17 Mars de l’an 1 :

Après quatre semaines de voyage sur les cotes de Sekai, avec plusieurs arrêts dans les ports principaux et les bureaux des Îles paradisiaques et de Kaizoku, je suis arrivé à ma destination, Ikusa.

Les bruits de l’incident de la Flèche sont arrivés très vite aux oreilles des Gardiens de la SSG. Un évènement qui attire autant de regards et de ressources est souvent le moment opportun pour toute sorte de fraude. Normalement j’enverrais le responsable de l’audit pour revoir les opérations sur place. Mais dans ce cas, le côté politique était trop important, et avec l’attaque lors du débat à Liberty, j’ai préféré l’envoyer là bas gérer cette montagne administrative. Et ça me permettait de repartir en mer, un plaisir que je ne rate jamais de prendre.


Le travail n’avait pas trop affecté mon capital de bonheur dû à notre voyage en mer. Après quelques jours à serrer des mains et visiter des bateaux, je profitais de mon rendez vous chez les Reys pour visiter Ikusa. J’ai alors retiré mon uniforme bien trop officiel de la SSG, et je suis sortie avec des vêtements de tissus noir, simples et assez amples accompagnés d’une cape bleu à capuche couverte de quelques veines de fil d’or. L’emblème de la SSG restait bien visible tout autour de mon large bracelet en or. Et bien évidemment mes boucles d’oreilles habituelles n’avaient pas quitté leur place.

Sous la surveillance de ma garde, je marchais dans les différents quartiers en partant du port. Mon regard doux et calme se posait sur les passants, les réactions étaient variées mais la tension était palpable. Toute cette histoire de Flèche a vraiment troublé la population. Il faudrait vraiment que je me trouve une personne au SCAR avec qui prendre le thé et discuter. Mais qui me croirait si je leur disais que je cherches des informations pour le plaisir de la curiosité et non pour un avantage politique quelconque. Et je ne peux pas me mentir, malgré l’origine de cette soif d’information purement innocente, ces informations seront toujours un avantage dans les sphères que je fréquente.

Le Reike est un royaume intéressant, et toujours sympathique à visiter, mais certaines différences culturelles restent dérangeantes, principalement l’esclavage. Les animaux ici sont aussi différents dans leur comportement même pour les races existantes en République. Communiquer avec eux fût plus compliqué, mais de la nourriture et quelques autres attentions gagne toujours le cœur de n’importe quelle bête.

La famille Reys m’a contacté il y a déjà un moment, après quelques échanges nous avions mis en place les bases d’un contrat pour leur permettre d’investir dans l’une de nos routes maritime. Il est toujours plus intéressant d’avoir des investisseurs locaux pour créer des relations de plus long terme. De plus l’ainé de la famille est le contrôleur royal. Si il venait à compromettre des relations commerciales fructueuses établies avec la République, cela serait un bon signal supplémentaire si les relations entre les deux Etats venaient à se dégrader.

L’extérieur du manoir est agréable à regarder, surtout par son jardin bien tenu. Deux mercenaires sont postés à l’entrée. Je demande à mes gardes de disposer, seul leur capitaine reste à mes cotés, surtout pour la forme. Ayant été capitaine de vaisseau dans la marine, et étant Directeur de la SSG, je sais assez bien me défendre, et il serait absurde de m’attaquer. Un majordome nous accueil, je souris simplement et me laisse guider à travers le jardin. Je ressens la magie de la personne gardant la porte d’entrée du manoir, un contrôle supplémentaire est toujours apprécié.

La mort du père de famille était un point qui m’a particulièrement touché dans le rapport que j’ai reçu. Et j’avais hâte de rencontrer le fils qui travail maintenant pour ceux qui l’ont privé de père.

Le majordome nous laisse entre les mains d’un autre homme. Une boule de joie et de bonne humeur émanant d’un corps grand et bien forgé. Ce n’était pas notre hôte. Il se présenta en tant que Sam, et qu’il allait nous accompagné à l’étude de Tagar pour notre rendez vous. Je réponds à sa bonne humeur avec la mienne, et nous échangeons rapidement sur la météo et mon arrivée au Reike le sourire aux lèvres.
Le manoir est modestement décoré, un choix qui n’en est peut être pas un au vu des finances de la famille. Même noble, de ce que j’ai pu en voir, ils n’étaient pas des plus fortunés. Mais on ne peut que respecter une vieille famille de fonctionnaires qui sert sa nation.

