- Sur la terrasse -

- Si tu es prêt à faire un tel emménagement, ce sera encore mieux, même parfait. Ajouta Zaïn, ne voyant aucune objection à organiser cela à l'air libre.

Ensuite, Tagar et Zaïn furent laissés en privés, Arkady devant s'absenter un instant, le majordome lui indiquant le chemin. Tagar, vingt centimètres plus petit que son interlocuteur, s'approcha de Zaïn, comme pour lui confier quelque chose de moins professionnel. L'hybride s'installa alors dans un des fauteuils afin de mieux porter son attention sur les paroles de son hôte, tout en sirotant son vin en silence, faisant danser son regard entre le verre et le visage de celui qui lui parlait, affichant une mine satisfaite et attentive.

- Tant qu'à cette histoire de lignée, c'est bien quelque chose que j'ai envisagé, mais si je dois adopter, ce ne sera pas dans l'immédiat. Mais il est vrai que je ferai un excellent père sans en douter. Il plongea ses yeux jaunes dans le bleu de ceux de Tagar. Quant à ta demande, je ne sais pas si c'est à moi qu'il faut l'adresser, de plus, si j'ai le malheur de décider des choses à sa place, je sais d'expérience que cela me vaudra de passer un sale quart d'heure. Je t'invite à le lui demander à son retour. Fit-il dans un sourire.

Il se leva alors et constata que l'on commençait à sentir dans l'air comme une odeur de cuisine. Probablement le repas qui approchait, au grand réjouissements de l'hybride. Il finit son verre de vin, appréciant cette dernière gorgée du doux nectar savamment choisi par son hôte afin d'éveiller l'appétit. Il posa le verre devant son assiette - déterminée selon la chaise sur laquelle il avait déposé son manteau - pour ensuite pivoter vers son interlocuteur, croisant les doigts.

- Qui pense-tu inviter, dans les grands noms de notre chère nation, pour ta soirée ? Histoire de savoir à qui s'attendre lors du dit évènement.

- Sur la terrasse -

La liste des invités de la soirée plaisait plutôt bien à Zaïn qui se voyait déjà échanger avec certains nobles des plus influents de la nation, bien évidemment les Reys n'étaient pas les nobles les plus puissants de la capitale, mais suffisamment importants pour attirer l'intérêt du Coeur, ce qui n'était pas rien. L'hybride aura peut-être la chance de discuter avec le membre du gouvernement, avec un peu de chance et de tact. Cette soirée ne serait que profit pour les Tevon-Duncan, et ce en remerciant le contrôleur royal qui leurs permettait, servis sur un plateau, d'y participer, eux qui n'étaient que simples bourgeois.

Ils passèrent à table dès lors qu'Arkady fut de retour et ce qui leurs fut servis plût instantanément à Zaïn qui fut déjà comblé par l'odeur qui se répandit. Le dîner débuta et ils se régalèrent, Tagar en profita pour poser une autre question à ses invités, cette fois sur le nom de famille. Arkady pris les devants.

- Cela n'est pas de notre fait. Notre mère nous a donné les deux noms de famille pour nous laisser un brin de notre père. C'est à peu près tout ce qu'il nous reste de lui, alors nous l'avons gardé. Expliqua-t-elle sans broncher.

- De plus, cela nous donne plus de consistance. Plaisanta Zaïn.

Ils n'avaient jamais connu leurs père à vrai dire, s'étant volatilisé avant leur naissance. Ils n'avaient donc pu apprendre à l'aimer ou  le détester, et leur mère n'étant pas très bavarde à ce sujet, Zaïn et Arkady n'ont jamais eu son ressenti à son sujet. Si Zaïn se disait que ce n'était qu'un lâche qui les avait abandonné et qu'il lui exploserai bien la figure s'il venait à le rencontrer, Arkady n'était pas du même bord et aimer à croire qu'un jour leur famille pourrait être reconstituée. Mais pure utopie que cela, et elle le savait.

- Quelle est l'histoire du votre ? Si vous voulez bien en parler. Demanda la soeur.

