Ainsi son périple commença, embrassant sa mère comme il le faisait à chaque fois, il posa son sac sur son épaule et s'en alla. Une nouvelle aventure, une nouvelle destination inconnue ! Cette fois ci, Cyrus n'avait pas de destination précise, il souhaitait simplement aller loin, le plus loin possible. Ce n'est que lorsqu'il arriva au pied des montagnes au sud de Shoumei qu'il se décida. Il rencontra, dans un petit campement de nomades, une jeune commerçante de la République avec une petite garde. Ils parlèrent tous ensemble autour d'un feu de camp, profitant de l'hospitalité des nomades. En discutant avec cette jeune femme il réalisa qu'il ne s'était rendu en République depuis longtemps et vint à choisir cette destination.

Il passa les montagnes, accompagné et guidé par les nomades avant de se séparer d'eux une fois de l'autre côté. Ceux ci s'en allait plein nord à travers le désert pour rejoindre Taisen, Cyrus lui prit la route plus à l'est vers Kyouji. Là-bas, il espérait y trouver une route de commerce afin de voyager avec eux jusqu'à Liberty. Le trajet fut assez rapide et sans encombres jusqu'à la grande ville économique du Reike. Il y passa quelques nuits avant de tomber finalement sur une caravane comportant essentiellement des tissus et des épices en partance pour Liberty. Non sans avoir payé le droit de les accompagner et de profiter de leurs vivres, il s'embarqua avec eux.

C'est ainsi que, quelques semaines après avoir quitté Mael, il arriva enfin devant les portes de la capitale de la République. La ville n'avait pas trop changé, toujours aussi chargée et pleine de vies. On y croisait toutes sortes de gens et un nombre importants de race différentes. La loi ici était celle de l'acceptation, de la tolérance et de la liberté. Un dogme largement établi sur les territoires de cette nation mais qui cachait son lot de points sombres. Tous ici n'étaient pas aussi bienveillants qu'on le pensait et l'ostracisme existait encore. Tous n'étaient pas les bienvenus et il y avait encore parmi la populace, de vils personnages endurcis regardant d'un mauvais oeil tous ceux qui étaient différents d'eux.

A cette règle, Cyrus ne faisait pas exception, il venait de Shoumei, contrée lointaine et à l'esprit religieux très développé contrairement aux croyances locales. Mais il savait se tenir et se présentait plutôt sous le simple jour de l'aventurier. Après avoir copieusement déjeuner, il s'arrêta un temps dans une petite place avec une fontaine, animée simplement par le passage d'enfants jouant à un jeu étrange avec des cailloux et un dessin tracé à la craie sur le sol. Là il réfléchit longuement à la suite de son périple. Se destination était atteinte, encore lui fallait-il un but ! Ce n'était pas ici qu'on chercherait à lui acheter des reliques religieuses. En revanche, on aimait la magie en République, et les objets magiques anciens étaient légions. C'était décidé, il décida de laisser un temps le folklore de côté pour aller rechercher des babioles magiques. Au pire, il pouvait toujours les revendre à de simples magiciens, au mieux, si il mettait la main sur des objets très précieux, il pouvait toquer à la porte de l'Université Magic.

Il se promena simplement dans la ville, s'amusant à remarquer ce qui avait changé ou non depuis son dernier passage avant de finalement jeter son dévolu sur une petite auberge relativement proche du centre de la cité. Il entra et fut aussitôt saisi par l'odeur de la fumée, de la bière de moyenne qualité, de la sueur des ouvriers venant finir leur journée, le fumet d'un roti grillant certainement dans l'arrière cuisine et celle du parfum envoutant d'une serveuse qui passa tout près de lui. Définitivement, l'endroit parfait pour casser la croûte et dormir dans un bon lit. Il s'approcha du comptoir et déposa deux pièces d'or sur celui ci. Derrière le vaste bar en bois massif, un petit bonhomme à l'air revêche se retourna sans cesser d'essuyer un verre.

- Qu'est-ce que vous m'offrez avec ça ?
- Ca dépend, vous avez besoin de quoi mon bon monsieur ?
- Un bon repas, au moins une boisson et un lit pour la nuit.
- Mon bon monsieur, avec ce que vous venez de me donner, vous pouvez me demander ça tous les soirs de la semaine.