Nous arrivons alors à l’étude, une secrétaire nous salut, voir cette jolie jeune femme me rappel que mon père attend toujours que je lui présente ma compagne. Pas que je ne la connaisse non plus, je n’ai pas eu spécialement le temps de fonder une relation pour l’instant.
Elle nous fait entrer dans le bureau en signalant notre arriver aux Reys qui nous attendent à l’intérieur.

Le majordome, Sam et la secrétaire avaient l’air un peu surpris que j’incline légèrement ma tête comme salutation. Mon statut ne m’y oblige peut être pas au Reike, mais les habitudes militaires et mon éducation demandent un minimum de respect envers toutes personnes. À mon entrée dans le bureau, je suis surpris. Cela ne se voit absolument pas dans ma gestuel et mon expression, mais la mère Reys ressemble beaucoup à Mirelda Goldheart, s’en ai presque perturbant.

"Bonjour à vous, c’est un plaisir d’enfin vous rencontrer"

Les pieds joints, j’incline de quelques degrés mon buste et ma tête en les saluant. Ma position de Gardien de la SSG et ma fortune personnel me place peut être au dessus de ces gens. Mais ce genre de réflexion n’a pas sa place dans mon esprit. Le respect, sous toutes ses formes que ce soit par la politesse, ou par la sympathie et l’honnêteté et bien d’autres, est toujours plaisant à donner comme recevoir.

Surtout, reste poli

C’est ce que je lis sur le bout de papier que ma mère vient de me donner et je lui dis en lui souriant :

Je sais lire sur les lèvres, vous pouvez me parler normalement.

Je vois celle qui m’a mis au monde, hocher la tête, mais je sais très bien qu’elle ne le fera pas. Pour elle, avoir un fils victime d’un handicap est problématique, surtout que je l’ai été en dehors du Reike, lors d’un combat entre Républicain. La seule chose positive, c’est que je n’ai plus de rendez-vous arrangé, du moins, jusqu’à ce que les choses aillent mieux.

Il m’arrive d’avoir des rémissions et entendre normalement, mais cela dure quelques heures et se termine par une grande douleur. J’essaye de chasser cette pensée désagréable de mon esprit quand je vois Madeleine arriver et nous indiquer que notre rendez-vous est arrivé. Je me lève donc de la chaise où j’étais assis pour arriver à la rencontre d’un grand demi-orc, habillé avec goût. Je lui rends donc son salut, inclinant la tête comme il convient et je lui dit :

Enchanté, je suis Tagar Reys et voici ma mère Dame Reys.

Ma mère respecte également les conventions en le saluant et je reprends la parole :

Je vous en prie, asseyez-vous.

Je fais de même et une fois confortablement installé dans un des fauteuils en cuir noir, je lui indique :

Une petite chose avant de commencer, j’ai quelques problèmes d’ouïe que j’espère passager. Toutefois, j’ai appris à lire sur les lèvres.

Maintenant, que tout est dit, je continue :

Tout d’abord, je vous remercie de votre venue et j’espère que vous avez fait bon voyage. Voulez-vous boire quelque chose, nous avons un thé excellent à moins que vous ne vouliez quelque chose de plus corsé ?

Je fais signe à Edgar, mon majordome, qui lui servira ce qu’il désire, pour nous, ce sera comme d’habitude du thé, je préfère garder les idées claires.

Ils me saluent alors en retour, mon regard est quelques peu trop appuyer sur la Dame Reys, sa ressemblance me perturbe peut être trop. J’accepte leur invitation et m’assois sur le fauteuil face à Tagar.

Son commentaire sur son ouïe est assez surprenant. Surtout si il sait lire sur les lèvres, nous ne devrions pas nous retrouver dans une situation où j’aurais pu m’en rendre compte. Avouer un handicap pareil n’est pas spécialement commun lors de négociation avec des Reikois. Sa situation médicale n’a pour moi aucun effet sur les négociations, mais le geste d’honnêteté est apprécié.  

"J’espère que ce désagrément sera résolue au plus vite, si vous pensez que certaines de mes compétences puissent vous aider dans cette situation, ce serait avec grand plaisir que je les mettrais à votre disposition. Surtout pour un médaillé de la République tel que vous. Sachez que j’apprécie énormément ce que vous avez fait pour notre nation. Votre présence au débat a certainement été une chance pour nous"

Il est fort possible que son problème d’audition soit une conséquence du combat à Liberty, un handicap pareil serait très difficile à vivre au Reike. Et je suis sincèrement reconnaissant pour ce qu’il a fait. Je n’étais moi même pas présent et cela me ronge de ne pas avoir pu protéger mes concitoyens. Obtenir cette médaille lui donne un statut tout particulier dans un contexte où les tensions entre le Reike et la République s’intensifient. Mes échanges avec la dame Reys avait commencé bien avant cet évènement, mais cet évènement a solidifié mon envie de travailler avec cette famille.

