakyn. Lui, là bas, je ne laisserai pas une pucelle à ses côtés 1h sans qu'il ne lui ai volé sa virginité de force. Il a beau être un monstre, il est fort. » Parler autant lui donnait soif, alors elle marqua une pause pour boire une gorgée de whisky, incitant Me'a à boire dans le sien d'un mouvement de menton.
« Être fort passe par le fait d'être en capacité de se défendre, mais aussi d'affronter les obstacles. Je ne suis pas ta mère et ne t'apprendrais donc pas comment voler de tes propres ailes petit oiseau, mais gare à toi, certains ne prendront pas le temps de te prévenir. »

Agitant légèrement sa main blessée, elle remarqua qu'elle pouvait de nouveau bouger ses doigts. La fracture semblant quasiment ressoudée, elle n'attendit pas que la fée l'y autorise pour tester toute sa mobilité, serrant le poing afin de juger de toute présence de douleur ou de gêne. Elle avait la fâcheuse tendance d'être mièvre mais sa magie était efficace. Si elle parvenait à éviter les monstres, peut-être aurait-elle un avenir dans ce pays. Mais aux yeux de l'elfe, la fée était perdue d'avance. Bien trop gentille et douce pour une contrée où régnait la peur et la violence. Dévorer ou se faire dévorer, telles étaient les lois du Reike.




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Morgan Law
Désillusion à la Reikoise [Me'a] 91.168.141.37-6271563053769
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Morgan Law
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Dans la catégorie des drakyns géants, piégés dans une auto-suggestion phallique de messieurs aux pénis décidément bien trop courts et ingrats, on demande Morgan.
Morgan ?
Erreur sur la marchandise : le jeune homme n'a jamais vraiment répondu aux critères de force de cette nation sableuse. Si son mètre quatre-vingt quatre trouve du respect chez les godelureaux de la République, à Ikusa, le merdeux dépasse tout juste les biceps de ses congénères reikois. Pas bien costaud non plus : une carrure de boxeur poids moyen, des lignes tracées mais discrètes. Si l'éphèbe devait faire un bras de fer avec un des colosses qui l'entourent, il aurait certainement le bras arraché.

Une capuche jetée sur sa tête, se protégeant du cagnard et des maris mécontents, il avait rendez-vous, et ne devait surtout pas finir en retard. Fatima avait horreur de ça, - et lui, avait horreur de devoir esquiver ses projectiles d'assiettes de porcelaine. Qu'est-ce qu'elle m'réserve encore, celle-là ? qu'il se prend à penser. La lettre avait été signée avec un soin exquis, et la promesse d'une grande fortune. Une quête ? un renseignement ? Ou autre chose ? De tous les surnoms qui traînaient à son endroit, - merdeux, chéri, manouche, salaud - celui du « Chat noir » était le plus récurrent. A cause de sa poisse, sans doute, et de l'inexpugnable arrogance avec laquelle il la combattait.
Ca, et son indépendance.
Même s'il bossait pour Mirari, ces derniers temps, rien ne lui interdisait d'arrondir ses fins de mois d'une autre façon. Quant à ce qui s'était passé dans le repaire Ryssen...
Il préféra ne plus y penser.

Il se planta devant une grosse porte de chêne, d'une petite maisonnette aux briques jaunes, sans ambitions. Avant de toquer. On l'ouvrit, quelques instants plus tard, et ce qui s'ensuivit n'appartenait plus qu'à eux.


*
*    *

Quelque chose approchait.
Quelque chose de massif.

Les soiffards de la taverne le sentaient. Cette chose, quoiqu'elle puisse être, allait mettre un terme à leur petite beuverie tranquille. Dans le jeu de chaîne alimentaire reikoise, on le plaça là. Ca devait être un buffle, pour que le plancher tremble de la sorte, et déjà, un joueur de cartes se recroquevilla sur lui-même, terrorisé. « Tu crois que c'est lui ? », fit l'un. « Ouais, j'pense... », répondit l'autre.
Quarante-trois duels à l'épée longue, quarante-trois victoires. Des bras comme des jambes, et des jambes comme des troncs. Une peau, squameuse, criblée de cicatrices répugnantes. Les femmes, - pour celles qui avaient eu l'audace de se glisser dans ce rade, à l'exception de deux d'entre elles - savaient qu'elles allaient souffrir, si elles auraient l'arrogance de se laisser regarder.

Son prénom ? Chad, le baryonyx, l'arracheur de têtes, le copulateur d'orniphants, l'élagueur de vies, le conspirateur de la mort, et autant d'adjectifs finissant par -eur et ne trouvant naissance que dans le cerveau réduit d'un pervers narcissique atteint de microcéphalie.  « Vous n'êtes tous que des cochons d'Inde », fit-il, grâcieux, suprême.
Et le petit gars derrière, c'était Morgan.

« Eh, l'mastard, tu gênes. J'peux passer ? »

Le drakyn se tourna en direction de la voix qui l'avait alpagué, mais déjà, Morgan s'était faufilé ailleurs, près du comptoir. Et, pour sa peine, le géant traîna un innocent dehors, pour se bagarrer avec lui.

« Morgan Law... » rouspéta le tavernier. « Espèce de rat d'égout, qu'est-ce que t'as encore sur la tête, hein ? »
Le boxeur haussa les sourcils, posant une main, incongrue, sur sa ravissante caboche. Ce qu'il avait, était une petite culotte en dentelles.
« Merde, 'tain, m'disais pas que je l'avais plus vue d'puis un moment, celle-là.
- Un jour, ça va t'crever, sale merdeux.
- Ca va, ça va... tranquillisa-t-il, d'une main lasse. Fais-moi un scotch, plutôt. »

Posant son beau petit cul sur une chaise, il ôta la culotte de sa tête et la fourra dans une poche. Avant de jeter un regard, distrait, sur sa gauche.
Et de s'étouffer dans sa propre salive.

« Morwën !? roh 'tain, c'est dingue, ça. Pis... tu m'suis ou quoi ? Tu sais, si... » Il aurait voulu continuer sa plaisanterie, mais « Morwën », n'était plus tout à fait Morwën, depuis la première fois où il l'avait rencontrée. Qu'est-ce qu'avait dit Aazel à son sujet, déjà ? « ma fille ». Une histoire consanguine, qu'il n'avait pas envie de tirer au clair. Il avait suffisamment d'ennui comme ça.
Au lieu de quoi, son regard s'appesantit sur la petite chose, flanquée aux côtés de l'elfe. Et un fabuleux sourire de fils de pute ourla ses lèvres. Le genre de sourire qui ne laissait que peu de place à l'imagination. Il rapprocha sa chaise des leurs, dans le grincement pénible de ce type au collège, voulant faire copain-copain. Et tendit sa main en direction de Me'a.

« Je m'appelle Morgan », articula-t-il, précautionneusement. « Et toi, joli coeur ? »





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Me'a Gouchik'i
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L’elfette soupirait. Evidemment. C’était une réaction que Me’a semblait attirer. Pourquoi soupirait-elle? Peut-être qu’elle ne comprenait pas assez vite? Que n’avait-elle pas comprit? Qu’avait-elle oublié de saisir? Peut-être qu’il y avait quelque chose qui lui manquait? Était-ce parce qu’elle n’avait pas grandi au Reike? Mais les républicains ne semblaient pas avoir tant de difficultés à communiquer…? Mais que se passait-il de mal?

Morwën sourit et se laissa lui reparler de viol, une nouvelle fois. Et Me’a ne comprenait pas. Personne n’aimait la douleur. Personne ne pouvait vouloir la douleur. Alors pourquoi chercherait-on à l’infliger? Cela ne faisait aucun sens dans l’esprit utopique de la fée. Elle continuait d’y réfléchir, fronçant des sourcils quand l’elfe l’appela “petite chose”. Elle avait déjà sous-entendu qu’elle était faible. Était-ce si blâmable que cela? Était-il si surprenant de trouver un être qui croit en la bonté en chacun?