- A table -

Arkady n'était pas tellement quelqu'un de curieuse, mais elle savait faire la discussion comme personne, capable de sortir n'importe quel sujet durant une discussion, évitant de ce fait tout blanc. C'était l'une de ses multiples qualités, entre être très intelligente, remarquablement persévérante, excellente combattante et dotée d'un physique avantageux, une femme forte à la rhétorique imbattable, d'une patience de fer couplé à un humour fin, empathique et confiante, elle était aussi une très bonne cuisinière. Ce qui lui permit d'apprécier le plat à sa juste valeur, et en plus de répondre à la dernière question que venait de lui poser Tagar sans hésiter.

- Mon frère a emprunté une voie plus risqué que la mienne d'emblée, lui permettant d'obtenir un revenu plus important pour nous permettre de survivre, mais j'ai également donnée pour qu'on s'en sorte. À ceci près que notre monde est systématiquement plus dur envers la gente féminine. Le travail de modèle est plus compliqué à obtenir que nous ne le pensons, d'un élitisme sans vergogne, ce serait presque une optique plus dangereuse que les combats de mon frère pour la fille que j'étais que de vouloir intégrer ce monde. Elle avait répondu sérieusement au questionnement de Tagar, à dessein. Mais j'étais agile de mes mains, et je savais cuisiner. Donc je n'ai pas eue de mal à être embauchée dans les cuisines de l'auberge du port. Vous pourriez grimacer mais il n'y avait pas meilleur endroit pour moi, les cuisines étant un bien meilleur endroit que la salle où notre société envoie toute les jeune femme comme serveuses. Ces dernière finissant toujours par se faire manquer de respect. Elle savait de quoi elle parlait, ayant entendu quelque cas de clients peu respectueux envers les serveuses.

- Et le propriétaire de l'auberge a bien fait de te mettre aux cuisines, j'aurai peine à imaginer ce qui serait advenu du moindre client qui aurait osé te manquer de respect si t'avais été serveuse. Que tu soit en cuisine était une bonne chose, au moins ils étaient en sécurité ces corniauds. Commenta Zaïn d'un air amusé.

- Mauvaise idée, en effet, que de s'attaquer à moi. Accorda Arkady, portant un morceau de poisson à sa bouche.

- Tu disais plus tôt que tu étais en capacité de te défendre par toi-même, Tagar. Mais dis-moi, nous cache-tu un art martial ou des pouvoirs magiques ? Questionna Zaïn, curieux de savoir s'il avait affaire à un mage.

- A table -

- Oui, au zeste de citron, au caramel, à l'écorce d'orange et bien d'autres parfums encore qui se marient bien au chocolat. Je peux en effet vous apporter un gâteau pour la soirée où vous nous invitez. Signifia-t-elle avant que son frère n'aborde le sujet des arcanes.

Zaïn observa avec admiration le fourreau que présenta Tagar, fort bien ouvragé et digne du noble qu'il était à n'en pas douter. Et même si Zaïn ne s'y connaissait pas en la matière, il se doutait que cette lame devait être fort bien équilibrée, en effet l'hybride savait manier une épée mais ses connaissances en escrime s'arrêtaient là. Il avait toujours estimé que n'importe quel combattant pouvait remporter un duel à main nu contre quelqu'un armé d'une épée, on ne se battait pas avec une lame mais avec sa volonté, or la volonté brisait tout métal. Et il savait ça d'expérience, ayant remporté à main nu de nombreux combats l'opposant à des adversaires armés de lames.

- Nous avons tout deux des facilités à communiquer avec les animaux, fort pratique pour les montures, vous en conviendrez, et plutôt récréatif avec les autres animaux. Ajouta-t-il sur le ton de la plaisanterie. Mais Kady maitrise une magie un peu plus divertissante... Il fut coupé par sa sœur.

- Ce n'est pas convenable, Zaïn. Fit-elle en le regardant dans les yeux.

- Allons, il pose la question, c'est bien signe qu'il est curieux. Argumenta Zaïn.

- Ce n'est pas une magie qui se pratique à table et encore moins lorsqu'on est invité, de surcroît par une personne importante. Insista-t-elle en agrandissant ses grands yeux jaunes.

- Ce serai impertinent que de ne point satisfaire la curiosité de notre hôte. Conclu Zaïn, ayant compris qu'il avait gagné le débat.