Cependant, la présence d’un contrôleur royale du Reike au débat n’était clairement pas une coïncidence. L’évènement étant publique, rien de surprenant que les autres nations en profitent.

"Être sur un bateau est toujours un grand plaisir pour moi, ce voyage m’a fait beaucoup de bien. Merci, je prendrais quelques choses de plus corsé, je n’ai pas de préférence particulière, je vous laisse me faire une suggestion"

Nous sommes déjà en après midi, un bon verre ne fera pas de mal.

"Dites moi, qu’avez vous pensé de la République, avant l’attentat et la réaction du peuple durant cette attaque ?"

Le demi-orc me semble très sympathique, car il prend à cœur de m’aider et je lui réponds en souriant :

Je vous remercie pour votre sollicitude, je consulte actuellement de nombreux experts et j’espère pouvoir résoudre mon problème prochainement. Pour l’attaque sur la République, cela a été, un jour, bien sombre pour votre pays et j’aurais aimé faire bien plus. Je suis sûr que les coupables seront punis comme ils le méritent.

Il va falloir que je m’habitue à ce que les gens me reconnaissent pour ce que j’ai fait à ce moment-là. Je suis un peu une star maintenant et cela fait plaisir à mon égo. Il m’indique ensuite qu’il souhaite quelque chose de plus corsé et je fais un signe à Edgar, lui demandant :

Veuillez-nous ramener la bouteille de Rhum, s’il vous plaît.

Je me tourne ensuite vers notre invité, l’informant :

Il s’agit d’une boisson que j’ai découverte au Shoumei, son goût est tout à fait surprenant.

Au début, je ne voulais pas prendre d’alcool, mais finalement, je me laisse tenter et indique à Edgar de servir deux verres, tandis que ma mère prend son verre de thé habituel. J’essaye de ne pas tenir compte du regard désapprobateur qu’elle me jette et je continue, levant mon contenant :

Je vous propose de boire à la santé de l’amitié entre les peuples.

Une fois le toast terminé, je réponds à sa dernière question :

Vous avez un bien beau pays avec un fonctionnement très intéressant. La foule a été difficile à contrôler, car vous n’avez pas de formation guerrière pour vos habitants. Toutefois, une fois le choc passé, les secours ont été rapides et bien organisés.

Sinon, c’est sûr que le bilan aurait été bien plus lourd. Je lui retourne d’ailleurs la question :

Vous avez pu apercevoir une partie de la capitale en venant ici, je suppose que la présence des esclaves a dû vous toucher.

"Ils ne savent pas ce qui les attends en effet."

Nous cherchons encore les coupables, SCAR pourrait faire un effort. Mais lorsque nous les retrouverons, ça m'étonnerait que les Goldheart aient la moindre pitié, au moins un point sur lequel nous sommes totalement en accord.

Du rhum, interessant comme choix. Je n'ai pas eu l'occasion d'en boire depuis bien longtemps, surtout parce que ce n'est pas mon alcool de choix lorsque je suis chez moi. Je suis impatient de goûter ce que les Reys ont à offrir. Tagar renonça à son thé pour m'accompagner dans mon plaisir.
Sa réponse sur la République était mitigé, de mon point de vue en tout cas. Un "fonctionnement très interessant" n'est pas vraiment un compliment. Dans un pays où un débat national étale une partie du linge sale de la nation en publique est bien différent du Reike et de son fonctionnement.
Une population non entrainée au combat est pour moi un compliment, la guerre étant suffisamment rare pour que notre population ne soit pas toujours à l'affut de la prochaine bataille.

"En effet, je suis souvent vu au Reike, et c'est souvent cette pratique qui me rappel que nos cultures sont bien différentes."

De ce que je comprends, le couple royal actuel travail à la réduction et voir l'interdiction de l'esclavage.