Le visage du tenancier s'illumina tandis qu'il racla les pièces sur le comptoir pour le faire tomber dans sa lourde main. Il beugla des ordres en cuisine et servit lui même une grande chope de bière à Cyrus. Il lui indiqua une table où il pouvait s'asseoir et l'informa que son repas arriverait rapidement. L'aventurier le remercia et resta quelques instants adossé contre le comptoir, sirotant la chope qu'il avait à la main. Il se félicita d'avoir été élevé dans une famille assez aisée et que la forge continuait de tourner avec autant d'efficacité. Il était loin d'être riche, mais pas dans le besoin  non plus, et cela avait facilité bon nombre de ses voyages. Il n'avait rien contre le fait de dormir à la belle étoile, il savait chasser, faire du feu, et pouvait en réalité très bien se débrouiller tout seul. Mais s'offrir le luxe d'un repas cuisiné par quelqu'un d'autre et dormir dans un lit confortable était parfois très agréable...et après son long voyage, il en avait besoin.

La salle était pleine de vie et semblait emplie de gens bien, ce n'était pas un tripot rempli de brigands, non plus une auberge luxueuse où l'on croisait la haute société. L'estaminet était un lieu pour les petites et moyennes classes de la population. En fond, un groupe de ménestrel jouait quelques chansons, mais eux n'étaient pas très bons, le chanteur semblait à peine meilleur que Cyrus lui même et leurs instruments semblaient désaccordés. Hormis ce fait, l'ambiance globale semblait bonne. Puis les yeux de l'aventurier se posèrent sur un coin de la salle, frappés par une vive couleur bleue. Un jeune homme se trouvait là, seul, alors que toutes les autres tables accueillaient plusieurs convives.

C'était un fort bel homme aux cheveux bleus plutôt sombres et à l'âge indéfinissable. Il n'avait qu'un seul oeil, d'un bleu plus clair et éclatant, l'autre étant caché par un cache oeil noir. Il portait des vêtements de belles factures mais qui semblaient avoir un peu vieillis, certainement pas une tenue fraîche du jour. Physiquement il contrastait avec le reste de l'assemblée, mais plus encore par sa solitude. D'autant que le spectacle était triste, il buvait un verre, mais à voir le rouge à ses joues, il ne devait pas en être au premier. Ce n'est pas la charité, ni même la pitié qui fit que Cyrus fit un pas puis un autre en direction de la table de l'inconnu...mais bien son habituelle curiosité. Un personnage aussi atypique et si seul ne pouvait avoir que des choses intéressantes à raconter ! Et si ce n'était pas le cas, alors l'aventurier s'en irait, purement et simplement. Il arriva à la table, souriant au passage à la jolie serveuse au parfum enivrant.

- Vous seriez contre un peu de compagnie, je n'aime pas manger seul et votre table est l'une des rares à avoir encore de la place.

Ces mots furent son entrée en la matière.

- Sans compter que je n'aime pas non plus voir quelqu'un s'enivrer seul, je peux vous accompagner !

Et, sans vraiment demander, parce qu'il était parfois assez rustre, ou tout simplement peu conscient des conséquences de certaines de ses actions, il tira la chaise face à l'homme aux cheveux bleus, prêt à s'y installer.

Seulement si il payait sa tournée lui annonça le buveur solitaire. Pas de soucis, Cyrus avait déjà payé suffisamment d'argent pour tenir la semaine à en croire le patron des lieux. Rincer une personne ne poserait pas de problèmes, par conséquent, Cyrus termina de tirer la chaise devant lui et s'installa confortablement. Tenant toujours sa chope à la main, il fit un petit geste vers l'hôte de sa table et but une petite gorgée. La réplique suivante de l'inconnu sonna assez étrangement. Montrer de la gentillesse à vouloir accompagner c'était une chose, mais le terme se bourrer la gueule n'était pas de bon augure...surtout lorsque l'on était seul.

- Si boire est tout ce qui vous intéresse, vous auriez très bien pu accepter n'importe qui d'autre à votre table !