Un bruit. Le regard de notre petite amie s’abaissa et observa le verre au liquide ambré. Par mimétisme des clients autour d’eux, elle hocha la tête en levant le verre vers elle. Et elle en but une petite gorgée. Une petite avant que sa gorge ne semble brûler sous le feu qu’elle venait d’avaler. Erreur de débutante, elle toussa. Et elle porta une main à sa gorge, le regard écarquillé sous la surprise. Lentement, le feu s’éteignit alors que l’elfe cherchait quelque chose dans sa besace. Me’a observait la femme, cherchant à se concentrer sur autre chose que sa gorge en fusion et la fée se demanda quand l’elfette avait tendu ses jambes et les avait posé sur une chaise. Pourtant, elle n’eut pas le temps de se questionner longuement qu’une fumée blanchâtre arriva devant son visage. Me’a renifla. Et elle détourna un peu le regard en toussant une nouvelle fois, les yeux la piquant et la gorge … quelque chose se passait. Une sorte de fourmilière dans sa gorge, qui semblait gratter… C’était étrange. Et la fée nota qu’elle ne reconnaissait pas cette odeur. Elle huma longuement. Et elle n’eut pas le temps de questionner l’elfe que cette dernière s’énervait.

Elle ne se moquait pas d’elle. Elle n’aurait pas pu se moquer d’elle alors qu’elle était en train de la soigner. Surtout que, au fond, Me’a ne comprit pas pourquoi elle se serait moquer. Et la combattante désigna des personnes qu’elle jaugeait et jugeait “fortes”. Un Drakyn. Un Orc. Et Me’a essaya de comprendre. Elle suivit les gestes de l’elfe, reprenant une gorgée. Elle reprit une gorgée de whisky, grimaça avant de déglutir, un frisson la faisant trembler. Et les doigts de sa patiente remuèrent. Et sa main s’éloigna de la sienne. Et, sous ses yeux, la blessure à peine soignée remua. Le visage de la fée se décomposa. Elle ouvrit les lèvres et tendit la main pour récupérer le membre blessé…

-  Morwën !? roh 'tain, c'est dingue, ça!

Coupée, notre petite fée se laissa attraper le verre à deux mains, tournant le visage pour dévisager le nouvel arrivant. Grand, fin, pourtant sa carrure - cachée d’un grand tissu sombre, semblant orangé par endroit, comme après avoir passé trop de temps dehors - ne semblait faire aucun doute. Le jeune homme était galbé et fort agréable à l’oeil malgré le tissu qui lui couvrait le crâne. Si seulement vous pouviez le voir, avec ce petit sourire… Notre fée verra un sourire plein de joie. Elle ne remarqua pas ce côté pervers qui émanait du sourire. Elle ne vit pas l’éclat mauvais du regard, l’éclat d’une blague où elle était la victime et lui le bourreau.

Me’a buvait quand il se présenta. Morgan. Joli prénom. il s’assit près d’elles, tendit sa main vers la fée. Elle lui sourit. Innocemment, sans se douter un instant qu’il y avait dans ce crâne joliment formé, plus de pensées perverses qu’elle n’a pu en avoir en deux siècles. La fée reposa la verre avec douceur, sans faire de bruit et lui tendit sa main sans se départir de son sempiternel sourire délicat.


Et toi, joli coeur?

La fée rougit un peu sous les jolis mots. Elle ne se demanda pas s’il pensait les mots, s’il ne pouvait pas être un séducteur. Un salaud. Non. La fée accepta le compliment en rougissant, incapable de savoir comment elle devait réagir sous une telle interraction. Alors elle lui offrit une faible poignée, n’essayant nullement de jouer d’une poignée plus ferme ou plus assurée. Non. Elle avait la poigne légère, comme si sa main pouvait se casser si l’inconnu forçait.

- Enchantée Morgan ! Je m’appelle Me’a et suis ravie de vous rencontrer ! Je vous demande juste un instant…

Délaissant sa main, elle reporta son attention vers l’elfe et se leva pour attraper la main blessée. Ses sourcils étaient froncés, son regard faiblement déçu.

- Je n’ai pas fini de vous soigner. On ne retire pas sa main quand un sort de soin est en cours! Ça devrait être appris à tous les enfants… C’est pas possible…

Elle grogna. Maugréa dans une fausse barbe. Elle semblait être boudeuse. Et pourtant, elle prit sur elle et se rassit pour laisser ses mains se remettre à luire vert. Elle soupira faiblement avant de tenter de changer de sujet, maladroitement.

- Vous vous connaissez depuis longtemps? Vous semblez avoir déjà passé du temps ensemble… D’ailleurs… Vous faites quoi dans la vie?




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Désillusion à la reikoise
Ft. Me’a & Morgan
Me'a représentait tout ce que Morwën détestait de près ou de loin. De l'innocence à revendre, des petits sourires mièvres, des joues qui rougissait au premier sourire, tout chez elle lui rappelait ce qui l'avait conduite en enfer. Elle aussi était innocente, avant. Elle aussi avait fait confiance trop facilement, accordant le bénéfice du doute à chaque âme qui vivait dans cette contrée faite de violence et de haine. Et elle avait fini en jouet pour psychopathe. Alors, quand l'elfe remarqua la mine déconfite de la fée qui ne semblait pas assimiler les raisons de ses mises en garde, Morwën ne put s'empêcher de lever les yeux au ciel. De cette façon qu'elle avait de faire comprendre à son interlocuteur qu'il avait le don de l'emmerder profondément, elle secoua légèrement la tête, plantant finalement son regard dans celui de la petite fée. Elle ne voulait pas comprendre, hm ? Et bien Morwën allait lui montrer. Mais dans un premier temps, elle la laissa découvrir le goût et la brûlure offerte par le spiritueux. Les yeux ronds comme des soucoupes, Me'a prenait sa première baffe alcoolisée. Pinçant ses lèvres pour masquer son sourire moqueur, l'elfe avait toujours les pieds sur une chaise, confortablement installée comme si la taverne était celle de sa mère.

Ignorant royalement tous les joyeux enculés qui agitaient la grande salle, Morwën ne manqua pas de remarquer l'armoire à glace qui faisait trembler les murs de la bâtisse. Haut comme un bâtiment saoudien, le fils de pute qui devait sûrement s'appeler Chad faisait l'intéressant, roulant des mécaniques devant les quelques putes qui peuplaient l'auberge. Distraction suffisante pour l'elfe, elle ne put retenir sa profonde envie de l'égorger. Ce genre de grosses merdes faisaient une occupation amusante quand elle les voyait se pisser dessus à l'approche de la lame. Ils avaient en général une bien moins grande gueule quand ils voyaient le couperet de la mort leur planer au dessus du crâne. Mais pour l'heure, elle avait une fée à tourmenter. Reportant son attention sur Me'a qui oscillait entre volonté de la soigner et envie de gerber tant l'alcool était fort, Morwën poussa vers elle son adorable petit verre d'eau avec lequel elle était arrivée. Après tout, si elle gerbait maintenant, où serait l'amusement ? Non, il fallait prendre soin de cette petite fée si elle voulait qu'elle continue de la distraire de sa mièvrerie. Posant lourdement son verre sur l'épaisse table de bois, elle se pencha légèrement vers Me'a, attrapant le bas de sa chemise comme si elle s'apprêtait à la remonter.

« Sache petite créature qu'ici, la faiblesse est punie. Si tu fais trop confiance, voilà ce qu'il risque de t'arriver. »

Découvrant son ventre, elle lui dévoila les cicatrices qui le bardaient. Un gros lambeau de peau semblait avoir été ôté, créant une cicatrice rectangulaire quasi parfaite qui était bordée de nombreuses entailles précises, chirurgicales. Un grand 7 avait été gravé dans sa peau, partant de sa hanche pour remonter jusqu'à sa poitrine. Montrant seulement une partie de sa peau lacérée, elle avait laissé sa main aux soins de la fée, mais bientôt, elle commença à bouger ses doigts. Son décolleté, toujours aussi indifféremment affiché, la petite fée pouvait voir qu'il n'avait pas été épargné, lui aussi bardé de cicatrices du même acabit que celles qui décoraient son ventre. Lui épargnant la vue de son dos brûlé, elle ne tarda pas à se rasseoir dans sa chaise confortablement, sondant son visage à la recherche d'une réaction. La petite fée devrait sûrement comprendre désormais.

Alors, lorsqu'elle retira sa main pour tenter de mesurer son état de fonctionnement, Me'a sembla s'agacer mais fut coupée par l'arrivée de l'Adonis préféré de ces dames, le fameux trousseur de godiches mariées. Sa main semblait fonctionner, pourtant Me'a n'était pas du même avis et c'est quand une voix familière se fit entendre, hélant l'elfe, qu'elle tourna la tête. Seulement pour voir l'avorton, roulant des mécaniques à la vue de la petite fée. Il n'avait pas changé d'un iota, offrant sourires enjôleurs à qui voulait bien le regarder, il s'approcha de la chaise sur laquelle Morwën avait ses pieds. Les retirant juste avant qu'il ne s'en saisisse, l'elfe le regarda s'installer, dévorant du regard la petite créature plantureuse.

