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Aazel Leviathan
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Fiche du personnage
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Aazel Leviathan
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Do you know the feeling, when your heart is so hurt,
that you could feel the blood dripping?


Warriors should suffer their pain silently.

Vingt quatre ans. S’approchant lentement, et ennuyeusement des trente. Je fonctionnais grâce à quelques piécettes, et quelques penchants malsains. Mes jambes tiraient dangereusement vers des ténèbres plus profondes encore, qu’on pouvait mettre sur le compte de mauvaise fréquentation, ou de mauvais choix de vie, je me sentais partir. Mon esprit n’était rien de plus qu’un ouragan, le genre d’ouragan tellement désastreux, qu’il aurait fait revenir Michael Jackson d’entre les morts pour nous refaire une musique. Condamné à la solitude je préférais ne pas y penser, il ne servait à rien de prendre décisions irrationnelles, ou dans mon cas de prendre des décisions rationnelles, mais décidées sous l’effet de diverses merdes qui éventuellement finissaient par te bouffer le cerveau.

Pourquoi tu es comme ça ?
Eh bien. Le poids de mes péchés me trainaient plus profondément encore en enfer, pourtant je demeurais assis dans un trône plus haut que celui des Titans eux-mêmes. C’est de cette inconstance consistante, de cette contradiction naturelle, que la source de mon malheur provenait. Alors je voyais les choses différemment. Ce n’était rien de plus qu’un penchant malsain qui tirait mes yeux vers le bas, lorsque j’avais les pieds dans le vide, rien de plus qu’une fascination morbide pour dessiner sur mes poignées à l’aide d’un surin.

Mais grâce à l’alcool tu vas bien. Grâce aux drogues tu penses à demain.

Rien de plus qu’une façade, rien de plus fiable qu’un pansement un peu vain, mais tant que je m’adonnais pleinement à ces paradis artificiels, j’éloignais les idées stupides en cette matinée … Après-midi à en juger par le soleil qui agressait ma rétine fragile. J’avais peu et mal dormi cette nuit, presque blanche, elle était toutefois teintée de sommeil douloureux qui m’apparassait comme de maigres consolations.

Il me semble encore qu’on pouvait appeler ça ton quotidien.

Un peu sanguinolant je l’admettais volontiers, mais le rouge m’allait si bien, tu ne trouves pas ?

Chaos ne sut quoi répondre. Elle était plus maligne que moi. Moi je n’avais pas grand-chose à dire, et souvent il valait encore mieux que je me taise, mais rien n’y faisait. J’aimais trop exister, j’aimais trop la scène, ces paillettes et ces éclats lumineux. Je parlais, je parlais, des pamphlets, et des verbiages, je me perdais en kyrielles incessantes, et en discours apodictiques. Je buvais mes mots, je m’y noyais à défaut de trouver assez d’alcool sur terre pour panser mes plaies.

Cherchant à chasser les idées morbides qui s’immisçaient malgré la tendresse de Chaos, je me dirigeais à la façon d’un cadavre en direction d’une douche bien méritée. Une douche, une clope, et une bière au réveil. Ce combo néfaste me permettait de remettre la peine à demain, de laisser le malheur pour un jour pluvieux plus propice à la misère. La douche n’avait pas réussi à décrasser ma peau de tous ses démons, elle l’avait seulement rendu moins odorante, et plus agréable au toucher. Je n’étais pas beau. Je pensais à toutes les horreurs que j’avais commis la nuit dernière dont je n’avais aucun souvenir. Je n’étais pas beau. Un dernier regard sur mes bras marqués par la violence, les marques de clopes écrasés sur les genoux, et mes phalanges tuméfiées. Définitivement, je n’étais pas beau.

Mais tu n’avais jamais voulu être beau.

Non. Je voulais être fort, marquant, je me foutais d’être beau et inutile, tout cela ça ne servait à rien. Je voulais être quelqu’un pour quelqu’un. N’importe qui. N’importe quoi. Ce qui expliquait pourquoi je m’étais habillé en deux temps trois mouvements avant de me jeter dans le grand inconnu de cette journée.

Être quelqu’un pour quelqu’un ?

Oui. Que mon absence fasse réellement souffrir quelqu’un, je voulais que quelqu’un sois ma chose, sois mon petit objet, ou mon chien, que quelqu’un m’aime  non pas comme un Dieu, mais comme un idéal. Je n’en voulais pas par manque, j’en voulais par curiosité. C’était plus insidieux que le manque la curiosité. Il y avait ça de mauvais qu’on ne savait jamais réellement sur quoi nous allions tomber.

Et un instant tu avais cru avoir trouvé cette personne.

Mais non. Tout était si compliqué. Les non-dits, les jeux, j’aimais jouer, mais parfois, j’aimais gagner plus que le reste. C’est pour ça que les jeux finissent par me terrifier, et que je prends peur. Je peux me battre pour gagner ce petit jeu stupide, je peux me battre longtemps, mais cela ne m’empêchera pas de trembler à chaque instant. Love is very much like war, they said. C’était un mensonge. Les deux se ressemblaient terriblement. A tout instant l’homme pouvait mourir tout comme l’amour, mais l’amour meurt dans un caniveau, sans dignité ni honneur. L’amour est bien plus injuste. On ne choisit pas les règles, on lutte sans comprendre son adversaire, et finalement on tombe. On tombe amoureux. La vérité était là, sous nos yeux, et pourtant nous étions déjà trop bête pour la comprendre. C’est une chute, et il n’y a pas de gagnants en amour, il n’y a que des risques pris.

Putain. Tu te plais à penser à des trucs inutiles. Qui voudrait d’un clochard comme toi, à peine capable de survivre?  Tu fais peine à voir.

Miroir avait toujours le mot pour foutre la pêche et le sourire. Mais j’arrivais un peu à le gérer ces temps-ci. Je mettais mes mains sur mes oreilles dès que j’entendais rire ce narvalot, je voulais lui chanter qu’en effet parfois mon machin était contrarié, que je pouvais sentir mes billes se rétractaient lorsque je donnai un peu trop de ma personne, que faire confiance ça me donnait envie de vomir, pas par dégoût, mais par expérience. Nuance.

Et quelle solution t’avais trouvé pour trouver un semblant de chaleur humaine ? Un simili d’affection ?

J’avais chassé un fantôme. Une rumeur. Une personne qui menait des expériences. J’avais toujours été habité d’une curiosité fascinante, enfant déjà je disséquais les bestiaux à défaut de pouvoir disséquer mes congénères. Si je n’avais pas été ce que je suis maintenant, j’aurai voulu être chirurgien. Petit c’est ce que je pensais. Mais j’aimais ouvrir les gens. Il me fallut du temps pour comprendre, que je n’aimais pas les refermer pour autant. Alors pour satisfaire cette curiosité interlope j’avais décidé d’écouter une vieille histoire qui trainait dans le coin. Une médecin. Une sadique. Une bizarrerie. Une coquetterie, ou une énigme. Cette personne avait bien des noms, sans pourtant en avoir jamais aucun. Et forcément je sentais qu’il était de mon devoir de révéler ce mystère. C’était un remède comme un autre pour soigner ce sentiment sempiternel d’échec qui me suivait à la peau, qui m’apparaît être l’ombre de mon ombre.

Cette fois-ci, je ne voulais pas perdre. Pire encore. Pour une fois je voulais gagner. Et dans cette journée qui s’était muté en nuit après tant de digression et de baliverne, une nuit marquée par le sirocco, et la brume épaisse, je m’avançais en tâtonnant dans les quartiers les plus sales, les plus infects de tout le Reike. Ces quartiers étaient malfamés, évidemment, mais il y avait des joyaux à retrouver dans le purin, et certaines fleurs ne s’épanouissaient jamais vraiment que la fange. J’espérais que cette énigme serait de celles-ci.

Finalement, après cette journée de vagabondage sans vraiment l’être, j’arrivais face à une grande portée, le visage couvert de fins grains de sables, et les vêtements plus poussiéreux que le sexe d’un prêtre sans enfant de chœur. Devant celle-ci j’essayais de répéter un discours cohérent, ou qui me permettrait de ne pas trop surprendre mon interlocuteur.

Je suis ici pour un renseignement… Je suis ici pour un renseignement. Je répétais cette phrase convaincue qu’il me suffisait de me concentrer, il me suffisait d’oublier les effets encore néfastes des cachets que j’avais englouti un peu plus tôt. Il suffisait d’un effort. Rien de plus. N’est-ce pas ? Inspirant un grand coup, je toquai doucement sur la porte,

« SI VOUS AVEZ BESOIN D’UN COBAYE N’HESITEZ PAS ! »

T’es complétement con putain.
Même moi, je suis surprise de ta bêtise.

Sans prendre en considération les remarques des deux voix médisantes, mon front frappa la porte, pour cacher ma honte. J’avais achoppé au dernier moment, encore une fois, et j’allais être maintenant aussi ridicule que mon apparence.

La vérité avait fini par se faufiler, jusqu’à ce que je la crie à plein poumon. J’avais besoin de ressentir quelque chose. N’importe quoi. La souffrance était glorifiante, et si j’aimais tout particulièrement l’infliger, si j’étais capable de jouir rien qu’en regardant le jeune corps meurtri d’un enfant qui pensait rejoindre ses parents ce soir, parfois j’avais besoin de changement. Alors je saisissais cette opportunité de goûter à une douleur nouvelle.
Habituellement je me contentais de soigner mes blessures par moi-même, je n’avais jamais eu la chance, le plaisir, l’honneur de passer sous le bistouri d’une main experte. Et je comptais bien y remédier. Alors d’une voix déjà plus calme et discrète je continuais un peu après.

« Je veux dire … Si je peux vous assister dans quoique se soit que vous accomplissez ce sera une façon bien plus satisfaisante de gâcher ma nuit. »

Mieux ?

Probablement pas. Mais c’était le mieux dont j’étais capable.




Azuria Lovecraft
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La tête calée dans le creux de mon bras, j’ouvris les yeux doucement. Sous mon coude, je sentais la couverture rugueuse du précis d’anatomie qui me suivait partout, et qui, en l’occurrence, m’avait servi d’oreiller. Une somptueuse marquait me rougissait la joue. Encore à demie endormie, je m’étirais, étouffant un bâillement. Par réflexe, mes doigts se dirigèrent vers la seule tasse dans les environs. Ma sieste improvisée m’avait donné soif. Hélas, le temps avait fait son œuvre. Plus dommageable encore, je ne l’avais pas remarqué tout de suite. C’était l’amertume du breuvage qui m’avait alertée. Une moue sur les lèvres, je l’avalai à la hâte. Je n’aimais pas gâcher la nourriture, aussi infecte fût-elle. À Ikusa, les donneurs ne courraient pas les rues. Toutefois, j’avais choisi où passer le congé que l’hôpital m’avait si généreusement imposé, et l’avancée de mes recherches passait avant toute satisfaction personnelle. Jared n’avait pas pu m’accompagner ; sa femme s’apprêtait à délivrer de ses entrailles un troisième rejeton. Je ne regrettai pas son absence. L’inquiétude dans son regard me dissuadait de bien des expériences. Loin du cliquetis soucieux de sa boucle d’oreille, je jouissais joyeusement de ma liberté. Mon corps, sans doute, ne partageait pas l’euphorie qui secouait mes méninges. Brûlures, morsures, piqûres. Depuis mon arrivée, je ne m’épargnai rien. J’avais été jusqu’à ingérer une feuille d’arbre infestée par un parasite. Les œufs avaient éclos dans mon estomac, et j’avais senti chaque étape de leur voyage à travers mes intestins. Sans une solution à base de girofle, j’aurais eu le plaisir de suivre leur folle croissance entre mes organes. Je devenais imprudente. Un moment, je contemplai les arabesques écarlates sur la porcelaine. Le sang dessinait des formes qui ne me révélaient rien ; je n’avais pas le talent de Lucius. J’espérais qu’il ne m’avait pas suivie.