Arkady soupira en baissant le regard, elle releva la tête, rejetant un mèche de cheveux derrière son épaule gauche et se concentra en regardant le plat rempli de fruits placé en bout de table. Une poire s'éleva doucement dans les airs, se déplaçant dans l'espace en ligne droite pour venir se déposer lentement dans la main d'Arkady. Le silence s'était fait autour de la table durant l'exercice de télékinésie, elle le brisa en regardant Tagar.

- Rien de bien exceptionnel, mais pouvant se révéler pratique par moment. Elle ne voulu pas s'étaler sur la façon dont elle avait appris cette magie.

- Comme quand on est bien installé sur le canapé et qu'on n'a pas la force de se lever pour attraper son verre à l'autre bout de la pièce. Commenta Zaïn observant la réaction du noble. Comme quoi la magie et les arcanes ne sont pas toujours utilisées à des fins malveillantes. Fit-il alors tout en se resservant du cabillaud.

- A table -

Si Zaïn venait à retirer sa veste et sa chemise, Tagar pourrait observer de multiples cicatrices, l'hybride n'ayant pas toujours eu a ses côtés des mages capables de le soigner, quelques-unes de ses blessures on dû cicatriser naturellement, laissant ainsi quelques stigmates éparses. Il avait notamment une estafilade qui bardait son dos en diagonale, reliquat d'un combat de rue face à un escrimeur qui avait eu l'affront de s'en prendre à une femme à Taisen. Et comme la plupart de ses autres cicatrices, il avait eu celle-ci pour avoir joué au héro. Mais ces souvenirs ne le dissuadait absolument pas de continuer de voler au secours des autres, au contraire même, cela l'encourageait à se battre pour de bonne causes. Et même si ça ne faisait que nourrir son égo surdimensionné, c'était pour faire le bien qu'il jouait au héro parfois. Mais il ne parlerai pas de tout cela à Tagar, il ne faudrait pas voir à monopoliser le temps de parole.

- Oui, et un nombre incalculable de fois. Par chance j'ai toujours bien récupéré après avoir été blessé, mais je m'y suis fait, les blessures étant une part entière de mon travail. Il passa un doigt sur la cicatrice qui lui barrait le nez. Et comme je te l'ai dis ce matin, celle-ci est le prix du Holmgang qui m'a permis d'obtenir l'arène que je dirige à présent. Mais dis moi, n'ayant que très rarement entendu parler ailleurs de Holmgang, j'ai pas sincèrement l'impression que cette pratique soit toujours très en vogue. Peut-être que les reikois se sont dégonflés avec le temps, as-tu souvent des cas de Holmgang ? Questionna-t-il par curiosité.

Il mentait. Zaïn entendait très souvent parler de cas de Holmgang, mais toujours dans le milieu de la basse société ou dans celui de la pègre, milieu dans lequel Tagar ne devait pas tellement contrôler. Il n'en parla donc pas, mais sa curiosité, quant à elle, était bien réelle, car Zaïn avait réellement l'impression que le peuple reikois s'était ramollis avec le temps, comme si les duels, le combat et la guerre avaient été écartés du mode de vie du royaume. Il soupçonnait la nouvelle royauté d'en être la cause, comme s'ils voulaient s'axer sur la philosophie de faibles appliquée dans la République.

Il était inutile d'être un érudit séculaire pour savoir que le conflit était dans l'instinct de l'Homme. Il suffisait de constater tout les micro-conflits sociaux auxquels on est confrontés chaque jours pour savoir que cela pouvait rapidement prendre de l'ampleur. L'Homme ne pouvait vivre sans conflit. C'était un fait.