« Morgan. Je vais finir par croire que c'est toi qui me suit. Installe-toi, je t'en prie. » Dit-elle, moqueuse. Mais déjà, le gamin reportait toute son attention sur la fée, lorgnant avidement sur le décolleté que celle-ci affichait, Morwën ne put retenir un sourire. Elle n'allait sûrement pas rester innocente très longtemps avec cet enculé dans les parages.

Demandant un instant à leur nouvel invité, Me'a se leva de toute sa stature de mini-pouce pour la dévisager. À la manière d'un nain ou d'une enfant, elle tentait de lui démontrer de toute sa hauteur qu'elle était agacée. Mais quand on rasait le sol, difficile d'impressionner qui que ce soit. S'adoucissant légèrement, elle feint une petite moue désolée, usant de toute sa capacité pour mimer un air innocent. Ses yeux ne mentaient pas, eux, elle n'était pas désolée. Seulement intéressée par cette facette que la fée venait de lui montrer. Esquissant un sourire en coin devant la rebuffade de la petite créature, Morwën semblait amusée, impressionnée même. Finalement elle avait du mordant. Sa main de nouveau dans les mimines de la fée, Morwën attrapa son cône de cannabis pour fumer dessus, soufflant désormais sa fumée en l'air. D'un geste de la main, elle tendit la cigarette magique en direction de Me'a, un petit sourire malicieux aux lèvres.

« Tiens, ça devrait te détendre. »

Laissant bien sagement sa main au creux de celles de Me'a, Morwën reporta son attention sur l'avorton qui déballait déjà le grand jeu pour tenter de la séduire. Les choses allaient finalement devenir intéressantes. Râlant devant l'attitude désinvolte de sa patiente, Me'a provoqua inconsciemment un tant soit peu plus de respect de la part de l'elfe qui semblait apprécier qu'elle la sermonne. Brave petite. À sa question sensée briser la glace, Morwën porta un instant son regard sur le visage du gamin, c'est vrai qu'il était plaisant à regarder. Loin de nier la beauté sauvage dont faisait preuve l'éphèbe, l'elfe laissa son regard divaguer jusqu'à la fée et ses joues rosies par le compliment de Morgan.

« On ne se connaît pas bien, non. Mais ça pourrait changer, n'est-ce pas Morgan ? » Elle lui adressa alors un petit sourire entendu, de ces sourires qui ne voulaient pas dire grand chose quand on ne parlait pas le langage du stupre. Portant de nouveau son verre à ses lèvres, elle fit signe à la fée d'un mouvement de la tête de donner le cône à leur nouvel invité, quand après avoir allègrement toussé, elle tenta de le lui rendre. L'esprit échauffé par le whisky et la beuh, Morwën semblait apprécier la tournure que prenait cette soirée, non seulement parce qu'elle avait l'opportunité de dévoyer une petite créature innocente, mais aussi parce qu'avec l'éphèbe dans la partie, les choses promettaient d'être bien plus amusantes. Les joues encore fardées de rose, Me'a continuait sa besogne, laissant sa magie irradier la main blessée de sa patiente. Posant un regard sur l'avorton, elle avait volontairement éludé la question sur son emploi du temps. Après tout, mieux valait éviter lui dire à quoi elle passait ses journées, elle ne le supporterait probablement pas. Alors, dans une tentative de détourner l'attention, Morwën observa Morgan avant de dire.

« Oui Morgan, à quoi passes-tu tes journées ? Racontes-nous, nous sommes curieuses. »




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Morgan Law
Désillusion à la Reikoise [Me'a] 91.168.141.37-6271563053769
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Morgan Law
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Désillusion à la reikoise


Me'a représentait tout ce que Morgan appréciait, de près ou de loin. Petite de taille, - ça lui était pénible de lever la tête, pendant un baiser - une silhouette en sablier, des dents superbement alignées et de jolis yeux bleus. Il n'avait pas cessé de la regarder, même lorsqu'ils finirent de se serrer la main. Et son rictus s'étira, un peu plus, dénudant la pointe de ses canines. C'est qu'il les avait longues ! libre à la fée de croire en la bonté de l'âme humaine, au lendemain joyeux et aux valkyries pudiques : ce sale gosse avait le vice cloué sur son beau visage, et il n'y avait pas besoin d'être un fin détective pour le deviner.

« « Me'a » ? », s'enquit-il. « Chouette prénom, j'aime bien. » avec la probité d'un vendeur de machines à laver. Des joues rondes et de grands yeux noirs : Morgan donnait l'impression qu'on avait vissé une tête de femme, sur un corps de hooligan. Malgré ses vêtements amples, on devinait, chez lui, plusieurs années de baroud à travers le désert. Ses gestes étaient lâches, maîtrisés. Sa gestuelle, méthodique. Suffisamment pour envoyer, d'une pichenette, la pièce de son whisky au creux de la monde du tavernier. « Alors, d'quoi vous parliez, avant que j'débarque ? »

Des histoires de guérison. Il sembla que l'elfe s'était cassé la main, en tapant un mur, ou quelque chose ressemblant à un mur. Une notion abstraite, dans une ville où les trois quarts des habitants surplombaient le jeune homme en taille.
Pour le reste, il ne fut pas surpris.
Cette espèce de foldingue avait bien failli les faire tuer, l'autre fois. La voir dans c'te taverne me dit rien qui vaille. Ca va dégénérer, à tous les coups... Certains historiens, exemptés du moindre sens éthique, pourraient dire que c'était Morgan, qui avait failli faire tuer Morwën, lors de leur première rencontre. Que c'était lui, qui l'avait manipulée, pour la retourner contre les assassins de la Main noire, afin de s'en tirer à bon compte.
Mais cette théorie est quelque peu farfelue, vous ne croyez pas ?

Oui Morgan, à quoi passes-tu tes journées ? Raconte-nous, nous sommes curieuses.
Il battit des paupières, tiré de ses pensées. « Mes journées ? bah, toutes sortes de choses. J'aide des copains, par-ci par-là. J'viens en aide à ceux qui sont dans l'besoin... » (un bon petit gars, en l'espèce. il fallait voir avec quelle relâche il alignait son emploi du temps: c'était celle d'un type honnête) « Ca m'arrive aussi d'boire un coup, mais pas trop. L'alcool, c'est mauvais pour les sens. »

L'habit ne faisait pas le moine, décidément. Ce fripon fringué comme un as, ne serait-il finalement que le bon gars du coin ? celui qui respecte les femmes, leur ouvre la marche, et aide ses amis en situation difficile ? Il se releva, terminant son scotch, d'une traite, avant de s'approcher, à pas de loup, de la fée. « Mais, y a d'autres trucs que j'aime bien faire, pour êt' honnête. » Sans attendre, il pinça la capuche de la demoiselle, à bout de doigts, avant de la lui ôter. Puis, il retourna sa chaise, de sorte qu'elle à ce qu'elle demeure face à lui, et se pencha, susurrant : « Comme par exemple, m'renseigner sur les nouveaux arrivants, et arrivantes. T'as bien choisi ta vocation, toi, tu sais ? ton visage est un vrai remède. Ca t'dirait qu'un de ces quatre, on s'boit un verre ? » A mesure qu'il parlait, son visage se rapprochait du sien. Des pommettes saillantes, un sourire de Victoria Secret. Des dents blanches, blanches... ! qui claquèrent, à deux centimètres de ses lèvres. « Promis, j'serai tendre. J'ai plein d'trucs à t'raconter, à propos de c'te ville. Mh ? »

Le tavernier roula des yeux, exaspéré. Combien de fois avait-il vu le Merdeux procéder à son petit numéro ? - trop de fois. Suffisamment pour qu'il en vînt à le cacher dans des tonneaux vides, le temps que les maris de femmes comblées s'en aillent. Mais, avec sa jolie gueule, il était difficile de lui en vouloir. Il y avait quelque chose de réjouissant, dans sa manière d'être. Une bonhomie, qui crevait la brouille sombre de la dépression. Quand vous vous leviez le matin, avec la gueule de bois et le foie déchiré, il souriait. Quand vous n'aviez dormi que deux heures et demi, les cheveux en pétard, il souriait. Et quand le blues de l'après-midi vous frappait de plein fouet, il souriait, encore. L'adage voulait que les personnes les plus joyeuses s'avéreraient être, en réalité,  les plus tristes.
Morgan devait être au bord du suicide.