Aux appartements que l’on m’avait recommandés, j’avais préféré m’installer là où personne de ma connaissance ne viendrait me chercher. Loin de figurer sur les cartes postales, le quartier regorgeait d’ivrognes, de pauvres et d’assassins. J’y avais loué un bâtiment enfoncé entre une boutique aux vitres brisées et un entrepôt fermé. L’endroit n’était pas grand, mais je n’aimais pas dépenser de l’argent inutilement. Bien entendu, j’avais eu droit à un comité d’accueil. Seulement, il n’y avait alors rien de valeur chez moi, à moins d’avoir un penchant pour les parchemins et la poussière. Mes affaires étaient arrivées plus tard, mais sitôt que les riverains avaient compris que je pansais leurs blessures sans demander un centime, je n’avais plus eu le moindre problème. Le travail ne manquait pas, dans les environs. Les mêmes têtes passaient trop souvent l’embrasure de la porte, et, quelquefois, tandis que je recousais un membre ou une artère, des questions s’entrechoquaient sous mon crâne. Je ne cherchais pas les réponses ; je savais qu’elles me rendraient plus confuse encore. La misère semblait partout, aussi laide au Reike qu’ailleurs, et moi, je balayai dans le vent. La deuxième semaine, on m’avait amené une prostituée dont le dernier client s’était montré un peu trop sauvage. Ruby avait succombé, et si le chagrin appesantissait chaque jour davantage mes épaules, je le portais sans faillir. En sa mémoire, j’avais acheté des graines au marché, afin qu’elle inaugurât ma collection. Une amaryllis avait poussé. D’autres, hélas, lui tenaient désormais compagnie. Peu à peu, mon cabinet devenait la jungle de mes échecs ; chaque fleur me contait l’histoire de leurs blessures. Le tableau, cependant, n’était pas si noir. Je laissai dans mon sillage plus de gens heureux que de cadavres, et je noircissais à vue d’œil les pages de mon carnet. Sur les étagères trônaient des spécimens qu’on ne trouvait pas à Liberty, et, bientôt, j’inaugurerais mes travaux sur la belle-de-jour.

En parcourant les rayonnages, un détail attira mon attention. Le couvercle d’un panier en osier semblait légèrement décalé. Avec appréhension, je passai la main sous l’anse pour le soupeser, confirmant mes craintes. La vipère avait profité de ma sieste pour prendre la poudre d’escampette. Puisque la fenêtre n’était pas ouverte, il ne pouvait qu’être encore dans la pièce _ à moins qu’il n’ait choisi de se faufiler par l’évier, auquel cas je venais de relâcher un animal dangereux dans un quartier bien trop peuplé. Je portais autour de la clavicule le souvenir de sa capture ; quelques veines avaient viré au gris, formant une toile de venin sous la peau. La fièvre n’était d’ailleurs pas complètement tombée, et je la soupçonnais d’être responsable du sommeil qui m’avait prise. S’il me mordait à nouveau, je risquais la syncope. À la lueur de la bougie, difficile de dire où se cachait la bête, la profusion de végétaux n’aidant guère. Une voix me parvint de l’extérieur. Un peu surprise, je me tournai vers la porte. Que venait-il de dire ? Peut-être souffrais-je d’hallucinations. De toute évidence, je n’avais pas suffisamment concentré le remède. Tranquillement, je collai mon oreille contre le battant de bois. Des mots l’atteignirent, cette fois plus compréhensibles. Intriguée par la proposition, je décidai de l’ouvrir. Dans les parages, la générosité dissimulait souvent des intentions moins honorables. Battant des cils, je lui lançai la première question qui me vint à l’esprit. « Pourquoi ? » À première vue, l’inconnu semblait normal _ à supposer que la normalité se vit sur un visage.

La fraîcheur nocturne n’était pas déplaisante, et j’aurais volontiers engagé une conversation, mais j’avais des priorités, et il n’en faisait pas partie. « Ne restez pas dehors. » Sans ménagement, j’agrippai la chemise du Drakyn pour l’attirer à l’intérieur. Dans la précipitation, je mis un peu trop de force dans mon geste : entraînée, je heurtai la table derrière moi. Il me fallut quelques secondes pour relâcher le tissu. « Vous êtes réel ? » Pensivement, je penchai la tête sur le côté. Avais-je déjà perdu la tête, ou était-ce lui ? Cela faisait plusieurs jours que je n’avais vu personne, et sa présence dans mon cabinet me paraissait illusoire. « Excusez-moi. J’ai l’habitude de recevoir des blessés, et vous avez l’air en parfaite santé. Enfin, plus ou moins, n’est-ce pas ? » Un sourire vint flotter sur mes lèvres. Mon instinct me soufflait qu’il y avait bien des secrets derrière ses prunelles brunes, et sur ses cicatrices, je lisais des horreurs. Je me demandai pourquoi il ne les cachait pas. En était-il fier ? Avait-il peur de ce qu’il serait s’il s’en séparait ? « Je ne sais pas ce qu’on vous a raconté, mais je suis mon seul cobaye. Je ne ferais courir à personne les risques que je suis prête à prendre. » Passant une main dans mes cheveux _ c’était toujours ce que je faisais pour m’éclaircir l’esprit _, je réalisai que j’avais oublié de les coiffer. Son exclamation résonnait encore à mes oreilles. Je devais le dissuader de son initiative, avant que d’autres idées ne m’effleurent. « Hmm. » Faisant quelques pas dans la pièce, je désignai le panier en osier. Si la chance se trouvait de mon côté, la mention de mon problème suffirait à le faire fuir. Dans le cas contraire, j'augmentais la probabilité d'éviter un drame. Je ne savais pas quel scénario je préférais. « J’ai perdu un serpent. Si vous m’aidez à le retrouver, je vous laisserai une chance de me convaincre. Mais vous feriez mieux de repartir. » Drakyns et vipères ne faisaient pas bon ménage, et j’espérais qu’il ne fut pas suicidaire. Je réalisai que je ne m’étais pas présentée. « Je m’appelle Azuria. » Un peu maladroitement, je lui tendis la main. Je n’étais pas douée pour les relations.

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Aazel Leviathan
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Pourquoi ?

Demandait pourquoi à un malheureux pourquoi il agissait de la façon dont il le faisait, c’était aussi désuet que demander à un dépressif comment il parvenait à éviter le bonheur. Pourquoi pouvait se référer à l’intention et dans ce cas là c’était, souffrir, mais pourquoi pouvait demander aussi la cause, et celle-ci c’était que je souffrais. Bien vite je mettais en évidence dans ma tête un cercle vicieux, souffrir parce qu’on souffrait c’était un peu con, et peu productif, mais je n’avais pas le temps de m’y attarder que déjà, on me trainait à l’intérieur. Ou plutôt elle me renversait à l’intérieur, son corps percuta la table, et j’étais d’ores et déjà en plein doute quant à l’état de la doctoresse.

Je me pinçais pour répondre à sa question.
« Normalement on pince celui qui croit halluciner, mais vous semblez déjà un peu … Fatiguée ? »

Ma voix était interrogative. J’étais loin de juger le quotidien des gens, là où le mien n’était rempli que de débauches et d’enfantillages. Ça remarque me fit rire, je n’avais pas grand-chose de plus à dire que son regard éclairé de médecin n’avait su déceler, mais j’en riais. D’une façon ou d’une autre, j’étais en pleine santé, mais il y avait des pires blessures encore que perdre un œil, ou un rein. Et dans son sourire je pouvais lire une belle malice intrigante. J’aimais ces jeux dangereux qu’on se contente d’évoquer au détour d’un geste ou d’un rictus, par peur qu’il ne devienne trop vrai si on en parlait.

« On ne m’a rien dit. Du moins rien qui vous porterait préjudice, plus important encore rien qu’un mort ne puisse répéter. Levi’ enchanté. Il me semble que la médecine est un domaine qui demande des sacrifices, et je ne suis pas homme à reculer devant le danger ». Je me reculais d’un pas, d’un seul pour agrandir l’espace menu qui nous séparait depuis sa cascade sur la table tandis qu’elle m’expliquait son problème de serpent. « Au contraire. On pourrait dire que j’ai une véritable passion pour tout ce qui me tue. »

C’est ainsi que tout naturellement j’acceptais de la suivre dans cette chasse à l’invertébré. Serrant sa main, je rapprochai mon regard du sien, me baissant à son niveau pour plonger mon regard dans le sien, je détaillais son visage quelques instants. Portant à ses cheveux mon index j’attrapais une poussière qui s’était glissée là.

« Si c’est tout ce qu’il faut pour qu’on m’accepte, je serais votre limier, Mi Lady. »

D’une légère révérence volontairement comique, je rompais le contact, cessant mes tartufferies dans le même mouvement. Et sans plus d’attente je me plongeais corps et âme à la recherche du serpent. Pendant ma recherche je me permettais de jeter des coups d’œil furtifs dans sa direction. J’essayai d’être discret, mais il n’était pas dur pour quelqu’un de remarquer le regard de quelqu’un sur soi. Elle avait un charme indéniable, la blouse jouait grandement, il y avait toujours une attraction évidente envers les personnes en uniforme, mais il n’y avait pas que ça. C’était plus imperceptible que cela, il y avait une rigueur dans son caractère, dans sa démarche, quelque chose qui nous faisait comprendre tout le sérieux, et même si j’aurais pu détailler ses traits, sa morphologie, son phraser ou son élégance, je ne voulais pas brusquer la charmante, alors je m’efforçais à détourner le regard. Et dans une vaine tentative, je cherchai à briser le silence en lui racontant des banalités. Vous saviez que si on perforait le poumon de quelqu’un pendant qu’on le plantait, il ne pouvait plus crier ? Non. Trop mondain. Hey, si un jour vous avez besoin de décomposer un cadavre plus vite, fourrez lui du yaourt dans l’anus ? Trop connu, sans intérêt. Eureka !

« Vous saviez Mi Lady, » disais-je en m’accroupissant sur le sol pour chercher où la belle bête se baladait, « La raison pour laquelle les chiens aiment les jouets qui couinent c’est essentiellement que ça leur rappel les cris d’animaux mourants. Fascinant vous ne trouvez pas ? »

Parfait héhéhé. Conversation : 100. J’étais passé maître dans le small talk, et c’était avec une fierté palpable que j’avais lancé cette anecdote. Mais en attendant je n’avais toujours pas trouvé le foutu serpent. Je finissais par m’allonger sur le sol avant de tapoter sur le sol avec mon majeur et mon index. Des tapotements diffus, chaotiques et irréguliers. Lançant un clin d’œil à Lady Azuria, je lui faisais comprendre de rester la plus immobile et muette possible dorénavant.

Et bien assez vite.

La vipère sortit sa langue bifide, et commença à siffler dans ma direction. Je ralentissais mes respirations, forçait ma concentration pour ralentir les battements de mon cœur. J’étais bien plus massif que la bête, mais peut-être qu’elle serait désorientée par le climat dans lequel elle était, et à ma plus grande chance (merci le scénar’) ce fut le cas. Elle rampa encore un peu, jugea de sa proie, et avec la confiance du prédateur elle s’élança, crocs en avant, dans ma direction. Dans un réflexe salvateur, je l’attrapai par la tête avant de me relever tout fier.

« C’est l’avantage qu’on a nous les… »

Mais avant que je puisse me vanter de mes talents d’assassins, de super prédateur ultime ultime, je me rendis compte de la vive douleur qui parcourait mon bras droit. Je l’avais attrapé. Bien. Mais ce que je n’avais pas vu c’était qu’elle aussi m’avait attrapé. Ses crocs étaient profondément planté dans la paume de ma main, et bientôt je me sentais faillir. Mes jambes grelottèrent, et je tombais sur les rotules en un claquement de doigt.