Cyrus regarda autour de lui de manière un peu trop théâtral, comme pour vérifier qu'il y avait bien du monde autour d'eux, et c'était le cas, la salle était quasiment pleine. En réalité, aux yeux de l'aventurier, l'inconnu face à lui se démarquait bien trop du reste pour la simple raison qu'il était seul. Sans compter que, maintenant qu'il était assis face à lui, il y avait vraiment quelque chose d'étrange dans son attitude. Cet air charmeur n'y était peut-être pas pour rien.

- Tant et si bien que j'en arrive à ma question, ou plutôt mes deux questions. Pourquoi avoir accepté ma simple personne à votre table là où vous semblez fuir tous les autres ? Et aussi, pourquoi boire seul ?

Ponctuant son geste d'une bonne rasade de bière, Cyrus regarda ensuite la petite troupe de musiciens. Il connaissait un musicien assez foudroyant qui aurait trouvé ce spectacle très piteux et aurait fait battre son tambour pour donner à cet orchestre un peu d'ordre. Cette nuit, en revanche, promettait d'être bonne, rencontrer de nouvelles personnes était en soi une forme d'aventure. Et l'homme face à lui promettait une véritable aventure ! Alors Cyrus, fêtant tout ceci silencieusement, il but une nouvelle gorgée. Puis il frappa soudainement sa pinte sur la table avant de se frapper le front.

- Je n'ai aucune éducation...

Lâchant sa pinte, il étira sa main tendue par dessus la table à l'attention de son partenaire de boisson pour la soirée.

- Cyrus Ronceroy, humble aventurier. Et qui est donc cette personne me laissant partager sa table ?

Cet interlocuteur et compagnon de table n'était pas du genre loquace, au delà de ses airs assez maniérés et son attitude plus que charmante. Il gardait des choses pour lui et qui aurait fait autrement. Cyrus n'était pas du genre à faire confiance facilement, loin de là, mais en revanche, il n'avait jamais aucun problème pour parler, tant et si bien qu'on aurait pu le qualifier de « sans-gêne ». Lorsqu'il plaisanta, disant attendre la bonne personne, Cyrus leva son verre. Peu importe que le compliment soit réel ou non, ça ne se refusait pas. Et enfin, il se présenta sous le nom de Meyrmine...un nom étrange, d'une sonorité et d'une origine qui ne disait rien à l'aventurier, et pourtant, il commençait à avoir vu du monde.

Renchérissant sur le fait qu'il n'était qu'un pochtron ce soir, Cyrus ne réagi pas. D'autres se seraient offusqués peut-être de voir un homme s'imbiber ainsi d'alcool et le revendiquer sans honte. D'autres encore l'aurait certainement pris en pitié, cherchant à connaître les maux de cet homme qui cherchaient à les oublier par la boisson. Mais encore une fois, c'est Cyrus qui partageait désormais la table du soûlard, et il se cognait de savoir le pourquoi, ou tout du moins, il n'apportait aucun jugement, il était simplement curieux.

- Je ne suis pas du genre pochtron moi-même, sauf si l'on considère l'aventure comme une substance vous faisant perdre vos moyens...mais j'ai une assez bonne descente !

Comme pour appuyer son énoncé, l'aventurier descendit le reste de sa chope en quelques traits et la frappa violemment sur la table et poussant une sorte de râle de plaisir et en s'essuyant le coin de la bouche. L'effet se fit sentir aussitôt, bonne descente certes, mais il n'était pas non plus du genre barrique et n'avait, en réalité, que peu l'habitude de boire. Il restait sobre lorsqu'il prenait la route et ne restait jamais très longtemps sur place en ville. Mais si une fête se présentait, il y participait, au détriment de sa propre personne et regrettant chaque matin l'état dans lequel il se trouvait. Il leva la main à l'adresse du patron des lieux, qui comprit aussitôt et s'approcha de leur table, un pichet de bière à la main.

- Je n'ai pas fait ça depuis longtemps, profitons en Meyrmine !

Le tavernier arriva et, sans mots dire, rempli la chope de l'aventurier. Il alla pour partir, son pichet à la main, mais Cyrus le retint par la manche.

- Hormis ce que ce monsieur a consommé avant mon arrivée, les consommations de cette table sont pour moi ce soir !