Il finit par se redresser. « Le Reike, c'est un pays dangereux. M'est avis que tu d'vrais t'trouver quelqu'un, pour te protéger. Simple suggestion. Ca grouille d'salauds et d'violeurs... » il épousseta son gilet. Un tic, plus qu'autre chose. « C'est comme ça que j'ai rencontré Morwën, d'ailleurs. Elle avait quelques pépins avec des lascars d'la pire espèce, pis, je l'ai tiré d'affaire, quoi. Et toi, 'vec ton visage d'ange... j'te donne pas deux s'maines. » Prononcer cette phrase n'était pas assez, non : il fallait qu'il saisisse ledit visage. Sa poigne était douce, mais ferme, sans compromis. Et il fit pivoter avec précaution son cartilage étroit, comme on l'eut fait pour inspecter un quartier de viande. « Nan, une s'maine, en fait. T'as vu ça, Morwën ? avoue, même toi t'hésites à la kidnapper, hé-hé... Y aurait d'quoi s'faire un beau bénef', au marché noir. - J'rigole, va. J'ai horreur de l'esclavage. »




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Me'a Gouchik'i
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- Sache petite créature qu'ici, la faiblesse est punie.

Mais ! Mais pourquoi est-ce que cet elfe continuait de lui envoyer des piques sur sa faiblesse? Pourquoi est-ce qu’elle fixe sur cette notion? Était-ce normal dans ce pays que d’être obsédé par la force et mépriser la faiblesse? Depuis quand était-il grave ou honteux d’être faible? Comment on pouvait être si… persuadé d’un truc sans le savoir? Depuis quand être faible était une tare? Il était facile de déterminer qui était le plus fort entre un Drakyn et une Fée. Cela voulait-il dire qu’une Fée perdrait indubitablement contre le dragon? Non. Il y avait tant à prendre en compte. L’état mental, physique, l’épuisement… La ruse aussi. Non, définitivement, une Fée pouvait 1v1 un Drakyn.

Pourtant… Pourtant Me’a avait attrapé le verre d’eau que lui avait tendu l’elfe, hochant de la tête pour la remercier et en boire une longue gorgée. Le feu s’amenuisa. Sa gorge semblait revivre. Un soupir de satisfaction s’était laissé entendre. Me’a avait semblé se détendre avant d’offrir une image d’elle surprise, interloquée. Pourquoi l’elfe semblait-elle prête à retirer son haut? Avait-elle une douleur qu’elle désirait soigner?

- Si tu fais trop confiance, voilà ce qu'il risque de t'arriver.

La fée avait reposé son verre quand Morwën, elle, avait levé et découvert son ventre. Le regard de la petite ailée s’était abaissé. Son regard sembla se glacer. Son sourire se figea et son soin diminua de moitié. Centimètre par centimètre, elle détailla le tableau qu’elle voyait. Elle suivit chaque ligne, observant l’état des cicatrices et la profondeur de certaines d’entre elles. Deux grosses lignes semblaient traverser son corps de part et d’autre. Me’a ne comprit pas de suite ce qu’elle voyait. Me’a ne voulait pas comprendre ce qu’elle voyait. Son cerveau semblait ne pas vouloir transmettre la moindre information si ce n’est la gravité de la scène.

Sa vision s’était floutée progressivement. Des larmes avaient couler. Lentement, le regard rougissant, sans bruit, la fée avait versé quelques larmes sous les ruines d’une douleur qu’elle observait. Remercions le petite bellâtre qui arriva avant qu’elle ne fonde complètement en larme. D’un rapide coup de main, elle avait séché ses larmes avant de reprendre son soin après avoir grondé l’elfette. Peut-être que finalement, elle n’était pas à sa place ici? Si une demoiselle comme elle avait vécu un truc si atroce… Peut-être qu’elle ne devrait pas s’installer au Reike…?

Et le nouvel arrivant eu cet éclat salvateur. Il ramena l’elfette sur lui et permit à notre petite fée de se reconcentrer un minimum. Oublier ces cicatrices qu’elle n’arrivera pas à vraiment oublier. Morwën semblait regretter, un peu. Elle lui tendit une cigarette. Celle qui sentait étrange. Me’a essaya. Elle aspira un peu de fumée et l’avala, tentant de mimer ce qu’elle avait pu voir de Morwën. Une nouvelle fois, elle toussa. Elle toussa longuement, bloquant ses lèvres pour étouffer le bruit. Les larmes se remirent à couler sous la fumée qui ne semblait pas être si douce que ça.

- Ça fait toujours ça la première fois!

L’oreille féérique entendit une voix grave commenter sa toux. Et elle ne comprenait pas pourquoi elle toussait tant alors que Morwën ne semblait pas affectée. Elle retenta. Une nouvelle fumée entra dans sa gorge suivie d’une nouvelle toux. Gustativement ce n’était pas immonde. Mais cette douleur, ce picotement dans la gorge! Il y avait sûrement d’autres manières de consommer sans tout ça non? Ah et ses yeux qui piquaient! Non vraiment, ce n’était pas adorable. Pourquoi prenait-on cela? Décidément, le Monde faisait des choses bizarres.

Mowën recentra la discussion en demandant au nouveau ce qu’il faisait de ses journées. Et lui, visiblement, souhaitait être près de la petite fée. Il s’assit avec l’aisance et les déplacements félins, sortant une piécette de cuivre qu’il lança avec rapidité. La fée observa la trajectoire et son regard finit dans la main du brasseur. Me’a s’arrêta sur le mouvement. Il avait visé? La main? Si loin? Était-ce seulement possible? Non. C’était forcément un coup de chance! On pouvait pas viser vraiment la main de quelqu’un qui était à l’autre bout de la pièce! Si?

Il lui fallut quelques minutes pour raconter l’histoire de la main cassée, réfléchissant au lancer qu’elle avait pu voir. Elle avait du mal à se dire que c’était possible. Pourtant, le tavernier ayant l’air de le connaître… Elle en vint à se dire qu’il était peut-être un habitué et qu’il y a eu un millier de pièces lancées et loupées… Oui cette idée était bien plus rassurante. Plus réaliste qu’un simple coup de chance. Oui. Voilà. Le jeune homme était un habitué qui avait rôdé son coup. Et puis, il n’avait l’air si dangereux. Il avait l’air d’aimer aider les autres, comme elle; d’aller vers ceux qui sont dans le besoin. Comme elle! Il ne pouvait pas être mauvais !

Même s’il a parlé de l’alcool en détaillant pourquoi il n’en buvait pas “trop”, il avale d’un coup son verre ambré. Me’a trouva cela étrange. Elle même ne buvait pas et il lui semblait que l’ambre lui brûlait la gorge. Par quel miracle pouvait-il boire si vite un contenant si fort sans avoir de réaction? Il n’avait pas l’air d’être un mauvais bourgre… Même s’il était plutôt proche et à l’aise avec autrui. Sans gêne dirons d’autres. Le pas vif, prédateur, il se rapprocha de la fée qui venait de reprendre le verre de whisky. Elle bégaya de le voir si proche.

Et il parla. D’une voix suave, hypnotisante. Il se rapprocha. Il lui fit l’impression d’être un boa et d’être en train de se rapprocher d’elle pour l’entourer. Instinctivement, la petite fée papillonna du regard, se tassa sur elle-même. Et il se laissa retirer la cape de notre amie. En cet instant, Me’a lâcha un cri de surprise, cherchant à rattraper le tissu sans avoir la vitesse ni les réflexes pour. En cet instant, elle ne réalisa pas qu’elle avait arrêté de soigner ni qu’elle détonnait avec l’ambiance. Une couronne de fleurs trônait sur son crâne, aussi vives et pétillantes qu’une fleur venant d’être coupée, une peau aussi blanche qu’une porcelaine et un visage parfaitement délicat. Certains regards se tournèrent vers la tablée. La petite était brune, d’un éclat noisette qui apportait presque l’odeur du printemps. De frêles épaules, un collier à gemme écarlate, des formes plus que généreuses dans une robe à col carré… Relevez dont vos yeux!