"Le Reike reste une des nations qui a le plus à nous apprendre en termes de soutiens au peuple. Et mes missions ici sont toujours une occasion pour moi de comprendre comment la cohésion sociale de ce pays fonctionne. J'espère que nos échanges permettrons à nos deux nations d'apprendre le meilleur l'une de l'autre. Santé à l'amitié entres les peuples"

La République est loin d'être parfaite, malheureusement même Courage est à la prise d'un marché noir bien trop important. Et si je dois être honnête avec moi même, cette mission me permet surtout de prendre une pause sur les problèmes intérieurs à la République.
Nous trinquons nos rhums avec Tagar, et le thé de Dame Reys. Je ne sais pas comment ce geste sera reçu par la dame, peut être impropre mais il est d'intention conviviale.
La mère reste assez silencieuse pour l'instant, très formel probablement. Mais même si Tagar est clairement le futur de cette famille, sa mère reste la personne avec qui j'ai le plus échangé pour l'instant. Je me tourne alors vers elle.

"Madame, merci encore pour votre invitation, nos échanges étaient un plaisir, j'espère que vous vous portez bien malgré les tensions due aux récents événements à la capitale."

Mon interlocuteur pense bien sûr à la vengeance pour ce qui est arrivé le jour de la fête nationale, chose que je comprends tout à fait, car j’aurais eu le même sentiment. Il évoque ensuite le Reike et il est bien gentil avec le Royaume, il semble bien moins critique envers mon pays que je le suis pour le sien.

Il s’adresse ensuite à ma mère et celle-ci lui répond avec un sourire froid dont elle a la spécialité :

Le Reike résiste à tout depuis des milliers d’années et les Rekois également.

Le demi-orc ne le savait pas, mais il y a des sujets tabous et parler des problèmes impliquant le couple royal n’est clairement pas une bonne idée. Nous n’avons pas la liberté d’expression qu’il y a au sein de la République. Ici, une parole hostile envers le gouvernement peut vous emmener directement à l’esclavage, ou pire, à la peine capitale. Tensai, n’est pas vraiment un tendre et ce n’est pas une image, le colosse semble capable d’abattre par dizaine des ennemis et c’est pile ce qu’il a fait lors de la guerre civile. J’essaye de rattraper le coup en changeant de sujet :

Comme ma mère vous l’a indiqué lors de vos échanges, nous sommes intéressés par la capacité de votre marine pour distribuer nos produits de luxe dans tous le Sekai.

Les Reys ne disposent pas de mine de pierres précieuses, mais c’est le cas de la famille de ma mère. Je me suis toujours demandé pourquoi elle s’est mariée avec mon père. Bien sûr, c’était suite à une rencontre arrangée, mais vu son caractère, elle aurait pu aisément refuser. J’attends donc la réponse du représentant de la SSG, les joyaux sont utiles dans la joaillerie, mais ils sont surtout utilisés comme monnaie d’échange. Je ne connais personne qui souhaite se balader avec dix kilos de pièce d’or sur lui.

Malheureusement, Dame Reys était aussi Reikoise que je ne le craignais. Ce Royaume reste en effet sous l'autorité d'un rebelle qui atteignit le trône en baignant la voie avec le sang de ses ennemis. Il avait beaucoup d'ennemi. Et il surveille son peuple à la recherche de ses futurs ennemis. Assez terrifiant, même si l'unique différence avec Goldheart reste dans la méthode utilisée pour évincer ses ennemis. Le bain de sang n'est pas vraiment la spécialité de la République. Enfin, avec les projets d'extension, ça risque de le devenir assez vite.

Je souris à la mère, un sourire simple et honnête. Son commentaire, même si froid, reste véridique. Selon le point de vue que l'on prend. De toute manière je ne m'attendais pas à une autre réponse, peut être juste un ton plus décontracté. Mais lorsque la vie peut être en jeu, je peux lui reconnaitre sa réticence.

"Et comme discuté, nous avons à notre disposition de l'espace sur certains de nos bateaux."

Tagar avait changé de sujet pour entrer dans la partie business de cet échange. Il fallait bien que ça arrive, nous n'étions pas là pour discuter et profiter du rhum.

"L'arrangement que La Compagnie propose serait de vous acheter vos joyaux, et ils seront alors transporté sur la route maritime entre Ikusa et Courage. Les navires feraient leur arrêt à Ikusa, chargeraient votre marchandise, les transporteraient jusqu'à Benedictus, puis longerait les côtes dans le sens inverses. Ils passeraient alors par Benedictus, Mael, Sancta, le sud du Reike, Liberty et Courage."