« Hey… je crois que j’ai … Oups. »

Bien impuissant, je gardais ma prise sur le serpent, et dans un regard mêlant la défiance avec un brin d’hargne, j’affrontais l’animal dans un combat de regard. Espérant qu’il regrette son acte et qu’il ravale son poison fissa.




Azuria Lovecraft
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Si j’avais d’abord imaginé que la vérité découragerait le nouveau venu, il n’en fut rien. La situation semblait l’amuser. Comme ces insectes attirés par la lumière, il ne demandait qu’à se brûler. N’était-ce pas toujours ce que nous faisions, à espérer que la flamme tienne un jour entre nos doigts meurtris ? Nous n’apprenions jamais vraiment, moi la première. Mais les yeux de Levi’ étaient doux, et, parfois, je n’avais pas envie de réfléchir. Quand il se fendit d’une révérence, je me retins d’éclater de rire. « Je crains d’être une femme exigeante. » Réjouie par la légèreté qu’il mettait dans ses gestes, mes inquiétudes au sujet de la vipère s’envolèrent. Cette petite blagueuse ne devait pas être loin. Déterminée à lui mettre la main dessus, je me lançai dans l’exploration de la pièce. Envisageant de piéger l’animal, je disposai de l’eau dans une coupelle. Je l’avais oubliée un certain temps dans le panier, et je comptais sur son intelligence primitive pour la mener au bon endroit. Malheureusement, j’avais fondé de trop grands espoirs sur sa matière grise. Les sourcils sévèrement froncés, je me mis à fouiller les pots de fleurs ; sans doute s’était-elle enfouie sous la terre pour se rappeler la chaleur de son nid _ ou peut-être attendait-elle son prochain repas, à l’ombre des feuilles. La voix de mon partenaire de recherche me fit sursauter. Lorsqu’il y avait quelque chose à régler ou à accomplir, mon esprit manifestait une fâcheuse tendance à dépeupler le monde, si bien que j’en avais presque oublié l’homme à mes côtés.

Mon attention abandonna la partie, happée par l’information qu’il me donnait si volontiers. C’était toujours ainsi : il suffisait d’un rien pour agiter mes méninges, et d’une pensée à une autre, je finissais par ne plus rien savoir. Je ne connaissais pas grand-chose des canidés, mais j’avais vu suffisamment de cadavres pour faire pâlir un croque-mort. Les mourants ne criaient pas toujours. Certains s’éteignaient sans un bruit, dans un souffle, avec la tranquillité du sommeil des vivants. Cependant, je devais reconnaître qu’il avait raison. Les hommes, comme les chiens, aimaient les cris, qu’ils fussent de plaisir ou d’horreur. Je m’apprêtai à ouvrir la bouche pour émettre une théorie. Remarquant son curieux manège, je m’immobilisai. Que faisait-il, et pourquoi n’en avais-je pas eu l’idée ? C’était à moi qu’il appartenait de tout connaître sur les créatures que je soumettais à la médecine, et, pourtant, son initiative paraissait plus sensée que la mienne. Possédait-il des connaissances que je n’avais pas ? Comprenait-il les bêtes parce qu’il leur ressemblait, comme nous leur ressemblions tous ? Que lui murmurait cette chose, tapie dans nos cœurs, monstrueuse et sublime, et que je refusais d’écouter ? Quoi que ce fût, le stratagème porta ses fruits. Aussitôt, j’attrapai un morceau de coton, que j’imbibai d’un liquide translucide. Si je voulais qu’elle restât sagement dans son réceptacle, mieux valait prendre des dispositions. Tout naturellement, la vipère mordit à l’hameçon. Tandis que la bougie jetait des lueurs colériques sur ses écailles, son ravisseur diminua soudainement le volume. J’entendis des genoux heurter le plancher.

Les propos du Drakyn _ et le serpent pendu à sa paume _ eurent tôt fait de confirmer mes craintes. Je me précipitai auprès de la victime, qui, étonnamment, ne semblait pas effrayée. Avait-il l’habitude de défier le danger du regard ? Calmement, j’agitai le tissu près des crocs de la bête. Se frayant un chemin contre la chair, sa langue eut un brusque mouvement de recul. « Saviez-vous que le parfum de l’alcool fait fuir n’importe quel animal ? Il n’y a que nous pour rechercher sa compagnie. » Le reptile ne se fit pas prier pour lâcher prise. Désorienté par sa rencontre olfactive, il ne remuait plus avec la même vivacité. J’en profitai pour l’enfermer à nouveau, scellant son sort d’une sangle. Souriante, je me tournai vers le blessé. « Vous m’aviez caché être charmeur de serpents. » Malgré la plaisanterie, j’admirais son adresse, et la folie de son défi oculaire m’amusait beaucoup. Toutefois, son état nécessitait une prise en charge digne de ce nom. « Appuyez-vous contre moi. Il faut vous allonger. » Je lui proposai mon épaule pour se soutenir, et, tant bien que mal, je l’aidai à grimper sur la table d’examen. Attrapant la chaise qui traînait non loin, je prenais place près de lui. Il fallait l'examiner sans tarder. « Essayez de vous détendre. Plus vous respirez lentement, moins le venin se répandra vite. » De l’index, je traçai le contour de la morsure : elle s’étalait en profondeur, et au premier contact, je pouvais dire qu’elle touchait une veine. « Normalement, il ne tue que les enfants, mais vu votre nature... Il est probable que vous présentiez des symptômes du même ordre. Je vais devoir vous garder en observation. » Lui faire courir davantage de risques était exclu. S’il possédait le corps d’un adulte, je doutais de sa résistance. Peut-être allait-il devenir mon cobaye plus tôt que prévu. Machinalement, mes doigts tâtonnaient autour de la blessure. Je poussai un soupir. À quoi pensais-je ? D’humeur bougonne, je murmurai entre mes dents. « Si vous vouliez passer la nuit ici, il suffisait de demander. » Un peu surprise d’avoir parlé à voix haute, je secouai la tête, cachant un sourire.

Au lieu de divaguer, il me fallait l’avertir de ce qui l’attendait. Les patients réagissaient mieux lorsqu’ils étaient informés. J’arrêtai mon inspection au creux des points sanguinolents. « Votre paume va gonfler. » Avec décontraction, je désignai ses extrémités. Il n’y avait nulle raison de paniquer. Pour l’instant. « Vous ne pourrez bientôt plus plier les doigts, et les veines de votre main vireront au noir. D’ici quelques minutes, vous commencerez à avoir de la fièvre. Mais ce n’est pas ce qui m’inquiète. » Je préférai garder mes inquiétudes pour moi. Lorsqu’il savait quoi chercher, l’esprit aiguisait sa vigilance, et de l’excès d’attention naissaient des sensations fantômes. Communiquer n’était pas facile ; il ne fallait jamais en dire trop, ni trop peu, et, les funambules en fussent témoins, l’équilibre ne s’apprenait pas. D'un fil à l'autre, tout pouvait basculer. « Par chance, vous semblez avoir un organisme solide. » L’espèce engendrait bien des drames chez les bambins. Leurs poumons, encore en croissance, ne supportaient pas les effets du venin. Ils souffraient d’abord d’un essoufflement, et ils avaient beau ouvrir grand la bouche, l’oxygène ne faisait que décroître, jusqu’à l’asphyxie. Il n’avait pas besoin de le savoir. « Vous avez besoin de quelque chose ? Vous avez faim, ou soif, peut-être ? » Sans attendre sa réponse, je me levai pour récupérer un coussin au-dessus d’une commode. Je ne me souvenais pas comment il avait atterri là : j’étais terriblement désorganisée. « Tenez. Ce sera plus confortable avec un oreiller. Vous voulez une couverture ? » Une fois encore, je me relevai, tirant le nécessaire d’un coffre. À défaut de lui assurer une bonne soirée, je voulais lui fournir tout le confort possible. J’aurais voulu le coucher dans mon lit, mais sa condition excluait d’emprunter les escaliers. « La lumière ne vous fait pas mal aux yeux ? Je peux éteindre, si vous préférez. » Je me mordis la lèvre inférieure ; j’en faisais trop. Sans doute me sentais-je coupable de la contraction, qui, bientôt, asservirait ses bronches. Un mouvement de sa cage thoracique m’interpella. « Hmm. » Cessant de m’agiter en tous sens, je repris ma place. Doucement, je posai ma tête contre sa poitrine. Mes cheveux s’étalèrent sur sa chemise. Fermant les yeux, je laissai la magie envahir mes oreilles. Il y avait tant de tumulte dans son corps que je grimaçai. « Est-ce que ça vous apaise, de souffrir ? » C’était le souffle que je cherchais, heureusement régulier. Le sang, en revanche, bruissait plus que d’habitude, alourdi par le venin. Quelle fleur choisirais-je pour lui, si j’échouais encore ? « Ah ! Je suis désolée, Levi’. » Je ne voulais pas seulement qu’il guérisse ; je voulais qu’il me pardonne, et qu’il m'apprenne tout ce qu'il savait sur les cris.

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Aazel Leviathan
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Il existait des poisons au doux nom, pourtant le plus doux tous restaient sans aucun doute l’alcool. Le plus doux, le plus tendre, l’alcool c’était la griffe d’un amant, la caresse d’un démon, le baiser d’un ennemi. Et si je laissais passer sa remarque, je n’étais moins intrigué par cette curieuse anecdote. Si je me noyais dans les spiritueux pour oublier, comment oubliaient-ils ? Si je choisissais de me détruire selon mes termes pour mieux supporter mon existence, comment parvenaient-ils à se sentir vivre ?

« Un charmeur de serpent un peu trop efficace il me semble… » une pause dans ma voix causait par les difficultés que je rencontrais à chaque inspiration, vint me ralentir dans ma tirade, « Que je n'accepte qu'on me morde qu'au deuxième rendez-vous. »
Je lâchais un rire difficile qui se transformait rapidement en un tousse sèche. Douloureuse, qui raclait ma gorge, et mes alvéoles. Je sentais comme une main spectrale qui déchirait mes poumons, m’écrasait le cœur. Je ne me faisais pas prier pour utiliser son épaule, on pouvait être massif, grand, et con, se prendre une droite ça faisait toujours mal, et une vipère ce n’était pas particulièrement mieux. Elle avait les doigts doux, expérimentés, habile, mais surtout doux. J’avais presque honte lorsqu’elle m’examinait de la cale sur mes mains, des vieilles cicatrices qui les habillaient, et je dus retenir un spasme pour ne pas fermer ma main et m’en aller. Pour aller où de toute façon ? La déhiscence, entre ce que j’étais et ce que je voulais être, me semblait plus cruelle à cet instant que jamais auparavant. Je devais compter sur la bienveillance d’une sombre inconnue, et sans que j'ai mon mot à dire, a chaque instant, ma vie pouvait prendre fin. ù
Au fond de moi j’espérais qu’elle se manque, ou que la blessure soit trop profonde, plus profondément encore, une voix des abysses me suppliait de survivre.


Ce n’était plus une lutte interne à ce niveau là.


Non. Il s’agissait plus d’une guerre généralisée entre mon instinct de survie et ma raison. Puisque raisonnablement j’avais comme une envie de m’endormir paisiblement. Ce qui me garda éveillé, c’était la douce voix de la Diane qui me faisait face. La charmante était une créature mystérieuse dans mon regard. Je l’observais comme ses fleurs qui s’épanouissent entre les ténèbres et l’âme, d’un oeil fasciné. Savoir que ma vie tout entière se reposait dans le creux de ses mains, et que pour une fois, je n’étais pas responsable de tout, lui donnait du pouvoir, et le pouvoir, lui, créait une... Attraction?