Regardez la papillonner du regard, déboussolée. Regardez moi ce petit lapin reculer progressivement sous le renard qui se rapprochait. Son coeur s’emballa, sa voix mielleuse se rapprocha, son souffle aussi… Elle cherchait à s’éloigner de lui. Il s’imposait à elle et elle ne savait pas quoi répondre, quoi faire… La fée observait ses dents, si blanches, si longues… Et il claqua sa mâchoire. Elle aspira un peu d’air par réflexe avant de lever sa main pour cacher ses lèvres et étouffer un cri. Elle avait le regard écarquillé, son équilibre semblait précaire. Son dos recula un peu plus et elle sentit son corps se pencher en arrière. La fée écarquilla un peu plus les yeux, ses lèvres formant un “Oh” silencieux. La seconde d’après, son dos cognait le sol.

Elle vit le bras de Morgan s’avancer vers elle. La fée sourit de le voir avant de sentir son corps réagir de lui-même. Par une habitude non maîtrisée, Me’a laissa ses ailes, fines, trahissant ses origines féériques, se déployer. Elles papillonnèrent un peu, l’élevant faiblement pour qu’elle se laisse épousseter sa longue robe cintrée. Rapidement, elle reposa ses pieds au sol avant de se redresser comme si de rien n’était. Elle ne comprenait pas tout ce qu’il lui avait dit. Il avait l’air de la trouver mignon. C’était plutôt gentil. Mais la fée avait perdu le fil.

Et il s’éloigna d’elle pour reprendre. Instinctivement, elle recula d’un pas vers l’elfe, par gêne de le voir si près. Pourtant, elle soupira quand il reprit. Encore cette histoire de violeurs… Il la compare avec Morwën et les cicatrices lui revinrent en tête. Elle frissonna. Visiblement, elle semblait intégrer ces images atroces. Et Morgan ne semblait pas vouloir la laisser. Il attrapa son visage et le fait pivoter, la détaillant sans que l’ailée ne comprenne.

- Le viol est-il si commun ici pour que vous m’en parliez si facilement? N’y a-t-il qu’être futiles et fourbes? Je ne comprends pas. Personne ne peut me retirer une liberté acquise non? N’avez-vous pas des lois? Des obligations? Les Reikois sont-ils des primates brutaux tel qu’on peut les dépeindre ailleurs?

Elle soupira une nouvelle fois avant de copier Morwën et terminer son verre d’une traite. Une nouvelle fois encore, elle toussa.

- Je ne comprends pas pourquoi vous êtes si … violents. Entre vous, vous faites bien ce que vous voulez. Moi, je veux juste vous soignez. Réparer vos membres casser, retirer des malédictions… Pourquoi devrais-je me sécuriser comme si j’étais une personne influente? Je n’ai rien fais, embêté personne. Ce n’est pas logique de faire comme ça…

Elle attrapa sa chaise pour s’asseoir, un peu plus rapprochée de Morwën. Il lui semblait avoir un peu plus chaud qu’à l’accoutumée. Le corps de Me’a était doucement plus lourd.

- Ce serait quoi, les bénéfices à me vendre? Si vous deviez me vendre, vous argumenteriez ça comment?




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Désillusion à la Reikoise
Ft. Me’a & Morgan
Morwën avait une certaine façon de mettre les gens à l'aise. Entre l'exhibition de ses cicatrices qui feraient pâlir n'importe quel soigneur qui n'avait pas été choisi pour ses capacités à taire ce qu'il voyait, ses mots dénués de toute bienveillance et ses manières douteuses, elle était d'une compagnie tout à fait charmante. Non sans manquer les regards terrifiés que la pauvre petite créature lui lançait à mesure qu'elle détaillait ses cicatrices, Morwën fut contrainte d'abandonner ses enseignements quand l'éphèbe se lança dans une parade digne du plus beau des paon. La créature avait calmé sa gorge agressée par le spiritueux puis par la fumée avec son verre d’eau, regardant la scène se dérouler sous ses yeux d’un air de plus en plus paniqué. Ses yeux, ronds comme des billes témoignaient de toute l’incompréhension qui s’emparrait de son petit visage rougissant, elle était mal à l’aise.

Toute personne extérieure à la scène aurait pu croire que l’éphèbe venait au secours de la pauvre petite fée. Après tout, avec son visage d'ange et son sourire en coin, il ne pouvait pas être bien dangereux, si ?
Dans les yeux de l'elfe, le louveteau n'était pas un danger, mais pour la pauvre petite fée innocente, la situation en était toute autre. Après avoir allègrement toussé, Me'a fut soudainement approchée par la parade nuptiale du loup. Toutes canines dehors, le con lui sortait son grand jeu, se faisant parfois passer pour un gentleman, il affichait cependant parfaitement ses intentions dans sa façon de se rapprocher d’elle.

Un enchaînement de roucoulements et de regards aguicheurs qui provoquèrent chez l'elfe la même réaction que celle qu'eut le tavernier. Là, assise au premier rang pour observer l'étrangeté de cette scène, elle resta muette. Roulant des yeux allègrement, elle laissa la pauvre Me'a patauger dans cet océan de roucoulements qu’était devenu son échange avec Morgan. Là, assise bien confortablement dans sa chaise, Morwën observait la scène sans en rater une miette. La malheureuse petite créature fut bientôt acculée au point d’en oublier que son siège avait une fin, lâchant au passage le cône de marijuana qui vint s’écraser sur le sol. Tombant de sa chaise, Me’a fut contrainte de déployer ses petites ailes (trop pipoues) de fée pour se rattraper, provoquant par la même occasion les regards intéressés de toute l’assemblée. C’était donc une fée.
Le sourire de l’elfe ne l’avait pas quittée alors qu’elle détaillait la petite couronne de fleur adorable que Me’a portait. Soudain, tout prit sens, sa mièvrerie, son incapacité à comprendre la réalité du monde dans lequel ils vivaient. Elle devait être étrangère au monde, avoir grandi dans la forêt en autarcie sans jamais être confrontée au Sekai.
Morwën eut un de ces mouvements de menton qui en disaient long, elle comprenait beaucoup mieux désormais. Elle comprenait sa mièvrerie, sa naïveté et son côté mielleux au possible. Elle n’était pas demeurée, juste une fée.

Alors, quand elle la vit se rapprocher d’elle, jetant quelques regards paniqués dans sa direction, Morwën comprit qu’elle avait besoin de son intervention. Usant de sa main fraîchement soignée pour tirer la chaise de la petite fée dans sa direction. Lui offrant la protection de sa présence, elle posa finalement sa main sur la dague, levant ses yeux de glace vers le malandrin qui tourmentait sa soigneuse. Son sourire s’étirant sur ses quenottes immaculées, elle lui adressa une œillade menaçante qui se mêlait à son air taquin.

« Morgan, arrête de tourmenter ma soigneuse, veux-tu ? Tu lui fais peur. Calme-toi donc et pose ton cul sur une chaise avant qu’elle ne reparte d’où elle est venue sans avoir eu la chance de goûter à l’hospitalité Reikoise. »

Une fois sa tirade terminée, l’elfe qui n’avait pas pour habitude de parler autant rangea la dague dans le fourreau solidement noué à sa cuisse. Attrapant son verre pour le descendre d’une traite, elle le posa lourdement sur la table, indiquant d’un signe de main distrait au serveur de leur remettre une tournée. À peine eut-elle fait le geste qu’elle se tourna vers la petite fée, dont les ailes étaient désormais sagement rangées dans son dos. D’un regard bien plus “sympathique” - si ce terme existait encore pour l’elfe - elle demanda confirmation à la petite créature.

« Ignore-le s’il te met mal à l’aise, je te protège. » Dit-elle d’une voix presque maternelle, posant sa main à moitié soignée sur son épaule. Elle ne comptait pas la laisser terminer son soin, en témoignait ses doigts qu’elle bougeait comme si de rien était. Le résultat était suffisant à ses yeux, lui offrant une mobilité qu’elle n’aurait normalement obtenue qu’après plusieurs semaines. « Qu’est-ce que tu veux boire petite chose ? » Demanda-t elle, d’une voix douce qui ne lui ressemblait pas (plus) vraiment.