L'itinéraire passe par quasiment tous les ports important de Sekai, cela permettrait à leur joyaux d'être vendu à travers les trois grandes nations. En termes logistiques, les routes maritimes existent déjà. Dans le rapport que j'ai obtenue pour cette mission, nous avions certains navires qui n'étaient pas encore à pleine capacité et qui sont habilités aux transports d'objet de luxe. Ils sont donc munis de la protection adéquate.

"La Compagnie peut alors vous acheter vos joyaux à Ikusa, et les distribuer partout dans Sekai. La distribution en Shoumei et au Reike se fera à travers de marchands locaux. Cependant en République, vos joyaux pourraient aussi être vendu aux hautes sphères directement par la SSG."

Ces informations devraient suffire. Ils n'ont pas besoin d'en savoir plus, mais j'aimerais tout de même avoir leur avis, même si au final La Compagnie décidera de la qualité des joyaux et où ils finiront.

"Il faudrait que je fasse évaluer certaines de vos pierres, j'ai avec moi à Ikusa des experts qui pourront nous permettre de valider la qualité de la marchandise avant de valider ce contrat. Mais j'aimerais savoir si vous avez des objectifs particuliers pour vos joyaux, que ce soit en termes de destinations, qu'en termes de quantité."

Le marchand ne se démonte pas devant les paroles un peu sèches de ma mère et lui souris même ! Je le soupçonne même d’avoir la même à la maison. Et en plus, vu ses origines, c’est peut-être même une orc, d’où une difficulté supplémentaire. Puis il enchaîne sur la proposition de sa compagnie. Celle-ci est intéressante, car il ne propose pas de simplement convoyer nos pierres précieuses, mais également de les acheter.

Je regarde ma Mère qui hoche la tête, mais qu'à moitié. Je n’ai pas besoin de plus grandes indications, car je la connais bien. Certains pourraient parler de relation fusionnelle et ils n’auraient pas tort. Alors, après l’avoir écouté sans l’avoir interrompu, je lui indique :

Votre proposition est intéressante, et nous pouvons l’accepter en partie. Toutefois, nous avons des clients privilégiés et nous souhaitons leur vendre directement, votre société assurant juste le transport.

Ce sont le plus souvent des marchands du Reike qui ont besoin en continu d’un apport de diamant pour certaines de leurs opérations, parmi les plus discrètes. C’est l’avantage des joyaux, ils ne laissent pas de trace comme une lettre de créance peut le faire et il n’est pas indispensable de savoir lire. Je continue ensuite :

Concernant la destination des joyaux que nous allons vous vendre, cela nous importe peu.

Après tout, il ne s’agit pas d’arme, ou d’autres objets stratégiques.

Pour la quantité, nous avons pensé à ceci.

Je sors ma petite tablette d’argile que j’ai toujours sur moi et à l’aide d’un stylet, je grave un montant assez élevé. Je le présente ensuite au représentant de la compagnie avant de conclure :

Nous avions prévu votre demande, nous avons ici un échantillon des marchandises et vous pouvez l’amener à vos experts sans aucun problème.

Je suis certain qu’il est venu avec une escorte, le transport ne devrait donc pas poser de problème.

Leur dynamique est assez particulière. Ayant échangé uniquement la mère, je pensais que ce rendez vous serait principalement géré par elle. Mais ici Tagar, même si handicapé par son ouïe actuellement, represente les Reys. Je vois des regardes et de hochement de tête être échangé suite à ma proposition. La SSG a clairement l'avantage dans cette négociation au vue de sa taille, et aura toujours un avantage sur cette famille. Cependant l'objectif est aussi de crée plus de liens avec les nobles du Reike, donc nous ne sommes pas là pour les voler non plus.

"Je vois, pour rendre sa possible, il nous faudrait une liste de ces clients privilégiés et les lieux d'échanges. Nous pourrons alors ajuster nos routes commerciales pour atteindre au mieux ces destinations. Je pourrais vous confirmer cela seulement après avoir revue les informations que vous nous aurez transmises. Pour ne pas avoir à échanger d'or inutilement vous pourrez nous payer ce service directement avec vos joyaux, équivalent bien sûr à la valeur du service rendu."

La valeur des joyaux sera indexé sur la valeur d'achat que nous donnons à Ikusa. Les joyaux ayant une valeur assez fluctuante selon la position géographique et l'acheteur, nous auront de meilleur marge en acceptant des joyaux plutôt que de l'or en paiement. Et en tant que transporteur nous auront plus d'information sur la disponibilité de pierre précieuse dans Sekai, ce qui nous permettra toujours de mieux nous positionner dans ce marché.
Je bois encore de mon rhum en attendant qu'il me présente les quantités qu'ils veulent échanger.