« Je ne suis pas sûr que… Vous soyez le genre de compagnie avec lequel je voudrais me contenter de dormir. »

Mettez ça sur le coup du poison, du manque d’oxygène, mais aucun de mes mots n’avaient une connotation sexuelle. Je me rends compte lorsque je gratte cette feuille blanche où la confusion pouvait être faite, mais je ne pensais pas à mal. Et s’il n’y avait aucune perverse intention, je peux tout de même vous promettre, que je le referai si c’était à refaire.

J’entendais par cela, la chose suivante : Il me semblait que dormir la nuit venue, en si bonne compagnie, était une terrible opportunité manquée. J’étais de ceux qui croyaient que la poésie intervenait quand plus rien ne le pouvait, et sur ses lèvres, dans ses yeux, je pouvais lire des vers, y entendre des musiques. Les vapeurs qui picotaient mes nasaux, et ma tête lourde qui semblait incapable de trouver du repos, ne m’aidaient pas à penser correctement, ou à mitiger mes propos, mais dans mon extrémisme je reconnaissais une forme de vérité.

« Mais un peu de repos n'était pas de refus. »

Mon corps se raidissait, ma main me faisait atrocement souffrir. Je n’étais que rarement dans cet état, et malgré mon amour pour les serpents, je ne pouvais pas décemment dire que cette tendresse était partagée, donc je les évitais. Je n’étais pas inquiet. Il y avait une sorte de contrat dans cette ligne de travail qui nous garantissait qu’on pouvait mourir à chaque instant de façon honorable, ou non, ce n’était pas la question, mais nous pouvions mourir. Alors je me résignais. Physiquement, jamais par les mots. J’essayais de détendre mon corps au possible, outrepasser la douleur qui se répandait dans ma main. Sa voix aidait à beaucoup. Elle était passionnante. Elle s’agitait, comme si le rideau n’allait pas tarder à se fermer, elle ne tenait pas sur place, et d’une façon assez innocente je l’enviais. Je me demandais à nouveau à quoi cela ressemblait de vivre si pleinement.

« Tout va bien je- »


N’eus pas le temps de finir ma phrase qu’elle me sautait dessus, vérifiant ma poitrine. Mon souffle. Le contact me fit rater un battement de cœur. Ou deux. Je ne méritais pas toute cette attention, pourtant je mentirais si je ne confessais pas que cela me comblait. Si elle savait le nombre d’enfants qui avaient péri avec moins d’attention, le nombre de personnes que j’avais traqué, tué, maltraité, sans doute que son regard changerait. Pourtant je ne disais rien. Je voulus approcher ma main de son visage, mais je m’arrêtais.

Plus parfaite qu’un ange, plus intrigante qu’un diable, la scène dégageait quelque chose d’intriguant, et je ne voulais toucher à rien, par peur de briser la magie. Par peur de mettre en colère l’univers si je dérangeais cette image, par peur que tous les éléments rugissent, que le ciel ou la terre se ferme sur moi, ou qu’une obscure force me punisse. J’avais surtout peur. Mais plus elle se faisait tentante, plus mes désirs brutaux s’accrochaient à ses prunelles.

Elle demanda, et je fus pris d'un moment de doute.

M’apaise ? La question était justifiée. Elle m’avait vu braver la mort, sourire en le faisant, ne pas regretter un instant. Et lorsqu’elle s’excusa j’attrapai son poignet par réflexe. Un peu brusquement, mais sans violence. Je ne serrais pas. Au contraire, il y avait quelque chose de très doux lorsqu’on me connaissait un peu dans cette façon maladroite d’agir. Pourtant.  Rien ne sortit. Rien ne parvint à sortir. Je voulus lui dire qu’il ne servait à rien de s’excuser, ou plutôt que je ne méritais pas tant de considérations. J’aurai voulu lui dire qu’il ne fallait jamais faire pardonner sa curiosité, mais cela aurait comme dire qu’il ne fallait jamais pardonner la vie dans la vie.


Non.


C’était le malheur des esprits trop embrumés, les mots finissaient par se mêler et rien ne sortait. Alors nous nous taisions dans un mutisme bien plus éloquent que les plus belles verves.

« Je crois… Je crois qu’il existe un moment où il… est très difficile de différencier la souffrance du plaisir. Ou que l’on peut s’habituer à une certaine… forme de supplice. » J’agitais ma tête pour me corriger. « Non. C’est une partie de la vérité. » Je me décidais à être honnête, si cela devait être la dernière interaction, elle serait la plus franche qu’on puisse espérer, « Je crois qu’on comble tous un vide, ou … quelque chose dans le genre, non ? Certains se contentent… D’alcool, de drogue, de tabac. Mais rien ne comble vraiment ce vide. Je crois… Je crois que si je devais choisir entre une vie de souffrance, et le néant, je vivrais un brin plus heureux dans la souffrance. »

J’aurai voulu argumenter des heures, mais j’avais déjà fourni un bien grand effort. Je remarquai que son poignet n’avait pas quitté ma main valide, et que du bout de mes doigts pour cacher le stress de ma déclaration, ou la gêne, j’avais tapoté comme un dément. Je lâchais ma prise, essayant de reproduire la petite révérence dans cette position. Elle était un brin plus ridicule que la première.

Un jour je trouverai les bons mots. Et ils viendront simplement. En attendant je prenais mon mal en patience, et je contrôlais ma respiration.

« Toutefois, si je peux abuser de votre bonté, MiLady … Pourriez-vous attraper dans la poche de mon pantalon une cigarette ? »


Ce n’était pas raisonnable, mais je n’étais pas connu pour cela. Moi, là tout de suite, je n’avais rien de plus à offrir que ma propre confusion, alors je me décidai à lancer une sorte de jeu, un jeu officieux, une sorte de Vérité ou Vérité.

« A mon tour… Certains ont besoin de drogues, d’autres d’alcool … Moi c’est la souffrance, et vous ? Je suis convaincu qu’on … Doit trouver ce qu’on aime. Et qu’on doit le laisser nous tuer. » Il y avait une simplicité dans cette philosophie, « Y-a-t-il plus douce mort que celle donner par les lèvres d’un amant ? »

Cette phrase n’était destinée qu’à moi, et moi seul, mais mes sens troublaient par le manque d’oxygène me jouait des tours. Je ne m’étais pas rendu compte que je l’avais prononcé à haute-voix tant les pensées ce mêlées avec mes mots. Pourtant avais-je tort ?

La souffrance dans le plaisir, c’était la rencontre entre la volonté de rencontrer la mort, et la volonté de jouir de la vie. Mais il n’y avait rien d’étrange à cela en mon sens. Mais j’étais curieux. Qu’est-ce qui faisait tenir la petite doctoresse. Je souriais à MiLady. Mes yeux semblant se déconnecter par moment, je prenais un véritable plaisir, à être disposé sur cette table. J’avais prévu d’être son cobaye, et mon offre tenait toujours. Mais il y avait quelque chose de plaisant


Décidément.


Comme un verre offert avant un baiser, il y avait quelque chose de plaisant à une petite discussion avant une langoureuse dissection.




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Quand j’étais petite, ma mère me trouvait souvent dans les champs, la tête levée vers l’azur. Je ne donnais pas de formes aux nuages, pas plus que je n’admirais le bleu du ciel. Les lèvres serrées, je répétais une prière. J’avais vu l’inquiétude creuser les rides de mon père, et la maladie, la tombe d’un voisin. Au détour d’une conversation, j’avais compris que des phénomènes semblables se produisaient un peu partout. Un monsieur au nez rougi par le vin et au chapeau de paille brûlé prétendait que le cycle de la vie s’accomplissait ainsi. Je n’étais pas d’accord, et à défaut d’avoir suffisamment d’audace pour élever la voix, je me retrouvais assisse dans l’herbe, à demander que la douleur des autres devînt mienne. Naïvement, j’espérais que quelqu’un m’entendrait, et que, du haut de sa tour d’ivoire, un magicien ou un dieu prendrait pitié de la petite fille qui, les genoux tâchés de terre, sacrifiait son après-midi de jeux. Et puis, j’avais grandi. À regarder Levi’ suffoquer sur la table, à entendre le vacarme envahir ses poumons, je repensai à ces rêveries d’autrefois. J’aurais aimé que mes canines, s’enfonçant dans la chair, se nourrissent de ce qui tourmentait son corps et torturait son cœur. Hélas, ce n’était pas ce que Lucius m’avait offert, et même en un tel instant, je sentais l’émail se tendre avidement dans ma bouche. Je ne méritais pas d’être médecin. Ne pouvais-je faire mieux pour le soulager ? N’avais-je pas étudié en vain, si je n’étais même pas capable d’apaiser un homme blessé par ma faute ? Lui, allongé sur la table, à chercher l’air entre deux mots, ne m’en voulait pas. Moi, si. Je l’admirais.

Ce fut son contact qui m’arracha aux remords. Surprise, je n’osais pas bouger. Si j’avais l’habitude de toucher mes patients, l’inverse se faisait rare. Les mourants aimaient parfois qu’on leur tienne la main, mais il n’en avait pas le teint. Qu’allait-il faire ? Dans son geste, je ne perçus pas de violence, mais l’énergie de celui qui cherche ses mots et se contente d’un regard. Alors, un peu maladroitement, j’accrochai ses iris aux miens. Je crus que le silence entre nous durerait toujours. Lorsqu’il le rompit, je tournais la tête pour le laisser réfléchir. À ses propos, j’acquiesçai doucement. « C’est plutôt sensé. Souffrir, c’est encore exister, mais plus tout à fait vivre. » Lorsqu’un poison me détruisait le corps, j’oubliais ce que je savais et qui j’étais. Ni vivante, ni morte, à la faveur de la fièvre de mes cellules, je flottais quelque part, à l’abri du temps. « Vous voyez, je crois surtout que nous ne savons pas vivre. Est-ce qu’une feuille se demande pourquoi le vent la porte, et lui reproche de l’avoir déposée ici ou là ? » Mes yeux ne quittaient pas sa cage thoracique. Que pensaient les centaines d’alvéoles, gorgées du venin contre lequel elles partaient en guerre, de l’affection de leur hôte pour le danger ? Regrettaient-elles leur sacrifice, ou se contentaient-elles de ravager fièrement l’ennemi ? « Croyez-vous que les animaux contemplent la surface de leur point d’eau en se demandant pourquoi leur reflet se déforme parfois ? Peut-être qu’il suffirait, comme eux, de voguer d’un désir à l’autre. Mais ils ont un avantage sur nous ; ils savent quand s’arrêter. » En vouloir toujours plus, c’était le fléau de ceux qui savaient penser, mais à trop réfléchir, ils s’éloignaient de ceux qui savaient vivre. Je ne savais pas à quel camp j’appartenais ; je me tenais à la frontière, vacillante, incapable de décider. Je n’aimais pas choisir. Les paradoxes me convenaient mieux. « Et vous, que désirez-vous ? »

Comme des sœurs perdues de vue depuis trop longtemps, ma question trouva vite sa réponse. Pensivement, je jetais un œil à l’un des bocaux sur les étagères. J’appréciais le pragmatisme de sa demande ; le paquet dans ma propre poche en témoignait. Peu importaient les arabesques de nos pensées : la vie tournait autour de plaisirs simples. « J’ai un peu mieux à vous offrir qu’une cigarette. D’habitude, je ne propose pas ce genre de… Traitement, mais ça devrait vous aider à respirer. » Sur la pointe des pieds, je récupérais le dispositif dont j’avais besoin. À l’intérieur, une mousse ocre s’épanouissait, couvrant le dôme de verre de buée. Au lieu de soulever le couvercle pour les récupérer, j’y accrochais un tuyau, au bout duquel reposait un masque. « Dans la cloche, il y a des spores de champignons. Beaucoup moins concentrés que dans la nature. On les récolte dans des grottes, mais c’est assez dangereux. Ils forment de vraies colonies. Il faut porter une bulle d’air autour de la tête, comme pour aller nager, sinon, on ne risque pas l’asphyxie, mais la folie. » Les deux allaient rarement l’une sans l’autre, et je trouvais amusant que la seconde estompât les effets de la première. Traditionnellement, on les couplait à une préparation liquide, que l’on absorbait au printemps, lorsque les premières allergies encombraient les bronches. Beaucoup de mes collègues considéraient l’inhalation dangereuse, et j’avais appris à mes dépens qu’ils n’avaient pas complètement tort. Heureusement, je gardais le précieux spécimen pour mon usage personnel, et à en juger par la constitution de Levi’, quelques inspirations lui feraient le plus grand. Debout à côté de lui, j’observais les mouvements irréguliers de sa poitrine. Mon esprit avait beau tenter de s’en convaincre, ma décision ne se fondait pas seulement sur des motifs médicaux. J’écoutais sa question, et avant que je puisse parler, il en livra une seconde. Un sourire aux lèvres, je rapprochai mon visage du sien. J’éprouvais pour lui une sorte de tendresse absurde, que la culpabilité n’expliquait pas. « Si votre cœur s’arrête, je promets de vous embrasser. » J’étais égoïste ; je voulais qu’il ait suffisamment de souffle pour me parler toute la nuit.