Ses mots semblaient avoir retrouvé leur douceur d’antan, vestige de quelques souvenirs de sa bienveillance passée ou plutôt conscience du malaise de sa distraction de la soirée, elle tentait de la rassurer, espérant qu’elle ne décide pas de fuir la taverne trop rapidement. La petite fée ne manqua pas de lui demander quelque chose d’autre, sous-entendant que le whisky n’était pas à son goût. Logique, si on repensait à ses origines, sa petite couronne de fleurs et son air innocent. L’elfe tourna légèrement la tête pour demander au serveur qui passait là un cocktail quelconque, majoritairement fait de fruits qui cacheraient bien le goût de l’alcool. Après tout, aucun intérêt à ce qu’elle vomisse, il fallait qu’elle prenne soin de sa petite fée.

Tournant de nouveau la tête vers la scène plus que cocasse qui trouvait place devant elle, elle n’hésita pas à se mettre à l’aise, étirant ses jambes sous la table en gardant les yeux rivés sur l’étrange duo que formaient le loup et la libellule. Cette soirée allait définitivement être intéressante, si intéressante qu’elle en oublia même sa cigarette aux plantes relaxantes, qui ne manquaient pas de faire effet sur la petite fée dont les yeux se teintaient peu à peu de rouge. Vraiment, cette soirée promettait d’être très intéressante. Omettant les questions de la petite fée, Morwën n'était plus d'humeur à la traumatiser, Morgan s'en chargeait bien assez pour elle. Alors, elle se contentait d'observer, en retrait, un sourire amusé scotché sur les lèvres.



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Morgan Law
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Il avait bien essayé de la rattraper avant qu'elle ne tombe, mais à quoi bon ? elle était si petite, que la course du haut jusqu'au bas, ne devait pas être si douloureuse que ça. Et lorsqu'elle se redressa, il aperçut ses ailes, avec un regard franchement étonné. Il avait vu toutes sortes de créatures, durant sa pérégrination dans les terres de Shoumei. Mais les fées restaient des mets rares. Et, d'ordinaire, autrement plus petites. « Raison d'plus... », pensa-t-il, à  voix haute. Rares, et donc, chers. Tout ce qui ne se trouvait pas facilement avait de la valeur, sur le marché. Pour son plus grand désarroi, Morgan s'imaginait déjà la petite demoiselle avec une chaîne autour du cou, et maugréa. Raison d'plus... répéta-t-il, intérieurement.

« Tu veux que j'te dise, ma grande ? t'as bien raison. Y a aucune valeur, aucune morale, aucun sens, à c'qu'on te dérobe de ton 'tit monde, pour t'vendre tel du bétail sur l'marché. Et n'écoute pas ceux qui t'diront l'contraire : c'est juste des types que c'monde a rendu aussi noir et pétri qu'une racine pourrie. » Des métaphores végétales : c'était une fée, non ? elle allait forcément comprendre. « J'pense pas que c'genre de personnes font ça par souci d'bon-sens, nan. Une fois, j'ai d'mandé... »

Il restait debout, et son regard s'était perdu, quelque part, dans le plafond, comme s'il y avait débusqué un objet formidablement intéressant. « J'ai d'mandé au type qui m'commandait, quand j'étais esclave, pourquoi y f'sait ça. J'veux dire... économiquement, pourquoi pas ? un troupeau, bien géré, ça rapporte du blé. Tu l'tonds, pis tu l'vends; tu les fais s'reproduire, et rebelote. On pourrait s'dire qu'à force, à force... c'est dev'nu une activité ordinaire. Les gens prennent pas conscience qu'c'est mal; pas tant que ça leur arrive. »

Il arracha son regard du plafond, pour le poser sur la mistinguette. Et de nouveau, se pencha, sans la moindre concupiscence, cependant. « Mais y en a, tu vois, c'est différent. L'gars qui s'occupait d'moi, y prenait du plaisir à l'faire. Y l'avait conscience que c'était mal; j'peux t'dire qu'y bandait, quand y cognait sa bite dans l'ventre d'une ado. Alors, j'lui ai demandé. Et y m'a répondu quoi ? y m'a répondu... » Il dresse un doigt docte, ses yeux arrimés à ceux d'en face, et dans un sourire lointain, termina : « ... parce qu'il en avait l'pouvoir. »

Il commençait à faire les cent pas, devant les deux demoiselles. Plus important que sa jolie gueule : sa tchatche. Morgan Law n'était pas simplement une statue d'art moderne, une belle bouille plantée sur un corps véloce, bon à appâter les gonzesses. Il vivait, et vivait bien; il méditait chaque seconde de son existence, dans une sincérité émouvante. Si émouvante, qu'en fait, il devenait peu à peu aberrant d'imaginer qu'un monstre aussi noir que Calamité puisse y vivre.

« Et c'est ça, l'propos. C'est pour ça qu'les gens violent, dans toute la déraison du monde. C'pour ça, que les gens égorgent, dans les ruelles, sans l'moindre intérêt financier derrière. Qu'y t'foutent des coups d'fouet, quand y en a pas b'soin, et qu'y clouent les gens à l'entrée d'la ville. « Pour donner l'exemple » ? Naan, conneries : parce qu'y 'en ont l'pouvoir ! Y a quelque chose d'primal, de réjouissant, d'déconstruire un type, d'voir son 'tit monde s'effondrer quand tu l'bats. Tu t'sens démiurge. Dieu, voilà ! »

Un sourire de fripon éclaira son visage, dénudant, de plus belle, ses deux quenottes acérées. « Quand t'veux construire que'que chose, tu t'rends compte, très vite, que t'es humain. Faillible. T'échoues, et tu r'commences; t'échoues, et tu r'commences; t'échoues... Mais détruire comme l'fait Dieu, c'est facile. BAM !! »

Il avait tapé dans ses mains, avec suffisamment de force pour que quelques regards, avinés, se tournent vers lui. Avant de retourner à leurs occupations. « Un coup, un seul... et tout bascule. Un coup, un seul, et tu créé, t'inventes un nouveau monde. Un monde d'viol et de terreur. Finalement, c'qu'y faudrait combattre, c'est ça. C'est l'hubris. Qu'les gens arrêtent de s'prendre pour des dieux, et qu'y 's' oublient pas qu'dix minutes par jour, y s'assoient dans les buissons pour chier. Bref. Un conseil : le jour où ça t'tombe d'ssus, t'interroges pas sur les causes. Interroge-toi plutôt sur les conséquences. Du genre... un 'tit couteau enfouie dans ta botte. Ou un bague empoisonnée. Sinon... »

Il regagna le comptoir, et commanda un second whisky, pour sa peine. Avant de pivoter, entièrement, en direction de Morwën. Non, il n'avait pas oublié Morwën.
Certainement pas.

« Dis donc, Cruella, t'as pas l'impression de t'fout' de la gueule du monde, par hasard ? tu crois protéger qui, hein ? » Il n'était pas spécifiquement virulent. Il aurait pu l'être, mais se contentait d'éructer, son verre en main. « Qu'tu saches, 'tite fée. C'te nana, là, (il pointa l'elfe du doigt) j'l'ai tiré d'affaire, elle et son « papounet », parce qu'elle a été incapable de ret'nir son glaviot d'sa bouche. Elle a craché sur l'visage d'un type, sur qui y fallait pas cracher, et résultat, elle a mis tout l'monde en danger. »

Il claqua son verre sur le zinc, sans force, et se redressa, braquant ses yeux sombres dans ceux de la magicienne. « J'ai pas oublié, tu sais ? t'as d'la chance qu'on s'en soit tous sortis indemnes. Parce que dans l'cas contraire, pas sûr que Calamité t'aurait permise de t'rasseoir sur une chaise pendant un bon moment. 'fin merde, putain d'Dieu, branche ta caf'tière ! tu vas lui apporter plus de mal qu'aut' chose, à celle-là. »

Puis, mu par la même soudaineté qu'il l'avait fait se lever, il se rassit, et secoua la tête, dépité. Mais dépité, moins à cause des deux demoiselles, que du monde en lui-même. Le dénuder de la sorte n'était jamais bon; maintenant, il savait à quel point chacun de ses sourires sonnait faux. A quel point se lever chaque matin, sans se suggérer les six mètres qui séparaient sa fenêtre du sol, était difficile. « S'tu veux une astuce, 'tite fée, t'poses pas trop d'questions. Après... t'as comme des envies de boire l'eau des chiottes. »
Il se rendit à quel point il était laid.