Son portefeuille risquait aussi d'en souffrir, mais ce n'était encore une fois pas très important. A court d'argent il travaillerait un temps dans une ferme, ou une forge pour se refaire une santé financière. Il dormirait à la belle étoile et chasserait, cueillerait et pêcherait ses repas ! Le patron hocha la tête en signe d'approbation, il devait penser que tant que quelqu'un payait, la situation lui allait parfaitement. Puis il s'en alla. Cyrus s'installa un peu plus confortablement sur sa chaise, étendant ses pieds sur une chaise libre à côté de lui.

- N'allez pas croire que je vous fais la charité Meyrmine, mais je tiens à fêter cette première étape dans mon voyage. A ce propos, dîtes moi, que se passe-t-il d'intéressant en ce moment dans la République ?

Ne perdant pas le nord, Cyrus cherchait encore et toujours à récolter des informations, car mêmes les histoires les plus insignifiantes pouvaient devenir de véritables indices, des pistes pour sa prochaine aventure. Et si, dans tout ça, il arrivait à en apprendre un peu plus sur son compagnon de boisson, alors la soirée n'en serait que meilleure. Dans tous les cas, il comptait en profiter !

Il le battait certainement, pour sûr. Sans même le connaître, Cyrus pouvait déjà l'affirmer. Meyrmine, face à lui, ne payait pas de mine, mais il devait avoir commencé à boire bien avant son arrivée et avait encore une bonne posture et une façon de s'exprimer encore intelligible. D'après ce qu'il disait, sa manière de se présenter, il ne devait pas en être à sa première soirée à boire seul. Ainsi donc, comme ses doutes le suspectaient déjà, il faisait face à un alcoolique et il était, sans nul doute, battu d'avance. Peu importait la raison de vouloir ainsi se noyer dans l'alcool, Cyrus voulait juste passer une bonne soirée. Mais il voulu quand même relever le défi, buvant une nouvelle gorgée de sa chope.

Puis, pour répondre à sa question, Meyrmine lui fit un petit constat de la situation actuelle de la patrie. Des lois de plus en plus dures envers les minorités, voilà qui était étrange venant de la contrée ou tout un chacun était supposé pouvoir vivre libre. Le pays de la liberté perdait-il de son éclat au cours du temps ? Avec regret, Cyrus but une nouvelle gorgée comme pour enterrer une époque où les choses semblaient aller pour le mieux. Il ne se souciait guère de politique, mais il aimait ce monde, ses peuples et ses coutumes, quelle tristesse pour un homme, fervent amoureux de voyage et de découvertes, de réaliser qu'à chaque pas, le monde change autour de lui, et pas en mieux. Il ignora le commentaire sur la Présidente qu'il ne connaissait guère, hormis des ragots de rues et quelques lois qu'elle fit passer. Elle n'était pas sa dirigeante après tout. Il rigola doucement à propos du prix de l'alcool, au moins grâce à lui, Meyrmine boirait à l'oeil ce soir là.

Son acolyte de boisson parla ensuite d'un voleur qui rodait, mais Cyrus ne comprit pas vraiment l'information. Les voleurs n'étaient pas rares, et venaient de tous les horizons. En mentionner un en particulier, sans vraiment donner plus de détails était louche. Peut-être ce type était-il connu pour avoir formenté de sacrés coups dernièrement, ou alors Meyrmine était simplement quelqu'un de bien informé. Et si il était informé, alors il devait plus être habitué à la vie de la rue, ses avantages et ses défauts. Il but de nouveau une gorgée lorsque son comparse ironisa sur le fait qu'il n'aurait plus le sou après cette soirée. A croire que Meyrmine était une outre percée capable d'ingurgiter des gallons d'alcool sans broncher. Il repartirait plus pauvre, certes, mais de là à finir sur la paille...c'était un peu gros à avaler. Puis, la conversation retourna vers lui. Meyrmine avait eu la politesse de répondre à ses questions, il allait donc en faire de même.

- Brave, intrépide et généreux, comme vous y allez, pour cette soirée je ne suis comme vous qu'un homme cherchant à passer une bonne soirée. Mais si vous voulez tout savoir, j'arrive tout droit de Shoumei, de Mael plus précisément, ma ville natale.