Puis, tranquillement, j’installais le masque. Mes doigts ne tremblaient pas, et pourtant, je craignais que tout ceci ne fut qu’un mirage que la fièvre m’envoyait, dans son ardente générosité. Je repris place sur la chaise, me rapprochant davantage de Levi’. Je savais quelle obsession, à peine voilée par de nobles intentions, pourrissait mon âme. « La vérité. C’est une chose laide, cruelle et indifférente. Elle brise plus qu’elle ne soulage, et pourtant, la paix n’est jamais si profonde qu’au moment où on la regarde dans les yeux. » Je me souvenais de levers de soleil, aux premières années de ma vie, où je restais dehors, dans la fraîcheur de l’aube, à marcher au hasard des chemins, le cœur éraflé et paisible. « J’ai envie de vous en dire plus que je ne devrais. Voulez-vous bien m'écouter un peu ? » Je détestais les mensonges, et ceux que je me murmurais dans le silence de mon laboratoire plus que les autres. Débarrasser la réalité des charmes de notre imagination était un exercice violent. Naturellement, les gens s’en détournaient, et, certains jours, j’enviais l’instinct primaire qui leur fermait les yeux. « Ce n'est pas juste pour la science que je mène mes recherches. Bien sûr, j’aime mes recherches. Je voudrais pouvoir tout connaître du monde, des êtres et des choses. Je voudrais comprendre ce qui amène une fleur à faner, une main à saisir un livre, une femme à aimer ses enfants. » Si le savoir me remplissait le crâne jusqu’à le rendre douloureux, j’avais besoin qu’il fût davantage qu’une graine morte, parce qu’avec le temps, elles s’accumulaient. Je refusais que mon cerveau devienne une terre stérile, et que, bêtement satisfaite par la profusion de cette inutile collection, j’en oublie la curiosité. « J’aime mon travail, aussi. Je n’imagine pas ma vie sans soigner les autres. Je voudrais pouvoir emporter d’un coup de scalpel leurs blessures et leurs chagrins. » Depuis quelque temps, guérir la chair ne me suffisait plus. Je sentais un nouveau spectre ramper au fond de mes entrailles, et, un jour ou l'autre, je finirais par lui donner naissance.

Dans le flot de mes confidences, j’eus l’impression que je pouvais déverser librement mes pensées à ses oreilles. S’en souviendrait-il demain matin ? Probablement pas. Une rumeur l’avait jeté à ma porte, ma bêtise l’avait retenu un moment, et la vérité lui ferait reprendre le chemin de sa maison. Je baissai la tête pour dérober mon visage à son regard. Je ne voulais pas qu’il me vit ainsi, parce que si je le laissais apercevoir la tristesse dans le mien, je ne voudrais pas le laisser repartir. « J’aimerais que personne n’ait plus à souffrir. » Pas sans le vouloir. C’était un aveu d’enfant, un sanglot, un fantasme que, même adulte, je ne lâchais pas du regard, comme s’il me rappelait un peu de l’innocence que les années dévoraient. Je poussais un soupir. « Chaque fois que je laisse un animal me mordre, un parasite me posséder ou une lame chatouiller mes organes, je lance un pari. Je donne rendez-vous à la mort. » Viendras-tu me chercher ce soir, ou veux-tu encore jouer ? Je la haïssais, lorsque, indifférente à mes appels, elle venait prendre un patient qui ne voulait pas d’elle, et, pourtant, comme un amant éconduit qui ne s’apercevait pas de sa chance, je continuais à la poursuivre. Nerveusement, je me redressais, passant une fois de plus une main dans mes cheveux. « Certaines personnes s’imaginent que c’est une divinité, ou quelque chose de ce genre. Je préférerais qu'ils aient raison, parce qu'alors, je pourrais la mettre à genoux. » Je ne savais pas si je préférais qu’elle fut réelle ou intangible. J’aimais son mystère. Aussi grotesque qu’ambitieux, mon projet me semblait tout à fait ridicule. Cependant, la détermination chassait mon chagrin. Il fallait revenir à l’essentiel, avant que les mots ne s’échappent tous. Avant que je ne perde la raison. Sur une note plus joyeuse, je laissais un enthousiasme tout naturel m’envahir. J’étais avide de connaître Levi’, et s’il n’avait que quelques heures à m’offrir, je voulais tout apprendre de lui. « Vous savez ce que j’aime avec les corps ? Ils ne mentent pas. Peu importe ce que les lèvres disent, les tissus se souviennent. » Espiègle, je me penchais au-dessus de lui. Une pointe d’appréhension au ventre, mon index glissa le long d’une de ses cicatrices. Peut-être appuyai-je un peu trop, comme si j'espérais que ma chair se fonde dans la sienne. « Vous voulez savoir ce que me dit le vôtre ? » Derrière l'oreiller, je remarquai que les doigts de ma main droite tremblaient un peu ; je ne voulais pas me tromper. J’aimais avoir raison, mais plus important encore, je ne voulais pas qu’il s’en aille.  


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Sensé. On m’avait attribué bien des qualificatifs, il existait des pamphlets à mon nom, des sonnets qui m’étaient dédiés, sur le thème de ma personne ou plutôt sur ce que les gens pensaient de moi. Mais sensé n’était jamais apparu une fois. Erratique, chaotique, névrosé, alcoolisé, une cause perdue, ou une cause pour laquelle on a cessé de se battre. Il y avait des mots qui me venaient à l’esprit naturellement quand on me demandait qui j’étais. Mais jamais celui-ci.
C’était un changement rafraîchissant, plaisant, oui, j’irais jusqu’à dire plaisant. Elle n’était pas comme les autres. Non. Je ne me risquais à penser qu’elle me comprenait, qui lui en aurait voulu, mais elle avait une idée de ce que j’insinuais. Et j’aimais sa compagnie. Encore quelque chose de nouveau. Je ne savais pas si c’était dû au caractère introverti et sérieux dont elle faisait élégamment preuve, ou si c’était dans sa façon de soutenir mon regard. Il n’y avait pas de défiance dans sa façon de faire, pas de mépris ni de jugement, un œil qui portait sur ma personne une attention inconnue.

J’écoutais sa façon de voir les choses, sa philosophie, cette nuit était calme, et peut-être que c’était le venin qui empêchait mes poumons de se gorger, peut-être que c’était le manque d’oxygène qui commençait à avoir un effet sur mon esprit, mais je ne me lassais pas d’entendre sa voix, la façon qu’elle avait d’atteindre certaines voyelles, ou l’accent qu’elle mettait sur certains mots, ce qui me paraissait insupportable chez beaucoup m’attendrissait et piquait ma curiosité présentement. Et lorsqu’elle reprenait son souffle, j’ajoutais à mon myrte un nouveau rameau.

Si nous savions vivre ? J’avais la certitude de mieux réussir la mort que la vie la plupart du temps. Et je n’avais jamais pensé à réussir ma vie en toute honnêteté. J’étais convaincu qu’il suffisait d’avoir une glorieuse sortie de scène pour qu’on se rappelle notre rôle, mais … Mais il y avait donc plus ? Je fus troublé par cette information, comme si quelque chose d’évident s’était tramé devant mes yeux et que j’avais était aveuglé par orgueil, ou par stupidité. Et si j’étais allégrement orgueilleux, j’avais plus de mal à me savoir stupide. Cette Azuria … Qui était-elle vraiment ? La question était légitime, et si elle m’avait effleuré l’esprit, bien vite je me concentrais sur la contre-proposition de la charmante médecin.

Pour moi, elle était prête à sortir des clous. Elle bafouait la déontologie, risquait sa crédibilité, et j’avais du mal à savoir comment j’avais réussi, par un miracle innommable, à attirer une personne qui pouvait sacrifier tout cela pour moi. La belle m’expliqua tout ce que ce traitement impliqué, et les dangers que j’allais courir. Mais cela ne renforçait que mon désir. Cela ne sonnait pas comme du danger, mais comme un repos bien mérité.

Je ne pouvais m’en empêcher. J’étais un brin dérangé, je le savais, je faisais de mon mieux, mais rien ne parvenait à soigner cette partie léprosée de mon esprit, alors que je trouvais un moyen innovant de me foutre en l’air. J’en avais des dizaines. Et dans ma démence, je me sentais moins seul lorsqu’elle m’observait, lorsque son souffle berçait mon corps plaintif.

J’étais égoïste, je voulais avoir suffisamment de souffle pour la garder près de moi toute la nuit.

« Si votre cœur s’arrête, je promets de vous embrasser. »

Il me fallut une longue seconde pour comprendre le sens de sa phrase. Et à peine l’eus je compris que des teintes pourpres redonnèrent un brin de couleur à mon visage et la robe cadavérique qu’il arborait. Et puis je compris l’humour qui se cachait derrière cette phrase. C’était évidemment un trait d’esprit, un trait d’humour, il n’y avait que ça qui pouvait mettre du sens à ce qu’elle fabulait. Elle n’aurait pas pu vouloir m’embrasser, pas moi, pas ça. Il n’y avait pas de mal à ça. Mon regard s’accrochait au sien, puis à ses lèvres pendant un instant, pour vite retourner sur son regard. Presque honteux des pensées qui m’habitaient, je priais ceux en qui je ne croyais pas, espérant qu’elle n’avait pas vu le mouvement de mes yeux. Ce qu’elle pouvait me trouver me dépassait, il s’agissait évidemment d’une farce, alors je me décidai à rentrer dedans.

Je murmurai péniblement, sans le souffle, entre mes dents, « Je ne savais pas qu’il était commun pour un docteur de … Donner à son patient une bonne raison mourir… Mi Lady. »


Tu ne peux vivre en redoutant quelque chose si longtemps sans finir par le désirer.


Chaos avait raison. Et sa phrase me fit sourire. J’offrais un sourire provocateur, malévole, emplis de rébellion à la doctoresse, et tandis qu’elle posait ce masque, j’essayais de calmer les démons de mon esprit. Si ce n’était qu’un rêve, qu’une hallucination, je préférais qu’on ne me réveille pas. Insomniaque j’avais appris à redouter mes propres fantasmes, et celui-ci n’était nulle exception, mais je prenais le risque. Si je devais m’effondrer, si une terreur nocturne venait à me faucher, je voulais qu’elle ait son visage. La simple idée m’en réjouissait.