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Me'a Gouchik'i
Désillusion à la Reikoise [Me'a] V6tv
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Citoyen de La République
Me'a Gouchik'i
Citoyen de La République
Désillusion à la Reikoise
Feat. Morwën R. Cilwaen


Il y eut un moment de blanc. Un moment où Me’a aurait pu entendre une mouche voler… si les clients de la taverne avaient pu disparaître… L’elfe semblait plus douce. Elle ne comprenait pas pourquoi. Il lui semblait pourtant que la situation n’avait pas tant changé que cela. Hors Morgan qui s’était approché trop près et trop rapidement… La fée ne voyait pas en quoi cela pouvait changer les choses. Mais si l’elfe était moins hostile, pourquoi la fée s’en ferait-elle? C’était plutôt une bonne chose, n’est-ce pas?

La fée entendit la protection que sa nouvelle “amie” lui offrait. Et, à voir l’humain avec elles, Me’a ne semblait avoir envie d’opposition à avoir un peu d’aide… Elle hocha faiblement de la tête, ignorant à quel point cet humain désirait se rapprocher d’elle. Même si au fond, cela raisonner trop avec ce qu’ils lui avaient tous deux dit… Avait-elle vraiment besoin d’aide? Non, la vraie question qu’elle devrait se poser n’est-elle pas : A quel point avait-elle besoin d’aide? Et la seconde que n’importe qui se poserait : De quelle puissance d’aide avait besoin une petite fée soigneuse?

Me’a y réfléchissait pendant que l’elfe lui commandait un nouveau verre. Quand elle le reçu, une odeur sucrée s’éleva jusqu’à ses narines et la petite fée sourit avec douceur. Elle jeta un regard à Morgan, intimidée, ignorant si elle devait le sortir de ses pensées. Quand il se reconcentra sur elle, elle réalisa que non; il n’avait visiblement pas besoin d’aide pour cela. Et le beau-parleur se lança dans une longue tirade que la fée écouta avec attention.

A contrario de Morwën qui semblait avoir comprit quelque chose sur l’être candide qu’elle avait à ses côtés et qui en avait adopté un comportement plus serein et mature ; Morgan semblait vouloir répondre aux mots par les mots. Et, soyons honnête, il eut plus une image de conteur et de barde que de moralisateur. Il semblait venir d’une autre planète et lui contait un monde que Me’a ne connaissait pas.

Un monde sans rien. Sans toutes ces notions qu’elle trouvait importantes et vitales. Il lui offrait la vision d’une vie que même ses cauchemars n’avaient jamais imaginé. Il lui parla de plantes pourries, viciées jusqu’à la sève. Il lui racontait une histoire d’une tristesse palpable. En la contant, il regardait le plafond et notre fée se demanda à quel point il se retenait. Elle avait l’impression qu’il était enchaîné à quelque chose qu’elle ne comprenait pas. Un souvenir? Une parole? Et la raison vint à elle. Ce conteur, cet enfant était un ancien esclave. Il lui divaguait, elle suivait ses mots, comprenait ses raisonnements. Il l’emportait dans sa narration. Elle ressemblait à un papillon de nuit qui suivait le chemin d’une flamme.

Morgan parla d’une protagoniste que Me’a n’apprécia pas. Un type qu’elle se refusait à rencontrer. Un personnage qui aimait faire du mal. Qui prenait du plaisir à … La fée déglutit. Quelle formulation franche et brute… “j'peux t'dire qu'y bandait, quand y cognait sa bite dans l'ventre d'une ado”. Les mots s’infiltrèrent dans l’esprit de l’ailée qui sembla retenir sa respiration. Son regard se posa sur le doigt qu’il leva, parfaitement concentrée sur la chute.


- ...parce qu’il en avait l’pouvoir.

La phrase offrit un sentiment d’air manquant à la fée. A moins que ça ne soit l’alcool. Elle trembla. D’une frayeur qu’elle était incapable d’analyser. Et l’éphèbe poursuivait. Il se mettait en scène pour conter quand la fée cherchait son regard pour y lire tout ce qu’il s’y passait. Peut-être est-ce là, la raison de son frisson? Le fait qu’à aucun moment elle n’ait eu l’impression qu’il mentait. Racontait-il sa vie? Était-ce juste possible qu’un cinquième de son histoire soit réaliste?

Oui

Démiurge. C’était là le mot qu’il semblait vouloir mettre en valeur. Se sentir comme Dieu. Dieu. N’était-ce pas là, la plus belle création des êtres mortels? Qui pourrait croire qu’il existait un être supérieur qui contrôlait les destinées de tout à chacun ? Ce n’était pas réaliste, ni raisonnable. Mais Me’a se savait païenne, à croire que la Nature aurait raison de tout et tout le monde. Et il divergea, il continua de parler. Inlassablement, emportant la fée avec lui, il se mettait à la place d’un Dieu inexistant. Un Dieu qui créerait un monde d’un claquement de doigt. Un Dieu qui favoriserait la terreur et le viol, les cris et les larmes. Un Dieu qui amènerait la fée a avoir une dague… ou une bague empoisonnée. Pourquoi aurait-elle besoin de poison? Les cicatrices de Morwën lui revenaient en tête.

Pour éviter de souffrir.

Elle frissonna. Morgan changea son attention sur l’elfette. Il lui parla comme si elle n’était pas capable de protéger la fée. Il reparlait de son père, d’avoir craché sur quelqu’un qu’il ne fallait pas. Il la regarda sombrement, comme s’il se souvenait d’évènements noirs qu’il n’avait pas aimé vivre. Il expliquait à la fée que l’elfette avait mit “tout le monde” en danger, même qu’une certaine Calamité leur avait sauver le cul. Il sembla s’énerver et tenta de secouer Morwën, en lui disant qu’elle allait apporter… “du mal” à la petite Me’a. Ce que, vous imaginez bien, la-dite petite Me’a ne comprit pas.

Par contre, le visage triste qu’il arbora après sa longue tirade, après s’être rassit… Ça Me’a connaissait. Et Me’a se leva. Peut-être à cause de l’alcool qui chauffait son sang ou son empathie naturelle, peut-être à cause du peu de drogue ingérée. Peut-être qu’un peu de tout ça pourrait expliquer pourquoi l’ailée vint enlacer le jeune bellâtre. A passer ses mains sur ses côtes, à l’enlacer doucement.

- Tu vas bien Morgan? Je veux dire… Ça a pas l’air d’être l’ambiance ici… Mais si t’as besoin de parler… Je suis pas la fée la plus débrouillarde du Reike. Mais je peux vous écouter.

Elle sourit doucement en relevant le regard vers l’elfe. Ses mots lui étaient adressés aussi. Elle embrassa la nuque de l’éphèbe, avec cette douceur qui la caractérisait tant.

- Tu sais. Moi, je pense que se battre tout le temps, ça doit vous épuiser. Tu l’as sûrement vu, je sais pas me battre. Et j’aime pas ça. Les embrouilles, les voix qui se haussent, les cris, les hurlements… Mais je pense que si je fais du bien autour de moi, j’aiderais les autres à être plus doux.

Elle embrassa son crâne, aussi maternelle que lui permettait ses deux siècles. Et elle reprit son verre en souriant un peu plus, détendue, comme si elle passait une soirée “normale”. Doucement elle se retourna vers Morwën :

- Dis, on va dehors? Pour prendre un peu l’air, pour visiter la ville… Ou faire quelque chose ! Je veux dire… On va pas passer toute la soirée ici, si? Sinon on peut aller dans ma chambre et discuter. Mais je suis persuadée que vous préferiez sortir vous aérer un peu l’esprit…

Elle continuait de boire, petites gorgées par petites gorgées, son cocktail si sucré qu’elle appréciait tant. Bientôt, le verre se vida et les joues de la poupée se teintèrent d’un carmin, de cette couleur que seul l’alcool parvenait à apporter aux joues innocentes.






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Ft. Me’a & Morgan

Heureusement pour Me'a qu'elle était distrayante, sans ça, Morwën se serait probablement lassé de sa présence aussi rapidement qu'elle l'avait laissé l'approcher de prime abord. L'ajout du louveteau à cette joyeuse bande avait sûrement joué en sa faveur, rendant cette séance improvisée d'éducation sur la violence du monde un peu moins ennuyeuse pour l'elfe bi-centenaire. Mais voilà, tenter de traumatiser la petite fée n'allait pas être amusant toute la nuit et c'est assez rapidement que Morwën se lassa de tenter d'expliquer le sens de la vie à Me'a. Son innocence avait de quoi être admirée, tant elle semblait avoir vu le jour la veille. Et c'est non sans lâcher un soupir las que l'elfe s'installa plus confortablement dans sa chaise pour laisser Morgan prendre la relève. Là où l'elfe n'avait pas la patience ni les mots, peut-être que l'éphèbe parviendrait à traduire ce qu'elle avait tenté de lui dire.