- A table -

Zaïn était d'accord avec Tagar, il était clair que la société reikoise avait connu des changements radicaux ces dernières années, et certains changements allaient dans le bon sens. Mais si elle n'ajouta rien, Arkady était en total désaccord avec Tagar, et même avec son frère. La jeune femme ne se manifesta pas, consciente que les débats politiques ne feraient que gâcher le repas, elle se contenta donc de déguster son cabillaud en écoutant les deux hommes discuter des conjonctures sociétales. En effet, la jeune femme trouvait que le Reike était mieux avant, plus fort, plus uni, et correspondait à l'idéal qu'elle se faisait d'un Royaume puissant. Mais aujourd'hui, Arkady ne pouvait que se morfondre face à la faiblesse que la nouvelle royauté illégitime et fallacieuse ne faisait que déployer jours après jours. Bien évidemment elle gardait cela pour soit et afficha un sourire à la question de Tagar, demandant si le repas leurs convenait.

- Votre cuistot sait préparer le poisson, si vous servez de tels plats à votre réception, il y a de fortes chances pour que ce soit une réussite, croyez-moi. Complimenta-t-elle.

Sur ces mots, elle écarta la carcasse de cabillaud sur le côté de son assiette, s'essuya la bouche et après une gorgée d'eau elle commença à découper la poire en quartiers. En face, Zaïn était également venu à bout de son plat et se léchait les lèvres, croisant les mains derrière sa tête, un sourire plaqué sur le visage.

- Invitez-vous souvent des gens à dîner ? Je pose cette question car je trouve que vous savez recevoir. Vous devez avoir un certains réseau de connaissances dû à votre fonction. Questionna-t-elle alors.

Arkady parlait en connaisseuse, les Tevon-Duncan étant habitués à inviter souvent des gens de leurs connaissance, voir des inconnus, tout comme Tagar qu'ils avaient reçu comme un roi sur leurs bateau ce matin même, le sens de l'hospitalité étant l'un de crédo de la fratrie. Zaïn invitait souvent des personnalités à son arène pour assister à des combats, d'autres fois c'était au théâtre, pour certains à l'auberge, et certaines fois, pour les gens qu'ils préféraient, c'était sur le Vanguard que les Tevon-Duncan les invitaient, pour des soirées pour dîner, ou juste pour prendre le thé, voire pour une sortie en mer. Tagar figurait ainsi sur la liste des potentiels invités futurs de la fratrie pour ce genre de mondanités... A l'exception des combats auxquels Zaïn ne se risquerai pas d'inviter le contrôleur pacifiste.

- A table -

« Aristote envisage trois actions humaines : La Theoria (Connaitre), la Praxis (Agir) et la Poiesis (Faire). La Poiesis décris une activité qui n'est pas poursuivie pour elle-même, en revanche, la Praxis organise les activités de la société (la politique), c'est une activité poursuivie pour elle-même, permettant d'organiser d'autres activités. »

- Aristote, La République.

- C'est ça la politique : l'exercice du pouvoir se fait dans la partie immergée de l'iceberg. Commenta Zaïn, une fois que son interlocuteur eu terminé.

N'ayant jamais voyagé sur les mers septentrionales, Zaïn n'avait jamais vu d'iceberg ni même d'aussi gros blocs de glace de sa vie, un retard qu'il se ferai un plaisir de rattraper dès lors qu'il trouvera du temps pour voyager. Si seulement il savait que la première fois où il poserai ses yeux sur un glacier ce serai justement en compagnie de Tagar, au milieu des montagnes de Shoumei. Mais il savait bien évidemment que la plus grosse partie d'un iceberg se trouvait sous le niveau de l'eau, ayant déjà vu des représentations de ces blocs de glace dans un livre de voyage.

- La politique m'est toujours passée au dessus de la tête, considérant que c'était le passe temps de la noblesse, n'ayant pas à se soucier de leurs survie, ils s'occupent à améliorer leurs quotidien déjà confortable avec cette affaire publique qu'est la politique. Tu notera l'absence totale d'animosité dans mon discours, aucune critique par là. Mais il me semble que si c'est la noblesse qui se charge de la politique, que ce soit dans les trois nations majeures de Tensai, c'est bien parce que ce sont les seuls qui ont le temps de s'en soucier. Je m'explique : Si tous ont bien une opinion sur ce que leurs royaume devrait être, l'aubergiste, le marin ou l'agriculteur n'ont pas le temps de s'en charger, trop occupés qu'ils sont à survivre. Il ancra son regard dans celui de Tagar.