"C'est une quantité interessante, mais à quelle fréquence pensez vous pouvoir nous fournir ce montant ? Bimensuel ? Mensuel ?"

Une quantité pareil toutes les deux semaines donnerait à la SSG un avantage supplémentaire à son contrôle du marché des pierres précieuse. Plus notre stocks de joyaux sera élevé plus nous pourrons contrôler les prix à notre avantage et à l'avantage de la République. J'attend donc sa réponse concernant la fréquence et enchaine.

"Et sur combien de temps pourrez vous nous fournir à cette fréquence ? Pour établir un contrat pareil, nous aurions besoin que moi, ou un cadre de La Compagnie puisse observer un stock suffisant pour au moins un quart de l'opération. La durée du contrat dépendra alors de ses stocks. Nous pourrons le renouveler à chaque fin de période suite à un nouvelle audit "

Nous ne pouvons pas libérer autant de place dans nos navires sur une durée relativement longue sans avoir un minimum de sécurité sur la capacité des Reys à produire autant de marchandise. Un quart me semble un bon minimum, sinon il faudrait que nous auditions leur chaine de production pour s'assurer de la stabilité et la capacité de production. Plus nous aurons de sécurité, plus leur marge de négociation sera élevé. Si leur stocks sont faibles nous pouvons aussi établir le contrat sur une plus courte durée, et charger un frais pour chaque renouvellement, la SSG ayant besoin d'auditer leur stocks à chaque fin de contrat, cela représente une charge non négligeable.

"Si vous pouviez transmettre cet échantillon au capitaine de ma garde, il pourra l'envoyer avec mon escorte jusqu'à nos experts. Le plus rapidement nous obtenons ce rapport, le plus sereinement nous pourrons avancer dans notre arrangement."

Le capitaine de ma garde m'avait accompagné à l'intérieur du manoir mais patiente maintenant à juste à l'extérieur de l'étude.

Le demi-orc commence à énumérer ce dont il a besoin et je lui tends une liste qui était déjà préparée. Concernant la périodicité, je lui réponds sans détour :

Il s’agit d’une quantité mensuelle.

Nous ne sommes pas assez riches pour augmenter cette fréquence. La famille de ma mère est certes importante, mais elle est une cousine éloignée de la branche principale. Pour la durée, je lui indique en souriant :

Les mines fonctionnent depuis des milliers d’années. Nous avons encore une organisation que je pourrais qualifier d’artisanale surtout comparé à la République, principalement à l’aide d’esclaves, nous pouvons donc nous engager sur le très long terme. C’est une des raisons de l’esclavage au sein du Reike, aucun homme libre ne veut travailler au fond d’un trou où il fait quarante degrés toute la journée. Pour votre stock, pas de problèmes, nous ferons le nécessaire.

Je fais ensuite un signe de la main et une jeune fille, jusqu’ici en retrait arrive et prend la bourse pour l’emmener à l’extérieur de la pièce. Il s’agit de Jasmine, une jeune esclave de vingt ans, il lui reste deux ans à faire et elle sera libre. Comme d’habitude, elle est très timide et ne dit pas un mot. Elle revient quelques minutes après et hoche la tête pour montrer qu’elle a bien accompli sa mission. Je peux ainsi demander au marchand :

Cet accord est important pour nous, car certains de nos débouchés ont été mis à mal avec la purge au Shoumei.

Ce terme résume en lui seul, l’extermination pure et simple d’un grand nombre de famille de noble. Mais je ne m’appesantis pas là-dessus et je continue en lui souriant :

Si vous avez d’autres demandes ou questions, n’hésitez pas.

Après tout, nous sommes là pour pouvoir travailler ensemble, alors autant être cordial, c’est dans notre intérêt à tous

Une quantité mensuelle était largement dans nos capacités. De plus un engagement sur le très long termes est toujours interessant. Même si le gain matérielle sera moins interessant car nous contrôlerons moins  de stocks, un engagement pareil avec une famille du Reike sera toujours politiquement plus important.

"Votre rythme de production est adapté à notre capacité de transport. Si votre famille souhaiterait un jour modifier votre système de production, La Compagnie serait prête à vous accompagner dans cette transformation avec les meilleurs technologies de La République"

Utiliser des esclaves pour ce genre de travail est bien plus dérangeant. Dans des conditions pareils, un salaire et un cadre de vie sont un minimums. Certes trouver des employés seraient plus compliqués, mais dans un environnement économique instable pour les populations pauvres, les gens sont prêts à tout. En République les métiers les plus repoussant sont tout de même remplis, c'est aussi aidé par la politique des Goldheart assez méprisante avec les plus pauvres.