« Je pense … Que la laideur, la cruauté, l’indifférence, tous ses mots ne sont pas si terribles, pas autant qu’on a voulu nous le faire croire … Et on leur prête toutes sortes de mauvaises réputations, alors que … » je regardais mon corps brièvement, il y avait là de la laideur, de la cruauté, et l’indifférence elle luisait dans mes yeux, « Alors que certains joyaux ne brillent que dans les abysses. Certaines fleurs ne s’épanouissent que dans la pestilence. »

Cette dernière phrase me semblait particulièrement vrai dans nos cas. Moi dans le meurtre, et elle dans la médecine. Les deux milieux ne jouissaient pas d’une réputation glorieuse au regard des gens normaux. Les ennuyants et les juges. A ce propos je me considérais plus chanceux qu’elle. Dans ma ligne de travail il n’y avait jamais de mauvaise surprise, on n’espérait rien de plus que la veille. Dans le sien, si. Perpétuellement. Et s’il y avait évidemment du bon dans cette quête, je m’imaginais difficilement les désillusions continuelles auxquelles elle devait faire face.

Les champignons dévoraient, petit à petit, le voile de dentelle qui obstruait ma vision, et j’avais espoir que le remède s’occuperait aussi du feu qui semblait consumer ma cage thoracique. Je ne comprenais pas très bien, mais rien ne semblait faire effet, et le torrent de braise semblait s’exciter un peu plus à chaque fois qu’elle plongeait son regard dans le mien. Je n’y comprenais rien, ce n’était pas mon domaine d’expertise, mais j’espérais que cette sensation étouffante s’en irait. En attendant, je me contentais de lui offrir un hochement de tête en guise de réponse, lorsqu’elle se décida à se confier.

Je l’écoutais attentivement. Elle était amoureuse, une amoureuse du savoir, une amante de la connaissance, une curieuse insatiable. Je l’écoutais. Je voulais me concentrer sur sa voix, seulement sur sa voix, mais parfois, seulement parfois je me perdais. Et cela me demandait une force de caractère, que les vapeurs hallucinées des champignons, savaient amoindrir. J’admirais sa chevelure absalonienne, j’errais dans les diamants de ses yeux.


Paradis artificiels qu’ils appelaient cela.


Dans les rêves qu’elle me confiait, comme un secret terrible, comme un but trop grand pour qu’il ne soit jamais saint, j’y voyais des poussières précieuses. Il n’y avait rien d’honteux, il n’y avait rien de regrettable. Il fallait viser haut. J’aimais son orgueil. Il n’y avait rien de mal à être orgueilleux, je le pensais évidemment pour me rassurer, mais pas seulement. C’est bien beau de croire que la modestie nous rend plus respectable, plus tolérable, mais c’est un mensonge. L’orgueil nous empêche de nous tuer, l’orgueil, la folie, la déraison ou l’inconscience. Nommez-le comme il vous plaira, il ne sera pas moins exquis.  


Une rose sous un autre nom sentirait tout aussi bon.


Qu’elle était cruelle, sadique, lorsqu’elle me privait de la tristesse qui noyait ses prunelles. Je voulais la dévorer entièrement. Sa tristesse, ses angoisses, son orgueil, et ses vices. Elle était curieuse, j’étais avide. Elle cachait son visage du sentiment que je comprenais mieux que quiconque, ce sentiment que j’adorais comme certains adoraient des déesses. Elle rêvait à que plus personne ne souffre, et dans un sens je n’espérais pas mieux. La différence notable qu’il y avait dans nos rêves était la suivante : Elle était prête à prendre toute la souffrance de ce monde pour y arriver, j’étais prêt à le damner pour réaliser le mien. Et la flamme s’embrasa de plus belle lorsqu’elle se pencha vers moi, je pouvais sentir les braises s’échouer sur mes côtes et ma cage thoracique, et si le masque m’avait à respirer, il ne m’avait pas rendu plus habile.


Il ne pouvait pas faire de miracles.

Et alors qu’elle s’apprêtait à m’annoncer ce qu’elle voyait sur mon corps, je me redressais avant de frôler sa joue, doucement comme pour l’interrompre. Je relevais son visage, mes doigts froissant un peu ses cheveux par des mouvements parfois brusques.
Je scrutais. Il y avait une pointe de tendresse, une pointe de sadisme, l’un accompagnait l’autre fatalement chez moi. Je cherchais dans ses yeux la tristesse que j’avais aperçu plutôt. S’il fallait que nous soyons honnête, je voulais tout. Me faisant incarnation de l’envie, je me plantais dans ses yeux. Je me taisais, convaincu que les mots étaient capables de gâcher les instants les plus purs. Je n’étais pas plus brave qu’un autre, et comme le plus pleutre d’entre nous, j’étais terrifié à laisser le silence s’installait. Quand on ne disait plus rien, cela laissait le champ libre à notre esprit. Et c’était terrifiant. Je retirai mon masque de ma main libre, et finalement je lui laissais un peu d’espace, laissant ma main s’échouer tout près d’elle.

Je ne quittais pas son regard. Une invitation, peut-être même un défi.

« Avant... Avant que vous ne deviniez ce que mon corps cache, avant tout cela, laissez moi vous poser une question. » Une question, c’était la porte ouverte à une centaine de questions, mais je ne m’y attardais pas, j’avais retrouvé un semblant de respiration et je voulais en profiter. Ça ou je voulais me cacher. Je ne savais pas ce qu’elle trouverait sur mon corps, mais je le redoutais. Alors je fuyais. Me laissant un instant pour accepter qu’elle ne saurait rien dire de plus infect, que je ne m’étais jamais déjà dit. J’étais devenu bon à ça. « A votre avis, combien de fois on peut changer du tout au tout, combien de fois on peut bafouer celui que nous sommes vraiment, combien de fois on peut se transformer en une version travestie, informe et fade de nous-même, avant qu’on ne doive en payer les conséquences ? Combien de fois on peut ignorer cette forme de meurtre ? »

Là où il y avait de l’obscurité, il y avait de la lumière. C’était un état de fait.

Et la lumière croit être la plus rapide, mais c’est faux. Peu importe à quelle vitesse la vitesse se déplace, elle découvre amèrement que les ténèbres y sont arrivées en premier, et qu’elles l’attendent.

« Le corps ne ment pas. Il est incorruptible. L’âme elle peu importe à quel point elle est brillante, auréolé de lumière et de bons sentiments, l’âme elle se nécrose. Et c’est de notre âme que nous cherchons à nous cacher. On est terrifié de ce qu’on pourrait y retrouver, et c’est là la plus grande erreur du vivant. De croire que parce que nous avons nos démons, que parce que nous avons nos terreurs, nous valons moins qu’un autre. Au contraire. Je juge la grandeur de quelqu’un au nombre de contradictions qu’il est capable d’accepter. Les anges, et les bons sentiments, je les laisse volontiers. Je me délecte de ce qui rebute les gens normaux. »

J’affichais un sourire candide, dans mes grandes phrases je m’étais perdu, et j’avais profité de cet instant pour me tourner en ridicule. Oui. J’étais convaincu, qu’elle devait me trouver bien ridicule. Comme un paon qui affichait ses belles couleurs pour se sentir exister. Mais comme un paon, je vivais dans la fange, incapable de voler, tout juste bon à me satisfaire d’une misérable existence, à exhiber mes flamboyantes plumes pour oublier qu’à mes côtés il y avait les rats et les insectes.

« Mais je vous en prie, Mi Lady. Dites-moi ce que vous voyez. Je suis votre. »

Comme pour lui donner du courage, j’avais glissé ma main sous l’oreiller. Et du bout de mes doigts, je caressais sa main. Je venais calmer les tremblants que j’avais perçu plus tôt. Une déformation professionnelle, ressentir chaque craquement, chaque fêlure, chez quiconque. Si cela était particulièrement avantageux au travail, c’était un véritable poison au quotidien. Inconsciemment j’analysais, j’étudiais chaque humain, chaque vie qui croisait mon chemin à m’en faire haïr. Mais c’était un risque que j’étais prêt à prendre. Un grand sourire fendit mon visage, j’en avais presque oublié le venin qui déchirait l’organisme. Au diable, la douleur pouvait entendre, la gloire était immortelle. Je me jetais sur la table, mes doigts s’enchevêtraient avec les siens, et bientôt je mimais la souffrance, des râles de plus en plus exagérés, tandis que je continuais avec son regard. Me tortillant dans les draps arachnéens, je terminai ma comédie, laissant tomber mon corps. Sur le lit. Mes yeux mi-clos, je feignais la mort.


Il valait mieux en rire plutôt qu’admettre que ton esprit voulait te tuer, c’est ça ?


Il y avait de ça. Mais je l’admettais volontier.

« Je me meurs, je me sens partir, aaaah. »

C’était ça. Je l’admettais. Mais par cette ruse élaborée, j’avais maintenant les yeux fermés. Je trichais un peu, la forçant à me dire tout ce qu’elle voyait sans me regarder dans les yeux. J’étais à sa merci. Parce qu’elle m’avait confié ses rêves ? Parce que je lui faisais confiance ? Peut-être, certainement pas. Je laissais à mon moi futur le loisir de démêlait le vrai du faux, et il s’avèrerait que celui-ci en serait tout aussi incapable. Je m’abandonnais à elle. Je laissais ses mains expertes, son esprit, me disséquait, m’examiner sous toutes mes coutures, je rentrais dans son jeu, effrayé. Je l’acceptais, et mon sourire un peu tremblant, attesté de ma détermination.

Fallait-il, Ma Chère, que vos beaux yeux, à qui je rendais les armes,
Voulussent se divertir de mes tristes soucis, et de mon corps brutalisé ?





Azuria Lovecraft
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Fiche du personnage
Race: Vampire
Vocation: mage
Alignement: Neutre bon
Rang: C
Citoyen de La République
Azuria Lovecraft
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I'm so bad, I make medicine sick
feat. Aazel



Chaotiques étaient les directions que prenaient nos pensées et nos pas. Nous avions beau nous persuader du contraire, aucun jour n’était plus prévisible que la veille. Les chemins s’entremêlaient sans cesse, comme les pinceaux d’un artiste. Soumis aux caprices du hasard et de l’attention, le quotidien ne choisissait pas ses couleurs. Les rencontres s’enchaînaient, certaines remarquables, d’autres ordinaires, et avant de les vivre, on ne savait jamais quelles teintes s’épanouiraient sur la toile. Alors, j’aimais prendre le temps d’écouter les gens. Plus jeune, lorsque les mots ne s’accordaient pas aux regards, j’imaginais ouvrir le crâne des autres, naïvement persuadée qu’étaler leurs cervelles sur la table suffirait à m’en apprendre les secrets. La curiosité me possédait toute entière ; il fallait toujours qu’il y eût un mystère à lever, une connaissance à conquérir. Cependant, par impatience ou par ennui, mes neurones défaillaient. Mon esprit sautait d’une chose à l’autre, incapable de se satisfaire de ce qu’il trouvait. Pourtant, devant le corps asphyxié de Levi’, ma conscience ne vagabondait pas. Entre deux soupirs, je me surprenais à attendre ses mots. Pensivement, je pris mon menton entre deux doigts. « Je ne crois pas non plus qu’il soit commun pour un docteur d’héberger un serpent qui pourrait décimer tous les enfants du quartier. Mais attendez un peu, avant de penser à mourir. Peut-être que je pourrais aussi vous donner une bonne raison de vivre. » Je retenais le rire qui chatouillait ma gorge. Parce que j’étais trop sérieuse, j’aimais parsemer le tableau de touches plus légères.