A cet instant il s'interrompit car un grand bruit vint de l'entrée de la taverne et un petit comité entra. Pas des voleurs, ni même des brutes, on aurait plutôt dit une petite assemblée de commerçants, comptant des femmes dans leur groupe. Ils étaient assez richement vêtus et entrèrent dans le lieu comme si il leur appartenait. Celui qui semblait diriger le groupe parla fort, demandant une table pour tout son groupe, et le tavernier s'empressa de leur en offrir une. A priori, ce n'était qu'un groupe qui cherchait à fêter un événement quelconque, des gens innofensifs. Mais aux yeux de l'aventurier, ils avaient déjà deux défauts, le premier fut le bruit, ils parlaient tous très forts et riaient à gorge déployées comme si ils étaient les seuls dans la taverne. En réalité, ce groupe fit tellement de vacarme dès son arrivée que le reste des personnes déjà présentes augmenta naturellement le volume de leurs voix pour continuer leurs diverses conversations. Et pour courronner le tout, les horribles musiciens se mirent à jouer plus fort. Si ce n'était pas par l'alcool, Cyrus était certain de sortir d'ici avec une sacrée migraine juste à cause du bruit.

Le deuxième défaut de cette assemblée qui venait d'arriver était leur position, car le tavernier leur trouva une table toute proche de la leur et que l'un des malotru bouscula, sans s'excuser, Cyrus afin de s'installer. L'aventurier renversa un peu de sa bière et regarda l'homme en question qui remarqua son regard. Le commerçant lui répondit un « Excusez moi. » qui ne semblait pas en être un, avant de s'asseoir lourdement, poser ses bottes sur la table, et continuer à parler avec vigueur. L'aventurier n'aimait pas les sans-gènes. Lui même n'était pas toujours des plus délicats mais il remerciait ses parents de lui avoir inculqué un minimum de savoir vivre. Il pesta intérieurement sur ce groupe de rustres et reporta son attention sur Meyrmine.

- Désolé...ou en étais-je ? Ah oui, Mael. Je suis un aventurier venu de là-bas et je fais ça depuis quelques années. J'aime particulièrement partir à la recherche de reliques afin de les rapporter ou revendre aux églises de ma patrie, mais pas que ! Et je suis venu ici car je m'intéresse depuis peu aux anciennes reliques magiques.

La République étant connu pour être la nation où l'on apprenait la magie, il était normal que ses pas l'aient conduit jusqu'ici. Ici même à Liberty existait la très grande et célèbre académie où l'on apprenait les arts magiques. Sans aucun conteste, c'est ici qu'il récolterait des informations le menant à sa prochaine quête. Mais là, tout de suite, bien que ce ne soit pas du tout la faute de Meyrmine, il regretta d'avoir mis le pied dans cette taverne tant le groupe tout juste arrivé était insupportable.

Malheureusement, Meyrmine ne semblait pas être la meilleure mine d'informations pour ce que recherchait l'aventurier. Selon ses dires, lui même ne s'intéressait guère aux reliques et autres histoires du genre. Chacun était après tout libre de vivre selon ses désirs, et Cyrus ne croisait pas non plus des sources d'infos à chaque coin de rue. Il décida qu'il en était ainsi et passerait simplement une agréable soirée à boire tranquillement, décidé, désormais, à en apprendre plus sur la personne face à lui qu'à vouloir obtenir des indices. Si seulement le groupe à côté d'eux pouvait la boucler un peu. Depuis leur arrivée, on eut dit que l'endroit leur appartenait.

Puis Meyrmine lui parla brièvement de l'université Magic, comme Cyrus y avait déjà pensé. Selon son ami de boisson, s'appuyant certainement sur les ragots et histoires autour de ce lieu, l'université était riche, et surtout pleine d'objets. L'aventurier n'eut pas de réaction à propos de l'argent, cela n'avait jamais été le but de ses quêtes. Revendre ses reliques n'était qu'un moyen de survivre et de faire le bonheur des acheteurs. Il était plus intéressé par l'histoire en elle même, les légendes et les mythes. Puis Meyrmine ironisa sur le fait qu'il était impossible d'entrer en ce lieu. Ceci, Cyrus y avait aussi pensé, et il trouvait tout ça fort dommage. Que n'aurait-il pas donné pour pénétrer dans ce lieu, discuter avec quelques érudits, peut-être même demander l'autorisation de fouiner un peu dans leurs archives et autres bibliothèques. Quelles merveilles pouvait-il trouver à l'intérieur ? Il ne pouvait que l'imaginer, car il n'avait aucun moyen d'entrer pour le moment. Il n'était ni mage, ni érudit, et ne connaissait personne capable de le faire entrer. A entendre Meyrmine par contre, on pourrait presque croire que ce dernier avait déjà tenté l'aventure. Un voleur peut-être, ou quelqu'un de simplement curieux ? Pour ce soit, ce n'était pas important, c'était un homme avec qui il partageait un verre.