"Soyez certains du sérieux que nous accordons à cet accord. Et vous pouvez faire confiance à la capacité de La Compagnie à atteindre ses objectifs malgré les aléas du marché et des conflits"

La purge de Shoumeï, un evenement qui reste très marquant. Cela me rappel que malgré les conflits internes et les marchés noirs grouillant dans La République, notre organisation évite les massacre comme cette purge ou la prise du pouvoir par Tensai.
Mon commentaire visait aussi l'attaque du Reike sur la marchandise républicaine qui avait échoué. Même si La République a contre attaqué et a échoué aussi, notre capacité à nous défendre a été prouvé.

"Je penses avoir toutes les informations nécessaires. Nous pouvons mettre en place un contrat d'achat mensuel, ainsi que d'une livraison spécial aux clients spécifiés. Avec un prix estimé au moment de notre audit selon les standards de La Compagnie. Vous nous trouverez généreux sur nos valeurs d'achats. Nous pouvons signer ce contrat avec comme condition que l'audit de vos stocks soit conclusif. Le contrat ainsi que le rapport d'audit seront les documents encadrants notre accord."

Il va falloir que je discute avec les représentants des autres Gardiens qui m'accompagne durant cette expédition. Nous pourrons mettre en place le contrat au plus vite. Je lève mon verre pour trinquer avec Tagar.

"À la paix entre les peuples, et aux gains par l'échanges et les liens que nous construisons. Si vous avez d'autres questions, je suis bien évidemment à votre disposition. Et si vous êtes amener à voir ma bâtisse dans un port où que vous vous trouvé, n'hésitez pas à me contacter."

À ma grande satisfaction, le non-humain accepte mes précisions et je hoche la tête pour montrer que j’ai compris quand il insiste sur certains termes. Il me certifie du sérieux de sa compagnie et je lui réponds en souriant :

Je n’en attendais pas moins de la SSG.

Après tout, ils ont une sacrée renommée. Cela se vérifie encore une fois sur leur proposition financière et mon sourire s’élargit, car j’adore que les gens soient généreux en affaires. Je lève mon verre pour trinquer avec Ioan et je lui dis :

À la paix entre les peuples, que les Astres fassent en sorte qu’elle dure à jamais.

C’est un peu utopique par les temps qui courent, mais le Soleil et la Lune peuvent faire des miracles. Je continue après avoir bu mon verre :

Je me déplace souvent en République, ce sera donc avec grand plaisir que je viendrais vous voir.

Je peux ensuite passer aux questions annexes :

Quand pensez-vous pouvoir faire débuter notre accord, si toutes les conditions sont réunies ? Nous ne sommes pas véritablement pressés, mais nous préférons avertir nos clients habituels en avance, certains sont assez… méfiants.

Et ils ont bien raison de l’être, car dans la zone « grise » où s’échangent les pierres précieuses, la violence n’est jamais loin. Ce type de monnaie, si elle est facile à transporter, peut également se faire voler très rapidement, ou pire. Certains les appellent même les diamants de sang, tellement leurs propriétaires meurent vite et souvent pas de vieillesse. J’attends sa réponse avant de conclure :

Je pense avoir toutes les informations nécessaires, si vous avez des questions à votre tour, n’hésitez pas.

Je suis très satisfait de cette affaire rondement menée et ma mère aussi apparemment. Je peux donc proposer à mon interlocuteur :

Si vous avez du temps, que pensez-vous de nous accompagner à l’arène Royale ce soir ? Deux des plus grands gladiateurs vont s’affronter ce soir.

"Nous aurons besoin de trois semaines après notre audit pour que votre marchandise soit intégrée à nos routes commerciales et que nous mettons en place les routes de livraisons vers vos clients spéciaux. Nous pouvons effectuer notre audit dans la semaine si cela vous semble possible"

Il va falloir mettre en place une enquête sur ces clients spéciaux. Pas que la SSG soit la plus pure des entreprises, mais encore une fois, être bien informé ne fait jamais de mal. L'idéal serait de pouvoir jeter un oeil aux comptes de toutes ces familles avec qui nous travaillons. Cela nous permettrait d'avoir une bien meilleure idée de leur fiabilité, et du genre de risque que nous prenons dans nos échanges commerciaux. C'est une pratique que j'aimerais pouvoir mettre en place un jour. Mais pour ça il faudrait que La Compagnie devienne encore plus influente, surtout en dehors de La République, et que je devienne plus influent auprès des autres Gardien.