C'était quelque chose d'évident pour un natif du Reike ou toute autre personne qui ne serait pas venue au jour dans le monde des bisounours. Que le pouvoir permettait tous les excès. Morwën y avait d'ailleurs été confrontée quand elle avait manqué d'être faite captive par un nobliaud bedonnant. Ce gras du bide avait le pouvoir, alors il en avait fait usage. Mandatant quelconque homme de main pour la capturer, il n'avait eu qu'à payer pour satisfaire ses fantasmes répugnants et nombreux étaient ceux qui étaient dans son cas. À coup de poings, de manipulations, de trahisons et de pots-de-vin, n'importe quel enculé pouvait obtenir ce qu'il voulait. Et même si ces enseignements ne lui avaient pas été utiles, avant. Elle avait fini par apprendre qu'il ne fallait pas faire confiance. Elle avait alors compris, au prix de sa peau, que le pouvoir était l'unique monnaie en ce bas monde. Et qu'elle ne laissait personne se soustraire à sa justice.

Écoutant distraitement les paroles du louveteau, Morwën faisait tourner l'alcool ambré dans son verre, les yeux rivés sur le liquide. Là, sans vraiment l'être, l'esprit ailleurs, elle mit quelques secondes à réaliser que Morgan lui parlait. Levant les yeux vers lui pour ancrer son regard dans le sien, elle ne cilla pas pendant qu'il tentait de la sermonner, répondant de cette moue narquoise qu'elle maîtrisait si bien. Son sermon n'avait aucun effet sur elle, pas plus que l'idée de faire peur à Me'a. Elle voulait lui faire peur, que la petite chose réalise qu'elle ne pouvait espérer vivre dans pareille innocence sans un jour se faire punir par le sort. Mais avant qu'elle n'ai le temps de répondre, elle vit Me'a se lever pour aller enlacer Morgan. Levant les yeux au ciel, Morwën étira ses jambes pour les reposer sur une chaise qui lui faisait face, tournant la tête pour ne pas avoir à subir plus longtemps la vision de toute cette gentillesse. Elle en aurait presque vomi si elle avait pu. C'était tout bonnement... Adorable ?
Grimaçant légèrement en voyant que son verre était vide, l'elfe leva une main désinvolte vers le tenancier qui ne tarda pas à comprendre sa demande. Elle avait besoin d'alcool pour éponger toute cette mignonnerie, c'était immonde. Alors, dans toute sa froideur, sa méchanceté gratuite, elle posa de nouveau un regard hautain sur les deux koalas qui s'adonnaient à une séance de calinothérapie au beau milieu de la taverne. Manquant de soupirer d'ennui devant tant de bienveillance, elle n'objecta pas quand la fée proposa de rejoindre sa chambre pour """"discuter"""". Étirant un sourire goguenard sur les lèvres de l'elfe, elle manqua d'éclater d'un rire franc tant l'innocence de la fée n'avait de cesse de la surprendre. Morwën secoua alors la tête, gloussant quelque peu avant de hocher la tête, portant le verre qui venait de lui être apporté à ses lèvres avant de répondre sur un ton toujours aussi peu enjoué

« Allons où tu veux petite fée, je n'ai rien d'autre de mieux à faire pour l'instant. Un autre petit conseil, n'invite pas des inconnus dans ta chambre. »

Sans même le faire toucher le bois à nouveau, Morwën leva son verre pour le terminer d'une traite. Oubliant la cigarette qui devait gésir quelque part sous la table, elle se releva souplement pour enfiler sa cape, posant quelques pièces d'argent pour régler la note, elle semblait prête à suivre la petite fée dans ses explorations nocturnes, peut-être lui empêcherait-elle de mourir. Ça sera sa bonne action de l'année.


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Morgan Law
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Morgan n'avait pas dit grand chose, lorsque la fée s'était décidée à le prendre dans ses bras. Sa peau sentait la nuit. Une odeur fraîche et opaque, un mélange de cèdre, de baie et de patchouli, - les Républicains n'étaient pas les seuls détenteurs de la loi des parfums. Il ne réagit pas outre mesure. C'eut été pour lui l'occasion de l'enlacer, à son tour, d'enfouir son joli museau entre ses deux protubérances, de se réjouir de cette proximité, lui le loup, lui l'infatigable rapace de ces dames.
Mais rien. Peut-être que, oui, finalement, après un tel laïus, le merdeux faisait un peu pitié.

« Garde c'te devise, jolie fée. Ca t'aidera plus tard, tu peux m'croire. » Puis, ils se levèrent et quittèrent l'établissement. Dehors, en plein cagnard, il continuait de faire chaud. Mais une chaleur exécrable, étouffante. Du Reike, on parlait d'une région inhospitalière, qui n'accouchait que de survivants. Même la nourriture, des fruits secs, du jus cactus, de la viande bourrée d'épices, étaient des gueuletons hors de portée, pour la plupart des palais étrangers.

« J'sais pas vraiment c'qu'on peut faire, pour êt' honnête. » Il croisa ses mains derrière sa tête. « Mais j'peux toujours t'faire la liste de que'ques trucs à peu près sympathiques. En fait, c'est l'soir que ça bouge. Ordinairement. Mais en c'moment, y a un couv'-feu. Au Bellâtre Excité, y a une arène clandestine, dans l'sous-sol. Tu peux voir des mecs s'fracasser ent' eux. Et y r'crutent des soigneurs, accessoirement. Sinon, au Ch'val Bien Monté, c'est des nanas qui s'proposent pour leurs services, disons... estivaux. »

Il appesantit son regard sur l'une, puis l'autre, avant de hausser les épaules. « Mais pas certain qu'ça vous convienne. » Morwën avait beau avoir changé de maquillage, depuis leur première rencontre, elle n'en restait pas moins un joli brin de femme, et le boxeur l'imaginait assez mal dans les tribunes d'un combat, où deux mastards de cent kilos s'échangent des gnons. Quant à la fée... elle devait s'intéresser aux plantes, et à ce genre de choses un peu obscurs que les érudits ont à coeur.

« Y a une jungle, aussi, j'sais pas si on t'a dit. Ca m'est d'jà arrivé d'y traîner, à l'époque, pour que'ques quêtes. Là-bas, la végétation a pris l'pas sur tout l'reste. On raconte même qu'y aurait des temples enfouis sous la terre. Pis, dans les marécages. Mais c'est archidangereux. » De nouveau, un petit haussement d'épaule, laconique. « Archidangereux, mais intéressant. J'veux pas faire dans l'stéréotype, hein ? j'veux dire, j'ai rien cont' les fées, j'ai moi-même un pote qu'aime la laitue, c'est pas la question. Mais j'sais qu'vous êtes branchés dans tout c'qui est flore. J'imagine qu'les jungles perdues, c'sont un peu vos eldorados. En c'qui me concerne... »

Il renfila sa capuche, se couvrant, chichement. Le seul moyen de tenir sous un soleil à cinquante degrés, était de jouer le mécanisme de transpiration. Hélas, se balader en chemise et en pantacourt ne suffisait pas... « Sinon, y a des oasis. Rien d'mieux pour s'rafraîchir. J'dois faire des trucs; j'te laisse aux mains d'Morwën, en espérant qu'y vous arrive rien d'mal. Si jamais ça cloche, t'auras qu'à v'nir m'chercher. J'habite à... » et il lui donna son adresse. Ou plutôt, l'adresse de Mirari. Un truc qui sonnait comme « 5 rue de la Poivrière, blah blah blah ». Une demeure qui, si la fée sera passée devant, lui aura semblé particulièrement cossue. Plus massive que les autres habitations, la propriétaire des lieux avait hérité d'une somme d'argent confortable, à la mort de son oncle.

« Sur ce, Mesdames... et pas d'bêtises. J'peux pas qu'elle finisse ent' toi et Aazel, sur une peinture d'famille » et il fit volte face, disparaissant dans la foule, comme s'il n'était jamais apparu.




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