- Il faut comprendre que je fait une distinction entre vivre et survivre. Le peuple survie par le travail, la noblesse vie dans son travail - quoique l'on en dise moins manuel, plus théorique et intellectuel - lui permettant de ne point se soucier de ce qu'ils dîneront et s'ils auront un lit où pioncer le soir. Dans le sens où les agriculteurs survivent par leurs actions, le travail au champs, les nobles vivent par le fait de définir toutes ces actions, au travers de la politique. La noblesse établit le prix du blé comme elle dicte que le meurtre est illégal ou encore que le holmgang est dépassé. Il sentit le regard réprobateur de sa sœur, ses poils se hérissèrent.

- Enfin, je suis bien placé pour parler de cela, étant passé du milieu de la survie à celui de la vie. Nos sociétés sont définies, en partie, par ces soirées mondaines, comme vous le dites si bien. Un jeu auquel vous nous faites l'honneur de nous inclure. Conclu-t-il.

Zaïn alla chercher confirmation dans le regard de sa sœur, il n'y trouva pas grand chose tenant de la confirmation, Arkady considérant peut-être que parler ainsi de la politique devant un représentant de la noblesse reikoise était assurément culotée. Mais c'était sa franchise qui fait Zaïn, de plus il avait une opinion sur le sujet, cela aurait été dommage de ne point l'exprimer avec quelqu'un de si éloquent et patient que Tagar Reys. Sentant qu'il avait peut-être monopolisé la parole un peu trop longtemps, Zaïn observa leurs assiettes presque vides et demanda alors sur un ton plus jovial :

- Qu'as-tu prévu pour le dessert ?

Cette fois il n'alla pas chercher de soutien dans le regard de sa sœur, il savait pertinemment que le regard d'Arkady allait le transformer en statue de pierre s'il venait à le croiser.

- A table -

Zaïn écouta avec attention la réponse de Tagar, avec le même respect qu'il lui avait accordé en l'écoutant précédemment. Mais il constata que le contrôleur royal, aussi jovial soit-il n'était pas habitué à parler plus que de mesure, comme si enchainer autant de phrases était un réel effort pour lui. En effet, ce plaidoyer était probablement la plus longue tirade que Tagar ai prononcé depuis qu'ils s'étaient rencontrés, ceci-dit il s'exprimait bien et marquait des points. En revanche, lorsqu'il eu terminé, Zaïn n'ajouta rien, ne voulant pas fatiguer le noble.

- Votre dessert préféré. Fit remarquer Arkady.

Sur ces mots, le dessert fut apporté sur la table, Zaïn observa avec attention le pâtissier découper des tranches, en espérant que ce dernier aura la présence d'esprit de constater que l'hybride était de forte constitution et avait ainsi "besoin" d'une part plus conséquente... Même si cela se justifiait surtout par la gourmandise de Zaïn. Il en fut satisfait, constatant qu'une tranche respectable lui fut servie et que le coeur du gâteau était fondant. Le silence s'était installé durant le processus, comme pour marquer le respect devant un dessert si appétissant, mais dans les faits, le si bavard Zaïn Tevon-Duncan ne disait rien pour ne pas retarder l'unique chose qu'attendait Tagar : Sa promenade digestive. Il était pas bête et avait bien saisi que le contrôleur appréciait la discussion, mais ce repas n'étant qu'un prétexte pour atteindre sa cible, cela il l'avait compris depuis leurs petite entrevue privée tantôt.

- Donc, si ma perspicacité ne me joue pas des tours, votre objectif en politique serai d'obtenir la si convoitée position de Coeur ? Arkady avait posée la question à Tagar, évidemment.

Si la jeune femme parlait peu, elle écoutait beaucoup. Et ce détail glissé dans a discussion ne lui avait pas échappée, et si le contrôleur royal leurs avait demandé à quoi ils aspiraient, ils ne lui avaient pas encore retourné la question. Une politesse qu'Arkady rattrapait là.