Ma carrière dans le contrôle interne m'a bien appris à ne pas poser de question sur certains de nos clients et de nos partenaires commerciaux. Mes collègues me connaisse comme étant professionnel, je contrôle, conseil et améliore les procédures de la SSG mais je ne juge pas. En tout cas c'était le cas avant ma promotion à Gardien. Je ne peux plus simplement "faire mon travail", je me suis toujours caché derrière cette idée que je ne pouvais pas changer les choses à grande échelle. Mais maintenant cette excuse n'était plus recevable.

Les modalités étant discuté, je pensais pouvoir simplement me balader à Ikusa. Mais Tagar me fait une proposition intéressante. Une arène. L'odeur de la mer et du sang me vienne au nez à l'idée du combat. La violence a été l'une des raisons pour laquelle j'ai quitté l'armée pour me tourner vers le commerce. Ma mère m'a toujours dit que la Furie est une partie intégrante des Orcs, comme le Soleil et la Lune. Et je l'ai ressenti, en sautant sur un bateau ennemi pour planter ma hache de leur épaule à leur coeur. Mais parfois mon contrôle m'échappait, et cette peur m'a poussé à m'éloigner des batailles. Je continue à faire des duels avec les maitres d'armes des Nör, et je prenais les armes lorsque le bateau où je me trouve se fait attaquer.

"Ce serait avec grand plaisir, cela fait longtemps que je n'ai pas assisté à ce genre d'évenement"

Mon corps se redresse légèrement et s'engorge à l'annonce de violence. Ce combat sera certainement interessant, mais il faudra que je trouve comment m'occuper de l'envie de me dépenser qui suivra. Je sais déjà que Tagar ferait un adversaire interessant, sa mère à l'air redoutable aussi, même si ce n'est pas avec une épée à la main.

"Moi qui pensait me balader simplement en ville pour une soirée paisible, ça risque d'agiter mes prochains jours. Il n'y a rien de mal à ça bien sûr."

J'en rigole évidemment, cela doit faire quelques semaines que je ne me suis pas épuisé à une tache. Je dois dire que mon corps déborde d'énergie après un voyage aussi paisible. Être aussi transparent avec mes nouveaux partenaires de commerce n'est pas souvent apprécié. Mais la façade que toute personne au pouvoir présente est un mécanisme que je préfère éviter autant que possible.

Le demi-orc m’informe du délai pour mettre les choses en place de son côté et je trouve cela rapide, ce qui est une bonne chose. Comme nous en avons terminé avec la partie business, le représentant de la SSG accepte mon invitation pour les arènes. Nous pourrons ainsi échanger dans un cadre moins formel.

Nous passons ainsi une très bonne soirée, assistant à différents combats. Je dois dire que je ne suis pas friand de la violence, chose qui n’est pas bien comprise au sein du Royaume, je dois le reconnaître. J’ai donc choisi un programme assez léger, avec juste des combats avec des adversaires s’affrontant avec des mains recouvertes de bandage, des professionnels non-esclaves et bien sûr, ce genre de combat n’est pas à mort.

Je trouve ce genre de tournois beaucoup plus intéressants, les boxeurs ne se battant pas avec l’énergie du désespoir, réalisant de très belles prouesses techniques et des actes de courage. De plus, il y a une part de stratégie là-dedans, car les combattants enchaînant les combats, ils doivent gérer leurs fatigues.

Une fois leurs prestations terminées, j’offre à Ioan un bon repas dans un des meilleurs restaurants de la capitale, ne pensant pas à la dépense, car c’est ma mère qui paye. Je passe donc un excellent moment, échanger sur toute sorte de sujet et c’est donc avec une pointe de regret que je quitte une si bonne compagnie, car il commence à se faire tard et je dois raccompagner ma mère qui ne peut pas veiller trop tard, vu son âge.

Nous nous voyons régulièrement avec le commerçant et respectant exactement les délais qu’il m’avait annoncés, nous lançons la vente de nos produits à travers tout Sekai, grâce à la SSG. Cela ne m’enrichit pas à titre personnel, n’ayant aucun intérêt dans la famille de ma mère, mais j’ai appris beaucoup de choses.