Le sourire du malheureux m’égayait. Plus que les avertissements qui y logeaient, j’appréciais la sincérité de ses lèvres. Une fois encore, je trouvais ses remarques judicieuses. Je croyais qu’aucune fleur ne poussait là où les méninges prenaient la poussière. Seuls les extrêmes secouaient suffisamment le cœur des hommes pour y faire naître un fragment d’harmonie _ ou de chaos. Et moi, un peu gauchement, je trouvais du charme à l’ordinaire. « Il n’y a rien de si terrible qu’on le dise. Un membre gangréné est un poison pour celui qui le porte encore, et une source inespérée de nourriture pour les bactéries qui y naissent. Tout dépend de celui qui regarde, et de pourquoi il le fait. » J’aimais me rappeler que nous hébergions la vie, plus que nous n’étions vivants. Lorsqu’une âme délaissait un corps, les tissus ne s’offusquaient pas de ce départ soudain. De l’abandon, ils tiraient une frénésie révolutionnaire, et ils n’interrompaient leur danse qu’une fois la chair devenue autre. Une mort était bien des choses, et, d’abord, un festin. Son spectre me hantait sans doute un peu trop, mais, parfois, alanguie dans mes obsessions, je me demandais ce qu’il avait à dire. Alors que je m’égarais dans mes réflexions, j’observais la poitrine de mon invité se soulever, apaisée par un traitement qui n'avait rien de conventionnel. Au diable la faucheuse, c’était sa voix seule que je voulais entendre cette nuit, son timbre éraillé par les excès, profond comme le silence, et déjà familier.

À m’étaler sur ces rêves que je ne confiais qu’aux miroirs, je fis ce que je savais faire de mieux ; j’appelais la médecine, et son attirail de savoirs inutiles. Hélas _ ou par miracle _, me draper dans la connaissance ne me protégea pas de sa main. Je frissonnai à son contact. Il n’avait rien du patient, ni de l’inconnu. Ses doigts se perdirent dans mes cheveux, et je le laissais faire, fascinée par les mouvements de ses iris. Le venin avait étréci ses pupilles : ma silhouette dissimulait les reflets des bougies, si bien que le noir cédait son royaume aux pigments. Et le royaume me plaisait. Ses nuances m’évoquaient l’odeur de la terre après un orage. J’y voyais le soleil se coucher, aux confins d’une falaise ; je craignais qu’en tendant le bras, il s’éteignît complètement. Alors, comme si je n’avais jamais su parler ni bouger, je demeurai là, retenant mon souffle. N’étais-je pas celle qui souffrait de ces hallucinations contre lesquelles je l’avais mis en garde ? Un instant, je regrettais la morsure du serpent sur ma clavicule, et je jurais de trancher la tête à ce satané reptile si tout ceci ne tenait que d’un mirage _ ou de l’adopter s’il m’avait offert un peu plus qu’une somptueuse illusion. Finalement, les phalanges de Levi’ délaissèrent leur prise, effaçant le doute. Quelque part sous mon crâne, une bulle de chagrin éclata. Pourquoi avait-il cessé, et pourquoi m'offrait-il encore la tentation de son regard ?

Et je lui pardonnais volontiers, parce qu’il m’invitait à réfléchir avec lui. Je n’aimais pas sa question. Il me fallut un certain temps avant de lui répondre, parce que je n’avais rien à dire pour satisfaire mes paradoxes. La science me sauvait de mes pensées, de ces nuits blanches à ne savoir qu’écrire ; c’était peut-être pour cette raison que je n’étais pas devenue artiste. Et puis, les sourcils froncés, un peu sévèrement, je décidais de lui partager mes incertitudes. « On ne peut pas. Peu importe la force que l’on met dans nos convictions, les efforts que l’on déploie pour tromper notre vigilance, ou le temps que l’on passe à se mentir. On n’est jamais vraiment aveugle à soi. » Il existait bien des subterfuges pour se convaincre du contraire, et il me suffisait de jeter un coup d’œil à mon interlocuteur pour savoir qu’il les employait tous. Et pourtant, je percevais en lui une fierté de vivre, parfois maladroite, toujours flagrante. J’étais intriguée. « Essayer d’être un autre, c’est se tuer, tout doucement. Ce n’est pas désagréable. » Se diriger lentement vers la mort, en cherchant à toute heure à ralentir la cadence de nos pas : n’était-ce pas la seule façon de vivre ? Il me semblait impossible de prendre un masque et de le reposer sans faire trembler la scène. À moins de jouer les pantins. Certains pensaient qu’une main plus grande que la nôtre tirait les fils de nos vies. Je n’étais pas d’accord.

Le monde n’avait pas besoin d’intervenir : nous savions parfaitement être tour à tour dramaturges ou bouffons. À dérouler le fil de la conversation, une note d’optimisme fit son apparition. « Je ne crois pas que l’âme soit le problème. Ce que nous fuyons, c’est notre faiblesse. Nous n’avons pas le courage de porter notre âme, ni l’honnêteté de l’exposer aux autres. Alors, nous inventons des dieux auxquels adresser nos reproches, parce qu’à la fin de la journée, quand il ne reste rien d’autre qu’un reflet dans un miroir, nous ne voudrions entendre que le silence. » De l’âme ou du corps, il n’y avait rien à sauver : le second avait au moins le mérite de fertiliser les sols. La dernière phrase de sa tirade souleva un vent d’enthousiasme. Joyeusement, je tapotais mes pulpes les unes contre les autres, formant un triangle cassé. « Vous savez que les morts n’ont pas tous le même parfum ? Selon ce qui cause le décès et le lieu où s’écrase le cadavre, différentes sortes de moisissures voient le jour. Elles ne décomposent pas leurs corps à la même vitesse. J’avais commencé un classement, mais le directeur a désapprouvé. » Pas exactement. Ce qui lui avait surtout déplu, c’était de voir un de ses médecins avec une colonie de champignons sur les bras. Il avait dit qu’ainsi, j’effrayais les patients. Une moue aux lèvres, je revenais à la question que j’avais posée auparavant. « Je crains de ne rien avoir à vous apprendre. » Ce qu’il savait déjà ne l’intéresserait pas, et je ne voulais pas découvrir ce qu’il me cachait. Je préférais la confiance aux secrets arrachés avant l’heure.

Au lieu de m’attarder sur les substances que je devinais bercer un peu trop souvent son organisme, je décidais de m’atteler à des considérations plus visibles. Si les détails ne dévoilaient rien, il arrivait de temps à autre qu’ils dessinent la carte d’un trésor. De mon index libre, je désignais le haut de sa joue. « Votre pommette droite est un peu plus haute que l’autre. Lorsque vous souriez, la différence disparaît, parce que c’est le bord gauche de votre bouche qui se soulève en premier. » Ma main quitta les airs pour se déposer sur la chemise de Levi’. Habituellement, pour procéder à un examen, je débarrassais les patients de leurs vêtements. J’avais vu plus de silhouettes nues que de levers de soleil, et qu’elles furent couvertes de rides ou parfaitement formées, je savais garder la tête froide. Néanmoins, à l’idée de le défaire de sa tenue, une vague de chaleur s’échoua sur mon visage. Ce n’était pas très professionnel. Pour me distraire, je m’accrochais à la première chose que je vis. « Des cicatrices que vous portez, celle-ci est la plus longue, et celle-là, la plus profonde. » C’était une remarque idiote ; il connaissait mieux que moi ce qu’il portait dans sa chair. Celle qui, délicatement, s’attardait sur la mienne, sous l’oreiller. Sur les aspérités calleuses, je sentais des sillons qui ne devaient rien au hasard. « Vous aimez sentir des liens se tendre entre vos doigts. » Tranquillement, je reculais d’un pas, comme pour réfléchir davantage à ce que j’avais sous les yeux. Avoir une vue d’ensemble aidait à retrouver ses esprits. L’évidence me frappa. « Votre corps me dit que vous fabriquez un cercueil. Mais peu importe les coups que vous recevez, ce qu’il y a à l’intérieur reste bien vivant. » Je le préférais ainsi.

Et puis, délaissant la main qui m’avait si généreusement soutenue, je me penchais à son oreille. D’une voix plus douce, comme pour une confidence, je lui livrais le fond de ma pensée. « Je ne veux pas tout découvrir de cette façon. C’est vous que je voudrais entendre, la prochaine fois. » La. Prochaine. Fois ? Surprise de ces paroles que je prononçais si simplement, je reculais précipitamment. Mon dos heurta un pot de fleur heureusement vide. J’entendis la céramique se briser sur le sol : je n’y prêtais pas attention. Tout découvrir le premier jour, c’était comme boire une tasse de café froide au réveil. Prise par une soudaine inspiration, je me frappais le front. « Ah, mais quel mauvais médecin je fais ! Vous mourrez devant moi, et je ne fais rien pour vous aider. Si vous survivez, promettez-moi de me déconseiller à tous vos amis. » Laissant pendre une jambe dans le vide, je m’assis sur la table à côté de lui. Amusée par la situation, je plaçais mes mains autour de mon œil, comme une longue vue, et je la pointais tantôt sur son ventre, tantôt sur ses jambes, l’air concentré. Finalement, je rendis mon verdict. Affectant une mauvaise nouvelle, je ne pouvais empêcher ma voix de s’envelopper de notes rieuses. Jouer la comédie m’amusait. « Hmm. Je crois bien que vous êtes condamné. Je vais devoir ouvrir, pour confirmer le diagnostic. Une dernière volonté ? » Malicieusement, je fis apparaître le scalpel qui ne me quittait jamais.

L’instrument trouva place contre sa pomme d’Adam. C’était pour moi un geste naturel, aussi spontané que la respiration. Je ne me sentais jamais si sûre de mes choix qu’avec une lame au bout des doigts. La pointe s’engagea à peine sous la peau. Je savais fendre la chair avec tendresse. Je ne lui épargnais pas la douleur, parce que je savais qu’il l’aimait. Invisible aux yeux inattentifs, le tracé déchira les tissus en ligne droite. Je l’arrêtais au creux de sa gorge. Le métal s’enfonça plus profondément. Ma voix tenait du murmure, et je ne réfléchissais plus. « Parfois, j’aimerais noyer le monde dans le sang. Mais le seul qui couvre mes mains est celui de mes patients. Certains jours, lorsqu’ils rendent leur dernier souffle, lorsque j’échoue enfin, c’est un peu comme si je les tuais. » Oui. C’était ce que Lucius m’avait offert. L’instinct, peut-être, avait toujours été en moi, depuis les heures où, les yeux grands ouverts comme devant une montagne de bonbons, je contemplais la pourriture avec fascination. Lorsque je relâchais finalement la pression, une petite mare se forma contre l’outil. Avant que la raison ne revînt, mon pouce y plongea. Plutôt que de le porter à mes lèvres, je peignis les siennes, lentement. J’aimais les voir devenir rouges ; elles n’avaient jamais semblé si séduisantes. Mon imagination me joua un tour. Un instant, je l’imaginais debout, la chevelure gorgée d’hémoglobine, la peau écarlate sous la lune. La convoitise me tordit les entrailles. Je gardais le silence, incapable de chasser cette vision. Finalement, je lui offris un sourire étincelant d'innocence. « Je vous aime bien, Levi’. » Il semblait étrange, je le trouvais captivant, et nous étions fous. Sans doute. J'avais grand besoin d'une cigarette.

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Aazel Leviathan
Chaos came with love
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Fiche du personnage
Race: drakyns
Vocation: guerrier
Alignement: chaotique mauvais
Rang: C
Citoyen du Reike
Aazel Leviathan
Citoyen du Reike
Do you know the feeling, when your heart is so hurt,
that you could feel the blood dripping?


Warriors should suffer their pain silently.