Le verre de ce dernier était vide d'ailleurs et il leva la main à l'attention du serveur. Prenant ce signal comme celui de la prochaine tournée, Cyrus termina sa propre chope de manière déraisonnablement rapide. A tel point qu'il sentit sa tête lui tourner quelques secondes. Mais le serveur ne vint pas, et l'aventurier n'eut qu'à se tourner qu'un instant pour comprendre pourquoi. Le pauvre tavernier se trouvait à la table des rustres, qui commandaient tous dans le plus grand désordre, braillaient plus fort les uns que les autres, ajoutant sans cesse de nouvelles choses à leur commande, changeant même parfois d'avis. Le pauvre homme semblait ne plus savoir où donner de la tête...et sans son expertise et sa direction, les autres serveurs et serveuses de la petite taverne commençaient eux aussi à perdre du temps et à agir de manière désordonnée. Meyrmine fit alors un commentaire sur le fait que...que finalement il avait simplement envie de boire, mais que ces gens là risquait de gâcher sa soirée. Cyrus lui pensait, comme le disait son acolyte, qu'il n'avait pas payé pour rien.

- Tout ceci devient fort contraignant effectivement.

Cyrus se leva à moitié de sa chaise, se penchant vers le groupe de rustres commerçants et capta aussitôt le regard du tavernier. Ce dernier avait comme une expression paniquée...peut-être s'attendait-il à ce que Cyrus pousse une gueulante, mais il n'en avait pas l'intention.

- Nous souhaiterions un autre verre mon ami et moi dès que vous en aurez le temps.
- Bien sûr monsieur, je suis avec vous dès que...
- Oh, l'aubergiste, coupa rudement l'un des hommes attablés, tu préfères servir les étrangers avant d'honnêtes marchands de ta propre patrie ? On ne recommandera pas ton trou !

Le tavernier, choqué et contrit, retourna aussitôt son attention sur leur table. L'étrange manège insupportable de leur commande cacophonique reprit de plus belle, et toute cette charmante assemblée ignora superbement l'aventurier. Cyrus sentit la colère monter en lui, mais il avait été bien élevé et n'en montra rien. Il regarda vaguement autour de lui pour voir que la colère semblait grimper chez beaucoup d'autres clients. Les plus impatients quittaient déjà les lieux sous les regards désolés des serveurs dépassés par la situation. Il se dit que le tavernier les avait entendu et que leurs verres arriveraient en temps voulu. C'est pourquoi il commença à se rasseoir.

- Mon cher Meyrmine, je crois qu'il faut nous armer de patience...sinon, nous n'auront qu'à nous rendre dans un autre lieu. A vous voir, je suppose que vous ne manquez pas d'expertise concernant les bonnes adresses du coin...sans compter que...

Puis il fut soudainement bousculé. Il sentit une grosse main se poser sur son épaule, et le visage grassouillet d'un homme s'approcher de lui, un verre à la main. C'était le même homme qui venait de couper la parole au tavernier l'instant d'avant. Voilà qu'il venait jusqu'à leur table sous les regards hilares de son groupe d'ami alors que le tavernie était reparti en toute hâte derrière son comptoir.

- Hey vous deux, vous avez juste l'air de vagabonds, alors laissez les personnes importantes se servir avant d'exiger de la boisson. Sinon toi et ton ami efféminé, vous avez qu'à aller voir ailleurs.

Loin derrière eux, les affreux musiciens venaient de s'arrêter de jouer, et l'on entendit une table commencer à en insulter une autre. La raison de leur dispute était inconnue...mais les choses semblaient très mal tourner. Cyrus regarda Meyrmine avec un air profondément fatigué...lui demandant du regard ce qu'il convenait de faire ? Peut-être les deux hommes feraient mieux de partir.