- Sur la terrasse, Palais Reys -

Au moins ne manquait-il pas d'ambitions, et il savait comment il allait s'y prendre pour atteindre son but, Tagar avait toutes les cartes de son avenir en main. Ceci-dit, s'il avait bien émit son souhait professionnel, il avait toujours l'inconnu matrimonial qui, selon ses dires, relevait de sa mère, bien qu'il ai son mot à dire à ce sujet, il avait bien spécifié à ses invités qu'il n'avait pour l'instant aucune fiancée mais sa recherche était active. Si seulement Zaïn savait qu'il allait rencontrer dans quelques temps la future fiancée de Tagar, Mirari, au hasard dans le désert entre Kyouji et Taisen, il aurait appelé les dieux à moins jouer avec le hasard quand il s'agissait de leurs vies.

Mais il ne le savait pas encore et saisi d'emblée que son hôte ne l'invitait pas à lui pour la promenade digestive, mais que la politesse l'obligeait à le faire, tout du moins, le plan de Tagar demandait à ce que le frère refuse poliment. Zaïn hésita donc un instant, cherchant à trouver un alibi pas trop cramé. Mais ce fut sa sœur qui le lui donna en prenant la parole avant lui.

- J'accepte volontiers, elle pivota vers son frère, Quant à toi, tu ferai mieux de passer voir Maman avant qu'elle ne soit couchée. Fit-elle à l'impératif.

- Tout à fait, certaines choses ne peuvent attendre. Acquiesça-t-il en se levant.

- Indéniablement. Arkady fit de même.

- Je te remercie pour ce dîner, c'est très aimable de ta part. Notre maman vit pas loin, je passe la voir puis je reviendrai chercher Kady juste après. Ajouta-t-il en s'essuyant la bouche.

- Je suis plus une enfant, je pense être en capacité de retrouver le chemin de la maison, Zaïn. Répliqua Arkady.

- Certes, certes. Zaïn ne pouvait la contredire là dessus, et ne devait pas le faire.

Il semblerai que Tagar avait obtenu son tête à tête sans même batailler pour l'avoir, de surcroit Zaïn se faisait écarter tel un enfant qui devait aller se coucher. L'hybride était quelque peu embêté mais ne le montra pas, après tout Tagar était bien au fait du respect qui était dû au Maman - avec une majuscule je vous prie.

- Dans le jardin du palais -

Une fois que son frère eu quitté les lieux, Arkady descendit dans le jardin avec Tagar, elle en profita pour observer avec plus grande attention là où ils pourraient organiser les combats. Et elle repéra d'ailleurs une petite clairière pavée qui pourrait parfaitement correspondre à condition d'en retirer les bancs et la table qui l'occupait, bordé de haies et plutôt large, il y aurait assez de place pour les duellistes et les spectateurs. De plus elle repéra une dépendance juste à côté où les pugilistes pourraient se préparer en attendant leur tour. Arkady avait toujours l'œil professionnel, même durant une marche bucolique. Ils en arrivèrent au banc où Tagar lui proposa de s'arrêter.

- Allons je ne suis pas une femme enceinte qui s'essouffle rapidement. Cette réplique devenait amère dès lors qu'on connaissait la malédiction des Tevon-Duncan à ce propos, elle ajouta bien vite : Mais asseyons-nous un instant, ce sera plus aisé pour parler.

Elle écouta avec amusement la remarque de séduction qu'il parvint à sortir. Quel étrange personnage que ce Tagar ! Il s'écartait en tout points du stéréotype du contrôleur royal, et avec cette dernière phrase il se plaçait même à l'opposé de celui-ci. Arkady tourna ses grands yeux jaunes vers ceux de Tagar et le dévisagea, mais pas d'incompréhension par là, plutôt quelque chose comme de la surprise mêlé à de l'amusement. Or, l'hybride savait comment réagir dans ce genre de situation, ayant déjà un peu d'expérience dans le domaine avec les hommes, elle afficha ainsi un large sourire pour désamorcer la gêne qui avait pris Tagar aux tripes.

- Merci ! Et vous n'êtes pas une plante bien laide non plus Tagar, loin de là dirai-je même. Elle lui avait renvoyée son compliment, mais se rendant compte qu'elle était un peu vache, elle ajouta :

- J'aurai pu croire en premier lieu que vous n'êtes qu'un nobliaux qui enchaine les invitations lancées à toutes les jolies filles que vous croisez, ce que beaucoup de votre caste ne se gênent pas de faire. Mais tout ce que vous nous avez confié tout à l'heure me fait dire que tout ceci n'est pas dans votre habitude. Je veux dire : que d'isoler les jeunes femmes pour leurs faire des compliments sur leurs pétales. Elle élargie encore son sourire.