Une bonne raison de vivre ? C’était un objectif noble, un de ceux que j’avais abandonné de poursuivre. Pas par faiblesse, mais par raison, on ne pouvait vivre que pour sois qu’ils aimaient à répéter. Dans mon cas j’avais abandonné cette idée. Je ne vivais plus comme les hommes, je vivais comme les bêtes animées par des instincts bien trop orgueilleux pour que je puisse décemment les partager. Je voulais voir le monde changeait sous mon poing d’or et de cicatrices. Je voulais voir l’ancien brûlait. Cela n’était rien de plus que des fabulations, de belles illusions, mais cette soirée semblait luire sous le signe des fantasmes, alors en ajouter un de plus, ou un de moins cela ne me dérangeait pas. Cela convenait à ce que nous vivions. Je fronçais les sourcils, intrigué, surpris une nouvelle fois par ses histoires. Je n’avais jamais pensé à voir la vie de cette façon-là, je n’avais jamais effleuré l’idée que de la mort il pouvait se créer plus de vie que de larmes. Moi je me sentais évidemment plus vivant que ceux qui connaissaient les joies de mes lames, mais pensaient à de si petits êtres, si insignifiants, c’était une première à mes yeux.

Décidemment. D’un œil attentif j’observais le moindre de ses mouvements comme envouté, elle était des femmes passionnantes et passionnée qu’on ne peut s’empêcher d’apprécier. Elle était une amante des sciences, j’étais un enfant des lettres, on n’aurait pu croire que rien ne nous aurait rapproché, et pourtant quelque chose l’avait fait ? Le destin ? Je n’y croyais pas, mais cette rencontre m’aurait fait douter. Un instant. Pour un instant seulement, je profitais de ce moment onirique en me demandant quelle âme sadique me faisait connaître tant de joie, quel titan ennuyé se délectait de cette scène pour son propre amusement ? Je ne me plaignais pas, que je sois un pion ou un objet de ridicule, ce n’était qu’une maigre concession pour les instants qu’elle m’offrait.

Dans ce royaume tamisé au lumière tremblante dans lequel, tentation et jeux étaient maître mot, je me sentais à ma place. Aussi surprenant que cela sonnait, il avait donc fallu qu’on m’empoisonne pour que je me sente parfaitement vivre, il avait fallu qu’une énième fois je cherche une raison de mourir, pour qu’on me donne envie de vivre une nuit de plus.

« Ce n’est pas désagréable. Le plus important dans un meurtre ce n’est pas tant l’arme, que celui qui la tient. »

Ce genre de vieille blague aurait bien fait rire ma mère, j’avais hérité de son humour, de ses yeux et de son incapacité à dire je t’aime. Du rire, des joues, ou encore de la mâchoire de mon père, et de sa facilité à abandonner les autres ; Mais je ne me résignais pas. Je ne victimisais pas. J’étais bien des choses, vide, sentimental, accro, le crâne rempli de rêves éveillés pareils à des cauchemars. J’étais bien des choses, mais je n’étais pas lâche. Et je suppliais le monde de ne pas confondre lâcheté et résilience. Cette simple pensée pour ma mère avait suffi à faire poindre des rivières jusque dans mes yeux.
Et je me demandais… Entre ces iris mouillées, et la plus vieille des étoiles de l’univers, je me demandais simplement lequel des deux avaient la plus triste des histoires à raconter ? Au moins cette étoile ne pouvait se vanter d’avoir les yeux de ma mère.


Oublie.


Azuria disait que les gens n’avaient pas l’honnêteté de montrer leur âme. Je craignais qu’il ne soit pas vraiment une question d’honnêteté. Il m’apparaissait qu’en vérité les gens étaient désespérés, ils voulaient être vus, entendus, qu’on partage leurs peines, un instant, mais que tous voulaient la même chose. Et si tout le monde voulait se faire entendre, il restait trop peu de personnes pour écouter. Tandis que les dieux, eux, ces dieux inventés, ils ne détournaient jamais le regard du mendiant, ils ne se moquaient jamais de l’enfant qui crevait entre trois poubelles à racler des moisissures.

« Parfois ils ont une odeur de chair en putréfaction, parfois ils ont une odeur de choux pourris. Le plus étrange que j’ai jamais eu l’occasion de sentir c’en était un qui transpirait une odeur d’ail rance. », comment je le savais ? « Les bas quartiers sont particulièrement dangereux, si vous souhaitez les visiter pensez à venir me voir, je connais les recoins les plus intrigants. »

Je m’étais presque bien rattrapé. J’avais joué sur sa corde curieuse dans l’espoir qu’elle ne se concentre que sur ça. Et cela me donnerait une occasion de la revoir. Cette soirée se terminerait à un moment ou à un autre, et si je ne pouvais me permettre de parasiter son lieu de travail, je pouvais toujours lui donner envie de me revoir.
Elle commença à me dessiner. A m’étudier. C’était bien trop d’attention pour mon petit cœur fragile qui frôlait la tachycardie. J’essayais de trouver les mots, mais je ne voulais interrompre la charmante parleresse qui me disséquait avec tant de sérieux. Elle était douée. Sans aucun doute. Je l’aurais dévoré si l’on m’en avait donné l’occasion. Ici-même. Pour la féliciter de tous les efforts qu’elle avait produit, plus important encore, pour les quelques perles qu’elles avaient réussi à révéler par sa prose. Elle aurait pu devenir poète. La doctoresse savait extraire de l’horreur, le beau, et c’est en ça que l’art consistait. En ça, et en ça uniquement. Rien n’était jamais beau avant qu’on le chante, ou qu’on écrive des vers à son propos. Les ruptures ont toujours été cruelles, le deuil a toujours été affligeant.

« La prochaine fois. »

Encore une phrase que je n’aurai pas dû sortir, mais sans vraiment que je m’en aperçoive elle m’avait glissé des lèvres. Je l’avais murmuré, mais sans aucun doute elle avait entendu cet espoir qui luisait au fond de ma voix. Mon teint qui maintenant se rapprochait plus de la pivoine que du macchabé trahissait mon inconfort. Je n’étais pas habitué. Tout cela était très nouveau, et j’étais encore bien incapable de mettre des mots sur les désirs qui avaient pris mon esprit comme terrain de jeu. Elle fut aussi surprise que moi, se reculant violemment, la charmante éclata au sol la céramique, mais nous étions déjà trop occupés à régler le chaos dans nos têtes pour prêter attention au bruit dans nos vies. Sa réplique me rappela mon rôle sur cette scène, reprenant ma position de malade imaginaire, je feignais la souffrance, et dans cette exagération mêlait à cette poésie si propre au théâtre, je lui répondais d’une voix mi-étouffée.

« Mais quelle envieuse dernière image que de mourir dans votre regard. »

Moins apte qu’elle à cacher mes rires, je laissais un gloussement s’échapper.  Et alors qu’elle me demandait mes dernières volontés, je répétais la phrase que j’avais toujours voulu dire en contemplant la mort, « Plantez moi assez fort, et je pourrais y prendre plus de plaisir que vous. »

Quand on avait subi de coups, chaque menace sonnait comme une douce mélodie, et parfois les menaces se changeaient en l’espoir d’une promesse.

Sa lame trouvait refuge tout d’abord sur ma pomme d’Adam. Un flot incessant de dopamines et d’endorphines anesthésiaient mon esprit. Si je n’avais pas été aussi saoul en plaisir, en excitation, jusqu’à en perdre mes sens moraux, j’aurais été paralysé par le potentiel horrifique de la situation. Mais rien de tout cela. Je pouvais sentir mon poing se fermait, mes ongles s’enfonçaient dans ma peau, mon corps chancelant sous toute cette satisfaction. Elle ne retenait pas sa main, et j’aurais été insulté qu’elle le fasse. C’était délicieux. « Azuria, Azuria. » Je glissais son nom dans un feulement, et la doctoresse au caractère extraordinaire continuait de me déchirer la peau. Dans le creux de ma gorge, elle enfonça le scalpel plus profondément encore, et une partie de moi voulait que sa main vacille et que la soirée en soit d’autant plus mémorable.

Et quand elle se confessa, je compris.

Oui quand elle se confessa je compris. Il ne s’agissait pas du destin. Si nous avions été réuni, si nous avions tous deux, comme deux papillons de nuit, ignorés les avertissements de la lumière sélène, pour mieux se jeter dans les flammes ce n’était pas la faute du destin. C’était celle du chaos. Rien n’avait de sens, rien n’aurait dû s’écrire de cette façon. Pourtant cela s’était fait. Il n’y avait personne d’autre à remercier que le chaos pour tout cela.
Notre échange avançait à un rythme coïtal. Tout s’était enclenché en douceur, quelques rires, quelques bavures, beaucoup d’échange de regard, beaucoup de plaisir. Nous arrivions au deuxième acte, là où la cadence s’accélérait, là où les yeux se rivaient vers le ciel, en implorant des divinités auxquels plus personnes n’osaient croire. Et cela finirait sur un crescendo orgasmique.

Là où son regard n’était qu’innocence, le mien n’était que flamme et convoitise. Elle m’avait montré une facette qui réveillait des démons. Maintenant je voulais jouer. J’enfonçais ma canine dans ma lèvre, espérant calmer les voix dans ma tête, mais rien n’y faisait, je ne tenais plus en place. Et lorsqu’elle vint peindre mes lèvres de cette teinte carmine, je me sentis feindre. Ma dent déchira ma lèvre, le goût du sang se diffusa sur ma langue. Je ne pouvais m’empêcher de sourire. Ce sourire provocateur, ce regard tendre, plein de défi.  

Je me redressai lentement. Sur sa joue, en frôlant ses lèvres sans les toucher, j’y déposais un baiser. Je me relevai. Je ne quittais pas son regard, j’étais bien trop amusé pour perdre une miette de ses expressions. Je voulais pouvoir la dessiner dans mon sommeil, saisir les moindres détails. Et puis au premier battement de cil, je me faufilai dans son dos. D’un souffle, j’éteignais les bougies, et bien assez vite nous nous retrouvions plonger dans la pénombre.

« Vous savez doctoresse, » disais-je au creux de son oreille, un peu taquin, un peu vengeur, « Je suis de ceux qui pensent que le meilleur moyen de résister à la tentation, » je soufflais sur sa nuque que je devinais, je n’y voyais rien dans cette pénombre, mais je n’avais pas besoin de la vue pour ce genre de jeu, « C’est d’y tremper les lèvres. Vous connaissez tous les maux qui naissent de la frustration, des désirs inassouvis, ma chère Doctoresse. »

Mon esprit était encore léger, encore au sommet de l’empyrée, et on aurait pu tout expliquer en blâmant les drogues, les venins, la folie. Mais ce n’était rien de tout cela. Ce que je faisais ici, ce n’était que du plaisir. Un plaisir brutal, tendancieux, mais un plaisir sans aucun doute.

Je laissais ma main glisser sur son bras, jusqu’à rejoindre l’objet du crime. Son scalpel encore humide de mon sang je jouais avec la lame éraflant ma peau volontairement, la faisant perler de ce liquide si doux. Je gardais sa main dans la mienne, alors que je retournais m’asseoir en tant que patient.

« Moi aussi Azuria, je t’aime bien. » Je guidais son index jusque sur mes lèvres, mordillant le bout de son doigt férocement, tandis que le tranchant du scalpel touchait déjà ma langue. Je déposai un baiser sur son doigt, avant de reprendre, « Et je tiens à te le prouver maintenant plus que jamais. J’avais dit que je serais ton cobaye peu importe l’expérience, peu importe le danger. C’est l’occasion rêvé, non ? Couvre tes lèvres de sang, n’ai pas peur. »

Je me plaisais à être le diable sur mon épaule, et elle ne le verrait pas dans cette obscurité, mais je souriais comme un damné. S’il fallait que le diable m’emporte. Je relâchais sa main, qu’est-ce que j’espérais vraiment ? Qu’elle me suive dans ce chemin qui mêlait luxure et déviance, plaisir et souffrance. Elle voulait me connaître ? Tant mieux. Mais j’aurai préféré qu’elle s’abandonne avant tout cela. Qu’elle cède.

Qu’elle y trempe ses lèvres, pour mieux y résister.






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