- S'en est presque mignon.

La façon dont elle avait prononcée "presque" signifiait que ce mot pouvait être facilement retiré de sa phrase.
Tagar était mignon c'est un fait.

- A l'extérieur du palais, dans les rues. -

"J'espère qu'elle ne lui fera pas passer un trop mauvais quart d'heure." Pensa Zaïn tout en marchant dans les rues pavées.

Il avait les mains dans les poches de son manteau qu'il avait récupéré dans le hall et avançait à présent d'un pas sûr vers la maison où vivait sa mère, un peu plus bas dans un quartier fort respectable, pas autant que celui de Tagar, mais propre et peu populaire. Il connaissait bien sa sœur et savait que si ce n'était pas une fille facile, s'était un fille très difficile, et avec du répondant de surcroît. Il savait donc qu'elle ne ferait qu'une bouchée du pauvre Tagar s'il venait à devenir rustre avec elle, mais il savait aussi que Tagar n'était pas ce genre de personnage. Zaïn savait également qu'Arkady persistait à vouvoyer les hommes s'était justement pour signifier cette barrière, dès lors qu'elle viendrait à tutoyer un homme - en dehors de sa famille - c'était qu'il avait une chance. Il n'avait pas constaté cela durant le repas, mais il se dit alors que si Tagar poussait un peu la chose, il pourrait peut être obtenir ce tutoiement. Enfin, d'autant plus qu'ils avaient une affaire commerciale en cours, Zaïn pria les étoiles pour qu'il ne tente pas des folies, sans quoi Arkady pourrait le broyer, et pas seulement physiquement... il craignait surtout les dégât psychologiques que Zaïn avait déjà constaté chez certains hardis qui avaient manqués de respect à Arkady, pensant que c'était une fille facile.

"Tiens ça me rappelle ce type qui l'avait regardé avec un peu trop d'insistance..." Pensa-t-il, mais inutile de continuer à écouter les pensées de l'hybride, solitaire, dans cette rue.

- Dans le jardin du palais -

Tagar Reys était définitivement mignon, il était timide, rougissait et tenter de noyer sa gêne au milieu de ses paroles, étrangement il était plus éloquent mis sous pression que lorsqu'il était détendu et à l'aise. Arkady s'en délectait et en son fort intérieur elle savait qu'elle n'en attendait pas moins du contrôleur royal, et même qu'elle espérait, encore plus profondément, ce cette discussion survienne. Et maintenant que cela advenait, elle mettait à l'épreuve Tagar, comme pour le pousser à dire ce qu'il avait sur le coeur, afin de mieux jauger si ce qu'il pense être de l'amour l'est vraiment.

Il fallait croire que ça avait été le vrai coup de foudre chez lui, peut-être avait il espéré cet instant depuis qu'ils s'étaient rencontré ce matin, au moins Tagar n'allait pas lentement en besogne. C'était surement cette hâte qui faisait qu'il était si peu sûr de lui, mais il avait repris du galon dès lors que son compliment n'avait pas été rejeté d'emblée, si Arkady l'avait giflé, tout aurai été perdu. Mais ce n'avait pas été le cas, donc il faisait bien de continuer. Et si l'hybride usait d'artifices pour désarçonner son interlocuteur, c'était justement pour mieux dissimuler sa propre gêne.

Elle rougit justement lorsque Tagar lui administra une nouvelle séquence de compliments, au moins ils étaient assortis, on aurait dit deux roses rouges au milieu de ce jardin. La lune les éclairait alors lorsqu'il posa une question qui ne devait pas l'être, il aurait dû agir au lieu de demander, Ardaky eue alors un moment de recul, comme pour mieux le contempler, et fronça les sourcils.

- Un peu de cran ! Asséna-t-elle alors.

Et elle l'embrassa.

HRP : Si tu l'accepte, je propose qu'on clôt le RP ici sur une fin ouverte, merci à toi !